Vauban, l'inventeur de la France moderne

La caractéristique des impôts indirects est que leur perception est confiée aux fermiers. Vauban qualifiaient les fermiers de « sangsues de l’Etat ». Colbert avait décidé de faire porter l’effort fiscal sur les impôts indirects. C’était logique et juste, puisqu’ils étaient payés par tous et en fonction de la consommation. Limiter la taille permettait de soulager les paysans qui, pour ne pas être saignés à blanc, laissaient péricliter leurs cultures…

Vauban va présenter un projet de capitation. Celle-ci existe déjà, conçue par Ponchartrain. Mais le projet de Vauban diffère. Le principe de Vauban est de prendre pour assiette le revenu réel du contribuable, et non celui que le fisc peut supposer. Par ailleurs, le clergé ne pouvait en être exempté. Vauban amenait l’égalité devant l’impôt. Ce projet est le point de départ de qu’il mettra en place par la suite : la dîme royale. La participation de chacun aux dépenses du royaume, d’une façon proportionnelle à son revenu, préface la future République : une nation où chacun participe au bien de tous.

L’administration du royaume était loin de pouvoir déterminer et collecter cet impôt en fonction de la richesse personnelle des français. Néanmoins la proposition de Vauban ne manque pas de pertinence. Mais son texte dérange. La France va très mal, engluée dans une mauvaise santé sociale et un déséquilibre financier inextricable.

Vauban est vieillissant, aigri. Il est devenu Maréchal de France en 1703, distinction qu’il estimait mériter depuis des années déjà. En 1705, sa femme décède. Peut être se rend-t-il compte du peu de temps passé avec elle au cours de sa vie ? En 1706, il comprend qu’il gêne lorsqu’il demande le commandement du siège de Turin. On lui rétorque que ce n’est pas la place d’un Maréchal de France… L’idéal de toute la vie de Vauban est de se rendre utile au royaume, alors il décide de publier son « Projet de dîme Royale ».

Jamais auparavant il n’avait publié un seul des nombreux mémoires qu’il avait écrit. En 1707, son texte circule dans Paris et ne passe pas inaperçu. Les réglementations sur la Librairie se durcissent : toute publication exige une autorisation. Vauban dépose une demande, pense-t-il mettre son mémoire dans le commerce ? Au même moment, le Conseil d’En Haut interdit la lecture de son ouvrage. Cela excite les curieux, alors le Conseil prononce une seconde interdiction. Probablement, pour Vauban, le choc est extrêmement rude.

Oui

On a vu à quel point ses rapports direct avec le Roi pouvait rendre Vauban imprudent. La publication de son projet est sans doute la goutte d’eau…  Les exemplaires en circulation sont confisqués. Le Roi lui écrit :

« … Il est vrai qu’au-delà de ses propositions d’ordre fiscal, le Projet de dîme royale expose crûment l’état dramatique du pays. C’est une information sensible alors que le royaume se trouve en pleine guerre. De plus, l’auteur désigne les responsables. Quant aux remèdes proposés, ils dérangent beaucoup de monde. On conçoit bien la décision prise en très haut lieu. »

La deuxième interdiction de publication tombe le 14 mars 1707. Le 30 mars, Vauban succombe à la bronchite chronique qui l’a handicapé pendant toute sa carrière. Sébastien Le Prestre, marquis de Vauban et maréchal de France, décède d’une embolie pulmonaire. Sentant que la fin s’annonçait, il avait demandé à son confesseur de lire le Projet de dîme royale. L’honnête homme qu’il avait toujours été tenait à s’assurer qu’en rédigeant ce mémoire, il n’avait rien fait de contraire à sa conscience.

Cette dîme royale, qui deviendra quelques siècles plus tard le système fiscal adopté dans le monde entier.

C'est fini ? 

Merci beaucoup January, j'ai appris plein plein de choses et je vais même relire pour mieux les intégrer. Toute une époque révélée par le biais de Vauban, dont je savais bien peu de sa vie, à part ses réalisations architecturales. 

il y a 1 minute, Petit pois a dit :

C'est fini ? 

