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4 août 1789. Le vicomte de Noailles : le héros trop méconnu de la Révolution française. Honte !


Invité David Web

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4 août 1789. Le vicomte de Noailles : le héros trop méconnu de la Révolution française. Honte !

C'est à l'initiative de ce noble désargenté, soutenu par le duc d'Aiguillon, que l'Assemblée constituante abolit les privilèges.

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Ô monde injuste et cruel ! De la Révolution française, la mémoire populaire ne retient que Mirabeau, Robespierre, Danton, Desmoulins, Fouché, ou encore Marat. Mais qui pense au vicomte de Noailles ? Personne, ou alors les fayots qui se sont jetés sur Wikipedia... Or, cet aristocrate jusqu'à la moelle des os joue un rôle fondamental. Sans lui, les nobles et les curés tiendraient toujours le haut du pavé ! Beau-frère de La Fayette et héros de la guerre de l'Indépendance américaine, libéral dans l'âme, c'est en effet lui qui, le 4 août 1789, sonne la charge de l'abolition des privilèges. D'un pas ferme, il monte à la tribune de l'Assemblée nationale constituante pour s'écrier, avec les trémolos de Mélenchon en moins : "Vous voulez arrêter l'effervescence ? Il faut satisfaire les paroisses rurales qui désirent moins une Constitution que l'abolition des aides et le rachat des droits féodaux avec la suppression sans indemnité des servitudes personnelles et l'égalité de tous devant l'impôt." Il est gonflé, l'aristo : en préconisant la suppression des privilèges, il sape pas moins de mille ans de royauté.

C'est qu'il y a urgence dans la maison. Un mois et demi après la prise de la Bastille, la France est au bord du gouffre. Au nord, au sud, à l'ouest, à l'est, les paysans sont saisis d'une peur hystérique. Ils craignent un retour de manivelle, que les seigneurs leur envoient brigands ou soldats pour leur réclamer les anciens impôts qu'ils ne paient déjà plus. Et quand le paysan a peur, il prend les armes pour attaquer les châteaux et les brûler. Le tocsin répand la terreur dans les campagnes. Bientôt, le pays risque d'être à feu et à sang. La Constituante doit réagir. Immédiatement. Faut-il employer la force pour ramener le calme ? Ou faut-il sur-le-champ abolir ces centaines de servitudes et autres impôts injustes sans attendre la rédaction de la nouvelle Constitution ? Telle est la question. Mélenchon a bien sa petite idée, mais tout le monde s'en fout.

Assemblée électrisée

Le 3 août, l'Assemblée nationale constituante se réunit donc à Versailles pour faire son choix entre les deux options. La discussion générale tourne à la confusion. Les orateurs se succèdent sans qu'une majorité se dégage. Les bourgeois et les députés de la noblesse penchent plutôt pour l'usage de la force, tandis que les représentants du tiers état y répugnent. Quant aux curés, ils se taisent courageusement. Heureusement, il y a le "club des Bretons" (le futur club des Jacobins), rassemblant une centaine de députés, majoritairement de Bretagne, qui décide de prendre les choses en main. Il compte dans ses rangs de nombreux aristos libéraux qui comprennent qu'il vaut mieux lâcher sur plusieurs points que d'assister à l'explosion de la cocotte-minute. Le club se réunit en marge de l'assemblée générale, et se met d'accord pour demander l'abandon des privilèges. Parmi les plus âpres à défendre ce point de vue, il y a le vicomte de Noailles et, surtout, le duc d'Aiguillon, qui est l'homme le plus riche de France après Louis XVI. Ces derniers décident donc d'intervenir vigoureusement à la tribune de la Constituante dès le lendemain.

