Aller au contenu

Génèse de la France


Anksunamun

Messages recommandés

Membre, 47ans Posté(e)
Anksunamun Membre 1 572 messages
Baby Forumeur‚ 47ans‚
Posté(e)

Comme pour beaucoup sur cette partie de ce forum, je vais de mon "exposé" en ligne sur un sujet qui me passionne: à savoir la naissance de la France en temps qu'Etat.

-------------------------------------------------------------------------------

Pour répondre à une telle question, faudrait-il encore commencer par définir ce que nous entendons par France !

*Un territoire ?

*Une culture ?

*Des hommes ayant conscience d'appartenir à une même communauté ?

*Une communauté liée par une langue commune ?

Faut-il confondre, par la suite, un ensemble de "barbare", un domaine royal et royaume de France

Certains historiens affirment que le fondateur de la France, c'est Jules César ?

Cela fait un peu drôle que le père fondateur soit un père fouettard qui a conquis avec une violence impitoyable la Gaule. C'est seulement avec César que le Rhin est devenu une frontière. Avant il ne l'était pas. La France est avant tout un pays romain.

Le royaume de Clovis ?

Ses frontières au nord et à l'est dépassent largement ce qui sera plus tard la France, et elles sont bien moins étendues au sud !

Et après Clovis, que se passe-t-il ? Que devient son royaume ? Quelle continuité entre lui et la Francie occidentale du petit fils de Charlemagne ?

En réalité il y a beaucoup plus de facteurs qui font une nation que la culture commune (qui est une construction très lente, s'étalant sur des siècles), le sentiment d'appartenance (pour lequel il faut des facteurs positifs -genre le roi- et négatifs -la différenciation entre "nous" et "eux", une situation d'adversité comme la menace ou l'invasion...) ou un espace juridique.

Le fait est que la France n'a pas de date de naissance, simplement parce qu'elle en a trop. Est-ce:

- la constitution de la Ligue unissant des tribus germaniques, celtes (y'en avait) et mixtes sous l'appellation de "Francs" (mot issu du Haut germanique "Frekkr", voulant dire "hardi")?

- L'ascension d'un chef unique des Francs Saliens (là on est dans les mythes de Pharamon ou Clodion)?

- La considération de l'ensemble des territoires indépendants qui la composent sous l'appellation de "Gaule" par les Romains?

- Le foedus accordé aux Francs Saliens par Julien l'Apostat?

- Le baptême de Clovis?

- la reconnaissance de Robert le Fort, au sein de l'ensemble carolingien, comme "Duc des Francs"?

- le partage de Verdun?

- L'élection d'Hugues Capet (pour reprendre un titre déjà existant)?

- Le changement de dénomination de "Rex Francorum" à "Rex Franciae" par Philippe Auguste?

- La Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen?

-------------------------------------------------------------------------------

Voilà pour commencer. Je repasserais plus tard pour, je l'espère, répondre au messages postés et avoir un débat interressant sur un sujet plus que passionnant

Lien à poster
Partager sur d’autres sites

Annonces
Maintenant
Membre, Posté(e)
Vaudémont Membre 387 messages
Baby Forumeur‚
Posté(e)
Le royaume de Clovis ?

Ses frontières au nord et à l'est dépassent largement ce qui sera plus tard la France, et elles sont bien moins étendues au sud !

En effet, le royaume de Clovis ne correspondait que très imparfaitement à ce que nous appelons France. Le centre de gravité du royaume correspondait plutôt à la Belgique et le royaume des Francs s'étendait loin en Germanie.

Et après Clovis, que se passe-t-il ? Que devient son royaume ? Quelle continuité entre lui et la Francie occidentale du petit fils de Charlemagne ?

Aucune continuité, si ce n'est l'origine "ethnique" de ses rois, qui sont tous des Francs.

Francia pouvait d'ailleurs désigner son propre royaume pour chacun des 3 petits-fils de Charlemagne.