 

Merci beaucoup January, j'ai appris plein plein de choses et je vais même relire pour mieux les intégrer. Toute une époque révélée par le biais de Vauban, dont je savais bien peu de sa vie, à part ses réalisations architecturales. 

il y a 5 minutes, Summer a dit :

 

Ça me rappelle le fameux Reader's Digest, mais en bien plus palpitant !! 

...La patte de January , c'est ça, la différence 

Merci January

La vache, j'ai eu un moment d'hésitation entre la patte et la pâte  

Je confirme aussi, on apprend des choses qu'on ignorait ou qu'on avait oublié. La reader est plus digeste  

Mais non c'est pas fini !!! Roooo...

Le 1^er avril 1707, les obsèques du maréchal de France se limitent à un simple service solennel en l’église Saint-Roch, sa paroisse parisienne. La dépouille est transportée à Bazoches et enterrée sous la chapelle Saint Sébastien de l’église du village.

Turenne avait été inhumé dans la basilique royale de Saint Denis sur ordre de Louis XIV. Modeste par ses origines, Vauban le restera donc par la discrétion de sa sépulture jusqu’au premier empire. Le Dôme des invalides étant devenu panthéon militaire, il accueillera face à face la sépulture de Turenne et le cœur de Vauban. Jolie translation entre l’église du Morvan et le mausolée national, qui célèbre l’extraordinaire chemin parcouru par le gamin de Saint-Léger sous Avallon, devenu Maréchal de Louis XIV.

C’est ici que s’achève notre partage, je remercie tous les participants et je reviens bientôt vous « raconter des histoires » J

Maintenant c'est fini...

Il y a 1 heure, Petit pois a dit :

C'est fini ? 

 

Merci beaucoup January, j'ai appris plein plein de choses et je vais même relire pour mieux les intégrer. Toute une époque révélée par le biais de Vauban, dont je savais bien peu de sa vie, à part ses réalisations architecturales. 

C'est ça, quand on pense "Vauban", on ne pense qu'à ses réalisations architecturales, alors qu'en fait il a fait beaucoup plus à côté, beaucoup plus, parce que pour le plus grand nombre.

Je suis vraiment déçue qu'il ait fini sa carrière de cette façon, sur.. une négation totale, un rejet. Aucune considération pour tout ce qu'il avait fait toutes ces années. C'est atroce.... 

Il n'a cessé de braver la Royauté et le clergé, comment en aurait-il pu être autrement, hélas !

Merci encore.

Plaisir  

Je reviens tout de suite pour vous raconter des histoires. Zieutez les "lectures partagées"  

il y a 12 minutes, Petit pois a dit :

Il n'a cessé de braver la Royauté et le clergé, comment en aurait-il pu être autrement, hélas !

 

Merci encore.

Hélas oui. Ca me laisse tellement insatisfaite, c'est fou, je ne ressens ça pour aucun autre "homme d'état"', "homme qui compte". Une vie entière à améliorer les choses, à essayer de concilier peuple et gouvernement, avec succès. On ne peut quand même pas dire que tout ce que Vauban a fait n'a servi à rien. Mais justement, c'est peut être pire : le meilleur. Il apportait et il était le meilleur, jusqu'à ce qu'il dise : vous devez, vous aussi, en donner un peu. Parce que ça ne vous manque pas. Et là... Peu importe tout ce que tu as apporté avant, tout est néant, tu n'es plus rien. Tu ne comprends pas. Et je crois que  c'est ça le pire, pour lui, pour Vauban, à  un moment on lui a dit : tu ne comprends pas. Tu as faux. 

Oui. Parce qu'il a cru, que les puissants se déposséderaient de miettes qui ne leur manqueraient pas, et c'était la vérité. Mais c'était leurs miettes...

https://fr.wikipedia.org/wiki/Sébastien_Le_Prestre_de_Vauban

Ce qui est toujours embêtant dans une biographie c'est la platitude avec laquelle elle est racontée en général.

Merci Jan 

Merci ! Excellent!!  Comme je le lisais plus haut , on connait tous les fortifications de Vauban , mais moins sa vie ! Un génie !!! 

Plaisir