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De joyeuses retrouvailles !


Blaquière

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Membre, 76ans Posté(e)
Blaquière Membre 18 602 messages
Maitre des forums‚ 76ans‚
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J'ai retrouvé cette vielle histoire : vendredi 10 janvier 1997 !

(Ne vous fiez pas au titre !)

 

De joyeuses retrouvailles !

 

Excellente idée que de se retrouver tous en famille pour ce repas. Ça permettra de reprendre contact avec tous ceux qu’on a perdus de vue. Et en particulier avec ceux qui sont morts depuis plusieurs années et que sans ce repas on finirait par oublier complètement...

Ainsi sont, sont, sont présents mon oncle, mon père aussi quoi que lui ne soit pas tout à fait mort. Puisque je le revois assez souvent. Mais on n’est pas là pour chicaner ni pour organiser quelque banquet parfaitement macabre. Non! Pas d’ostracisme ! Des vivants, des morts et des moitié-moitié !

LE CŒUR:

Ça ne veut rien dire !

Mon père compte sans doute en profiter pour se rabibocher avec ma mère, morte elle aussi, le malin !

Il est malingre, ton père ! » me dit mon oncle. « Ça l’a marqué son divorce : il a drôlement décollé ! Et puis, il n’a pas l’air bien dans son assiette. il ne finit plus rien! Il n’a pas taillé ses vignes, et il n’a même pas balayé la cuisine !»

Ça, de pas finir, c’est normal ! Pas grave ! Je réponds à mon oncle. Chez nous, chez les Blaquière, on commence toujours tout et on ne finit jamais rien ! C’est un principe : l’inefficacité en plus !

(C’est comme la vie, finalement. tout le monde la commence et on s’arrête tous en chemin...)

Il n’empêche que je trouve à mon père fière allure. Il est très élégant dans son beau costume noir sans un seul faux pli ! Il a toujours ses gestes aussi raffinés, des gestes presque absents... Mais l’oncle a aussi vu juste. L’ancienne cuisine, depuis longtemps transformée en débarras n’est pas prête pour le repas. Le sol granule encore de fins débris divers sous nos chaussures. On décide donc que le banquet se tiendra dans la maison voisine, celle de Maimé Simon.

J’y vais en reconnaissance. Maimé sans doute est mort lui aussi, mais il n’est pas là et sa maison est déserte. Obscure. Le banquet des morts aura-t-il lieu dans une maison morte ? Et pleine de mouches de surcroît, cette maison. Des grosses mouches vertes...

C’est pas possible de manger ici je me dis. Je vais chasser les mouches par les fenêtres!...

Dans un placard, à droite en entrant, je trouve une vieille serviette ou plutôt deux serviettes attenantes. De ces serviettes vendues au mètre qu’il revient aux acheteurs de détailler eux-mêmes, ce qui n’a pas été fait. Deux vieilles serviettes neuves soudées, donc.

J’entreprends de balayer l’espace de haut en bas en partant d’un coin de la pièce pour chasser les mouches vers le pôle lumineux de la fenêtre qui leur indique la sortie. Mais les vitres de la fenêtre, sont prises dans la maçonnerie sur les côtés et la fenêtre ne peut pas s’ouvrir… les mouches qui ont bien été attirées vers le jour s’agglutinent contre le verre sale. Elles n’ont pas toutes trouvé le petit triangle de fuite de la vitre cassée en bas sur l’angle droit.

J’inspecte alors le reste de la maison dans l’espoir de trouver un passage mieux praticable pour les insectes… En arrière de la première pièce, un couloir encore plus sombre débouche sur une fenêtre aux vitres pareillement cimentées. J’approche mon visage au raz des vitres et découvre, brouillée par l’opacité de salissure incrustée dans le verre, une cour étroite, humide et fermée vers laquelle s’inclinent les toits du voisinage...

Tout cela n’est pas très ragoûtant et me plaît guère. Ça ne fera pas l’affaire pour le banquet des morts ! Je reviens dans la première pièce devant la fenêtre dont les mouches se sont transformées... en frelons !

(Ces grosses guêpes dont trois piqûres dit-on pouvaient jadis tuer un cheval !)

En l’absence de cheval, mieux vaut fuir cet endroit insalubre ! Et sans même éteindre la lumière vu qu’un frelon se prélasse sur l’interrupteur !

Malgré mes avertissements, Daniel, l’électricien qui est résolu à ne pas s’en laisser compter en matière d’interrupteur sort de sa trousse une paire de tenailles… Il s’approche à pas d’électricien de la bête au ventre oblong et lui sectionne courageusement la tête !. La tenaille émet le clic caractéristique d’une tenaille cisaillant une tête de frelon : Clic !

Je fait alors remarquer à Daniel que le frelon devant porter son dard plutôt au cul, ce n’est pas la tête qu’il fallait lui cisailler mais le cul… Or le cul de la bête est tombé avec tout le reste et Daniel peut actionner l’interrupteur d’un geste professionnel. Le noir se fait...

Dans la maison d’à côté, qui doivent encore piétiner dans la cuisine granuleuse, les morts et les vivants commencent sûrement à s’impatienter. Quoi qu’après tout ça, il faudra avoir le cœur bien accroché pour se mettre à table !

Il est vrai qu’en matière de bouffe, les morts chipotent et qu’un rien les nourrit...

 

 

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