Lien à poster
Partager sur d’autres sites

Membre, Ad majorem Peterwaradin gloriam, 46ans Posté(e)
peterwaradin Membre 2 643 messages
46ans‚ Ad majorem Peterwaradin gloriam,
Posté(e)

Son vrai nom est Chlodowech.Clovis est une invention tardive et impropre des historiens du XIXeme siècle.

Dans l'ancien français,"Chlodowech" avait évolué en "Louis" et non en "Clovis".

Lien à poster
Partager sur d’autres sites

Membre, Posté(e)
Vaudémont Membre 387 messages
Baby Forumeur‚
Posté(e)

Tout-à-fait, mon cher.

Chlodowech --> Ludovicus --> Ludwig --> Louis --> Clovis.

Le U et le V étant la même chose dans l'alphabet jusqu'à une date récente, vous n'avez qu'à enlever le C de Clovis pour obtenir Louis.

Lien à poster
Partager sur d’autres sites

Membre, Ad majorem Peterwaradin gloriam, 46ans Posté(e)
peterwaradin Membre 2 643 messages
46ans‚ Ad majorem Peterwaradin gloriam,
Posté(e)

merci mon cher.ça fait un bail qu'on a pas causé ensemble.faudrait rattraper ça! :blush:

Le fait est que la date de sa conversion est aussi controversée que l'origine de son nom.Ce qui est admis,c'est son opportunisme dans sa démarche.

Lien à poster
Partager sur d’autres sites

Membre, 47ans Posté(e)
Anksunamun Membre 1 572 messages
Baby Forumeur‚ 47ans‚
Posté(e)

Tous les événements que je citais au premier post ont une légitimité à prétendre être un acte de naissance. On sait qu'en France, c'est l'Etat qui a créé la nation, dans une lente et répétitive construction faite à coups de lois et à coups d'épée. Les Romains, par manipulation politique, ont inventé un espace global entre Pyénées et Rhin qu'ils ont appelé Gaule (ou plutôt Gaules); Caesar avait politiquement besoin de dire qu'il y avait un gros ennemi (même s'il était déjà bien plus petit que Rome) plutôt que de dire qu'il s'agissait de centaines de tribus toutes indépendantes. Cette définition est évidemment arbitraire, mais elle est devenue un fait par la guerre: la Gaule était devenue un espace par un sort partagé et des réactions assez similaires (même les Héduens ont combattu, à un moment).

L'entité Gallo-Romaine qui est sortie de ce processus a connu une certaine mesure d'unification via la romanisation (commerce, économie, culture, langue...), renforcée par quelques épisodes marquants (la révolte de "l'empire des Gaules", Julien l'apostat....).

La religion chrétienne a ensuite joué son rôle, lentement puis rapidement à partir de l'arrivée des Francs et de leur pacte avec l'Eglise. Les Francs ne sont pas arrivés brutalement; après quelques siècles de luttes frontalières, ils se sont établis comme fédérés dans la province de Belgique Seconde, aussi appelée Toxandrie (couvrant des morceaux des Ardennes, de la Champagne et de la rive ouest du Rhin). Les Francs adoptent une approche différente des autres peuples des grandes migrations: ils s'assimilent rapidement et s'acculturent en grande partie. Les élites gallo-romaines adoptent de même nombre de coutumes des nouveaux arrivants en se fondant avec les élites franques (notamment les noms).

C'est de cette matrice gallo-romaine et de l'arrivée des Francs que sont nées les grandes problématiques qui articulent l'histoire de France: recherche constante de l'affirmation d'un pouvoir central contre les grandes féodalités physiques (grandes provinces, potentats locaux) et immatérielles (Eglise principalement, mais aussi certaines branches de métiers imposant leurs conditions dans certains endroits sur certains points: corporation des Nautes, juridictions coutumières....), centralisation, établissement d'une continuité du pouvoir central dans son autorité, mise en commun des ressources (contre les résistances régionales)....

