A perdre la raison

Film de Joachim Lafosse sorti en 2012 avec Niels Arestrup, Tahar Rahim, Emilie Dequenne (3 excellents acteurs).

Il faut apprécier la caméra sur l'épaule, un peu façon Lars Von Trier, qui restitue le réalisme déjà bien criant.

Le film est tiré d'un fait divers monstrueux mais traite, avec une rare intelligence, plusieurs thèmes qui ne peuvent laisser indifférents.

Il n'y a quasiment pas d'image, tout est suggéré, même 2 mots en disent parfois trop long.

Perso, j'en suis ressortie totalement bouleversée : comment la manipulation et l'emprise on ne peut plus malsaine peuvent conduire à faire souffrir même les êtres que nous aimons le plus au monde, comment une mère aimante peut en arriver à une solution si radicale...

Nous avons donc un personnage du médecin dans les bras duquel on a envie de se lover, qu'on admire, respecte ; et qui s'avère être un parfait pervers manipulateur sans que jamais on n'arrive concrètement à le cerner. Pas de méchanceté, pas de paroles violentes, juste une attitude délétère et destructrice. Donc un monstre, un vrai, comme Niels Arestrup sait les jouer à la perfection en distillant une angoisse certaine.

Une Emilie Dequenne dans le rôle d'une mère tombant dans la déchéance psychique la plus totale.

L'impression de totale impuissance en tant que spectateur m'a bien saisie ; comme si je regardais les scènes derrière un mur de verre en repérant tous les pièges, sans pouvoir prévenir. Un peu comme lorsqu'on hurle dans un cauchemar mais que personne ne nous entend.

Un film sobre, parfait, ô combien dérangeant, une mise en scène rigoureuse, la spirale tragique du double tranchant des sentiments amoureux, le poids des dettes morales ou matérielles...

Du grand cinéma comme on aimerait en voir plus souvent, qui pourtant n'a pas fait grand bruit.