Le 4 août 1789, rebelote, le millier de députés se retrouvent de nouveau à Versailles, vers 20 heures, pour écouter la proposition d'un comité ad hoc désigné la veille. C'est un avocat du nom de Guy Target, émule de Montesquieu, qui s'exprime. Il préconise la manière forte. L'imbécile. C'est alors que le vicomte de Noailles s'empare de la parole pour appeler à la fin de tous les privilèges. Son envolée lyrique électrise l'assemblée. On l'applaudit à tout rompre, on s'embrasse. Compte rendu du Courrier de Versailles à Paris du lendemain : "Les paroles de Noailles excitèrent un tel enthousiasme dans les galeries qu'une des personnes qui étaient présentes lui adressa sur-le-champ un quatrain qu'il répéta assez haut pour que tous ceux qui l'environnaient l'entendissent. Je ne me rappelle que les deux derniers vers : Un monstre nous restait : la féodalité/Abattu par Noailles, il hurle, tombe, expire."

Curée

C'est au tour du duc d'Aiguillon de s'exprimer. Il commence par remercier son prédécesseur : "Messieurs, je comptais faire ce qu'a fait Monsieur le Vicomte de Noailles ; il a prévenu ma démarche, j'ose croire qu'il n'a pas prévenu mes sentiments ni mon coeur. Je suis bien loin d'en être jaloux : je le remercie au contraire d'avoir été mon fidèle interprète." Puis il passe à son discours : "Le désordre n'est pas le fait de brigands mais du peuple, insurgé contre l'inégalité, l'arbitraire, l'iniquité des droits. Coupable mais explicable est l'attaque des châteaux. Pour l'arrêter, des sacrifices sont nécessaires et les droits féodaux, propriétés qui blessent l'humanité, doivent être rachetables, mais être jusque-là perçus."

C'est du délire dans la salle, les députés issus du tiers état applaudissent ardemment. Imaginons Bernard Arnault, l'homme le plus riche de France, militer pour la fermeture de la Bourse et l'interdiction des licenciements ! Après les deux hommes, les députés se disputent pour abolir chaque privilège. C'est la curée. Toutes les chaînes féodales volent en éclats. Au fil de la soirée, on décide l'abolition de la qualité de serf, des juridictions seigneuriales, de tous privilèges et immunités pécuniaires, du droit exclusif de la chasse, des colombiers, des garennes. On décide également l'égalité des impôts, l'abandon de la dîme, l'accès libre aux emplois civils et militaires, la justice gratuite, la suppression de la vénalité des offices, la destruction des pensions obtenues sans titre...

Le duc de Liancourt court tenir Louis XVI au courant des débats. Celui-ci commente : "J'approuve tout ce que l'Assemblée nationale va faire, je m'en rapporte à sa sagesse et ses lumières, et surtout à ses vertus." Quelques jours plus tard, il change d'avis, refusant de ratifier les décrets de la Constituante mettant à bas tous les droits féodaux. Il ne s'y résoudra que violenté et forcé.

Toute une révolution

Le vicomte de Noailles ne s'endort pas sur ses lauriers. C'est un militaire, ne l'oublions pas. Ce qui l'effraie, c'est la désintégration de la discipline dans l'armée et, surtout, la multiplication des désertions. Le 13 août, devant la Constituante, il réclame l'établissement d'un comité pour réorganiser l'armée. Un mois plus tard, ce comité qu'il préside préconise la suppression du tirage au sort, la création d'une milice nationale répartie en 2 000 bataillons de mille hommes, l'ouverture à l'avancement sans condition de naissance. Toute une révolution. Quelques mois plus tard, il réclame l'abandon des titres de noblesse, l'égalité civile des Juifs, la diminution du traitement des ministres (déjà !)

Lire la fin.

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Membre, Jedi pas oui, jedi pas no, 32ans Posté(e)
Jedino Membre 48 048 messages
32ans‚ Jedi pas oui, jedi pas no,
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Ca, ça m'intéresse, vu ce que je lis en ce moment.

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Membre, 41ans Posté(e)
cheuwing Membre 17 067 messages
Maitre des forums‚ 41ans‚
Posté(e)

juste un détail concernant l'abolition du servage et des juridictions seigneuriales : celles ci avaient disparues de faites depuis plus d'un siècle,de même que la notion de féodalité n'avait plus aucun intérêt au roi de France

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