Si l'on part du point de vue du droit, le partage de Verdun n'est pas le seul: le titre de "roi des Francs" naît avant même Clovis. Clovis tenait plus à ses titres romains ("homme excellent", "Dux Bellorum", "magister militiae"....) qu'à un titre qui n'avait de valeur que tribale. C'est le baptême de 496 et l'onction de St Rémi (et par là l'alliance avec l'Eglise) qui lui donne la primauté et une force de légitimité sans précédent. Dès lors, le fondement juridique créant l'entité géopolitique et juridique qui est déjà la France sur beaucoup d'aspects. Verdun ne fait que conserver le titre de Roi des Francs au maître de la zone appelée désormais "Francia occidentalis" (on peut aussi le traduire par "partie occidentale du domaine des Francs"). Si Verdun définit quelque chose, ce ne sont pas des frontières ou des prétentions frontalières. Là ou Verdun a une légitimité, c'est dans la séparation des entités.

La façon la plus conciliante de le voir est que France et Allemagne sont nées d'une entité initiale unique: le royaume des Francs. mais les tensions et logiques qui articulent la France sont nées avec Clovis. celles qui articulent l'Allemagne sont nées après Verdun, avec l'établissement des Othoniens et la création du St Empire Romain Germanique au Xème siècle. Et c'est en France qu'à tout instant est resté le titre de "roi des Francs". L'aventure carolingienne (et encore, à partir de Charlemagne; Pépin de Herstal, Charles Martel et Pépin le Bref s'inscrivent dans la continuité royale française) est à cet égard, dans l'histoire de France, une exception qui s'insrit plus dans la persistance du mythe romain dans certaines grandes monarchies d'Europe et l'Eglise.

Ce que nous entendons, nous aujourd'hui, par "France", n'est qu'une interprétation temporaire appelée à changer encore et toujours; c'est pourquoi je me focalise plus sur l'entité juridique, géopolitique, politique et, dans une certaine mesure, culturelle, sociale et économique. En bref l'Etat proprement dit. Il y a toujours plusieurs possibilités pour cette acception, mais aucune ne peut remonter avant Clovis (sauf peut-être dans l'imaginaire royal purement mérovingien et le mythe des origines troyennes).

Les frontières jouent un rôle plus faible, mais il est à noter que l'espace théorique revendiqué tourne toujours autour de la géographie des Gaules. Je signale qu'au Nord, les Flandres sont restées françaises jusqu'au XVème siècle. Mais globalement, la correpsondance entre l'Etat et les frontières n'existe pas avant le XIXème siècle: le principe monarchique n'a rien à voir avec cela et s'en torche même pas mal. La monarchie est un Etat sacral; pas culturel, ni géographique.

Considérer Villers-Coterêt est une erreur car Villers-Coterêt n'est qu'un outil, un moyen, une commodité au sein de la politique d'un Etat sacral où la langue compte peu au regard du principe royal de droit divin. Il faudrait quand même penser à mesurer l'impact sur une société uniformément chrétienne (et chrétienne d'une toute autre façon qu'au XXIème siècle) de l'onction divine; même les Protestants ne l'ont jamais remise en cause en France. L'onction des rois de France à Reims était la plus sacrée de la chrétienté, la plus miraculeuse. Pour parler concret, c'est ce qui a fait des Capétiens, seulement élus une entité un cran au-dessus des autres. C'est ce qui a fait qu'après son sacre, Charles VII, vu jusqu'ici comme bâtard, comme le petit "roi de Bourges", pas plus riche ou plus puissant qu'avant la campagne de la Loire, était reconnu par tous comme roi de France devant le petit Henry VI. Les Anglais savaient qu'ils l'avaient dans l'os à partir de ce moment, même s'ils pouvaient encore gagner militairement. Le sacre, c'était tout; c'était le principe de l'Etat; c'était le suffrage universel et la constitution à la fois.

