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10 mars 1913. Camille Claudel est jetée à l'asile


January

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Modérateur, ©, 108ans Posté(e)
January Modérateur 62 250 messages
108ans‚ ©,
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Le 10 mars 1913, un fourgon hippomobile s'engage sur le quai Bourbon de l'île Saint-Louis, à Paris. Les fers des chevaux résonnent violemment sur le pavé. Le véhicule s'arrête devant le numéro 19 du quai. Effarés, les rares passants assistent à un enlèvement : deux infirmiers musclés forcent les portes d'un atelier. C'est celui de Camille Claudel.

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Camille a pris soin de se barricader. Les infirmiers sont obligés de passer par la fenêtre. Une fois à l'intérieur, ils sont stupéfaits de tant d'immondices, de tant de puanteur. Ils ont peine à croire qu'on puisse vivre dans un tel capharnaüm, plongé dans l'obscurité et l'humidité. Des chats circulent autour de plusieurs sculptures brisées.La sculptrice est bien dans sa tanière, crasseuse au possible, vociférante. À 48 ans, elle en paraît dix de plus. C'est une bête meurtrie au fond de son antre, isolée du monde, emportée par la folie, comme possédée. Les infirmiers la balancent dans le fourgon, direction l'asile de Ville-Évrard à Neuilly-sur-Marne. Elle ne reverra jamais son atelier.
 Sa famille la prétend incapable de s'occuper d'elle-même, affirmant qu'il lui faut des soins. Mais est-ce si vrai que cela ?

On sait que la mère de Camille la considère comme un boulet, une erreur de la nature. Elle n'en veut pas. Qu'on la balance dans un asile pour ne plus en entendre parler. Sitôt son époux décédé, cette charmante mère demande un certificat d'internement au docteur Michaux, qui loge au-dessus de l'atelier de Camille. Elle fait également pression sur son fils Paul, le célèbre écrivain, pour faire enfermer sa soeur dans un asile. En bon petit garçon, Paul a obéi à sa mère. Sans doute en a-t-il, lui aussi, marre des fabulations de sa soeur, de ses crises d'hystérie, de ses délires de persécution. Elle va jusqu'à accuser publiquement le grand Rodin de vouloir lui voler ses oeuvres.

Pourtant, la rencontre entre Camille et Rodin avait été si belle. La jeune femme a 20 ans quand elle devient l'élève du sculpteur de 24 ans son aîné. Non seulement elle est jeune, belle, mais, pour ne rien gâcher, elle est dotée d'un talent rare pour la sculpture. Il fait d'elle son inspiratrice, sa collaboratrice et bien sûr sa maîtresse. Il aurait tort de s'en priver. Camille ne demande pas mieux, quitte à se tuer à la tâche pour l'aider. Son succès à lui va grandissant, tandis que le sien se fait toujours attendre. Camille est confinée dans l'ombre de son amant. Cela ne la satisfait pas. Elle aussi veut exister. Pour cela, elle travaille comme une dingue, ose des sculptures qui lui amènent les éloges de la presse. Enfin, son talent est reconnu. Mais l'entente entre les artistes s'effiloche, car Rodin a une maîtresse "officielle", ce que Camille ne supporte pas. En 1898, après presque 15 ans d'attente et plusieurs séparations, elle comprend qu'il ne l'épousera jamais. C'est la rupture définitive.

Pour Camille, la blessure de la séparation reste vive, même si, au fil des années, elle parvient à s'affranchir de l'influence artistique de Rodin. Elle mange de la vache enragée : peu de soutiens financiers, peu de commandes, les factures s'accumulent, elle ne s'en sort pas. Elle commence à penser que Rodin est derrière tout ça. Elle se replie sur elle-même, ne fait plus confiance à personne, refuse les soirées mondaines, les déjeuners avec des personnes influentes. Elle se sent persécutée.

Impossible de trouver du réconfort auprès de son frère, "mon petit Paul", comme elle dit. Lui aussi lui fausse compagnie. Pourtant, ils ont toujours eu des relations gémellaires, fusionnelles, incestueuses, diront certains. Tous les deux étaient animés de la même soif créatrice et fascinés l'un par l'autre, jusqu'à ce que Paul transforme cette fascination en une forme de répulsion. A-t-il peur que le génie de sa soeur ne surpasse le sien ? En se mariant, il a comme rompu avec elle. Depuis lors, il se voue à la religion, à l'écriture et, d'abord, à sa réussite sociale. Et voilà ce qu'elle est devenue, sa soeur chérie, pendant qu'il jouait les égoïstes : une folle.

En 1919, l'état de santé de Camille s'est amélioré, elle pourrait sortir. Pas question ! Non, non, non ! Sa mère refuse violemment dans les courriers adressés au directeur de Montdevergues. Elle hait sa fille au plus haut point.

C'est ainsi qu'après trente ans d'incarcération Camille Claudel s'éteint le 19 octobre 1943 dans l'indifférence générale. Sans doute meurt-elle de faim, comme 800 autres pensionnaires sur les 2 000 que contient l'asile.

Article complet, Le Point http://www.lepoint.fr/c-est-arrive-aujourd-hui/10-mars-1913-camille-claudel-est-jetee-a-l-asile-a-la-demande-de-sa-mere-et-de-son-frere-paul-10-03-2012-1439785_494.php

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Membre, Posté(e)
evangelyne Membre 117 messages
Baby Forumeur‚
Posté(e)

Bien que biensur je connais l'histoire de cette femme mais meme de le lire une nouvelle fois c'est toujours aussi prenant et triste .

Les problemes au depart d'une mere et sa fille qui ne trouvera jamais d'aide meme a des moments les plus difficiles de sa vie.

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Membre, 118ans Posté(e)
nerelucia Membre 12 886 messages
Baby Forumeur‚ 118ans‚
Posté(e)

et encore un destin de femme sous l'emprise d'un homme, son amant, son frère.

Sans compter le poids du catholicisme prude chez son frère.

Restent ses statuettes, bien réelles et au Musée du Louvre.

Le film avec Isabelles Adjani, j'ai été le voir deux fois, en suivant, une chose unique dans ma vie.

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Modérateur, ©, 108ans Posté(e)
January Modérateur 62 250 messages
108ans‚ ©,
Posté(e)

Il en sort un nouveau, avec Juliette Binoche :)

(sur l'internement de Camille principalement)

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