Le sentiment d'appartenance est une construction lente: et le sentiment d'appartenance de qui? De tous? La population compte peu à partir des guerres de succession mérovingiennes. Des hommes libres? De l'aristocratie? Il faudrait faire une histoire de "la franchise", c'est à dire de la façon dont les sociétés répartissent les "voix" qui comptent: la démocratie, fait récent, done cette franchise au plus grand nombre (c'est le suffrage). Les Francs la donnaient aux hommes libres jusqu'à la fin des Carolingiens et aux premiers Capétiens, sans que ce soit non plus un droit de vote contraignant. La société s'aristocratise et se ferme nettement sous les carolingiens, et carrément à partir des XIème-XIIème siècles. La franchise n'appartien plus qu'à l'élite nobilaire, et dans une certaine mesure, à certaines entités (Eglise, etats provinciaux, juridictions coutumières, corps de métiers). Le "sentiment d'appartenance" a plusieurs dates de naissance détachées de l'Etat parce que c'est une logique en grande partie territoriale, culturelle, économique et sociale: il y en a une clairement gallo-romaine, peut-être une gauloise pré-romaine (réaction à l'invasion), une sous les mérovingiens, une avec Charles Martel, une, plus puissante avec Charlemagne, une avec Philippe Auguste, plusieurs avec les Croisades et une très puissante avec la Guerre de Cent Ans. On la retrouve avec la fin des Guerres de Religions qui s'achève sous Louis XIV. La Révolution est de loin la plus marquante, la plus définitive.

Enfin, il y a une dimension qu'on on oublie trop souvent alors qu'on parle de patriotisme, ou de sentiment d'appartenance, ou encore de conscience qu'il y a un pays, une entité au sein de laquelle on se trouve. C'est la mystique, la mythologie, la "nation affective". Tolkien aimait à dire que sans cette part mythique, les Etats n'étaient que des coquilles vides. Je suis plus que d'accord. Le fait est que Vercingétorix, César, le baptême de Clovis, Charles Martel, Charlemagne, St Louis (il a fallu du temps aux Capétiens pour avoir leur mythe), l'Oriflamme, Jeanne d'Arc, le Roi-Soleil, la Révolution, la Déclaration des Droits, le couicage de Louis XVI, les soldats de l'An II et Valmy, Napoléon, la Marne, Verdun, le 18 juin..... Tout cela fait partie d'une dimension mythique incontournable. Il y en a d'autres et certains sont de la pure mythologie ou sont une déformation sans nom des faits; mais c'est là que réside la puissance d'un mythe. C'est Marc Bloch qui a dit que celui qui ne sentait pas sa nuque se hérisser à l'évocation du baptême de Clovis ET de la fête de la Fédération ne pouvait vraiment se dire français (moi, rien que de l'écrire, ça me le fait encore).

Lien à poster
Partager sur d’autres sites

Membre, Posté(e)
PHP Membre 6 messages
Baby Forumeur‚
Posté(e)

je suis assez d'accord avec Anksunamun sauf sur un point : elle minore le facteur linguistique. sauf en bretagne occidentale, au pays basque et en alsace, la langue latine dans sa variante gallo-romaine était commune à tous (même avec la forte nuance d'oc et d'oîl).

je pense que c'est la langue germanique qui a rendu impossible la reconstruction de l'Empire après verdun : peuples de l'est et de l'ouest avaient trop peu en commun ...

Quant au tite de rex francorum il a été employé jusqu'à la révolution (1789. 1791?) certes traduit par roi de France - ce qu'il ne signifiat point ... mais il témoigne d'un continuité juridique et idéologique de Clovis aux Bourbons ... ce n'est pas peu !

Lien à poster
Partager sur d’autres sites

Membre, 47ans Posté(e)
Anksunamun Membre 1 572 messages
Baby Forumeur‚ 47ans‚
Posté(e)

@PhP

Je mets la langue latine et ses évolutions sous le terme "culture". Mais faut quand même garder à l'esprit qu'une grande majorité de la population vivait dans des villages et, au cours de leur vie, voyaient rarement plus que le village voisin quand celui-ci n'était pas trop loin.

De plus, les variantes entre les évolutions de la langue latine sont trop grandes pour qu'on puisse parler d'un patrimoine commun. Certes, certaines variantes pouvaient, à l'usage, se comprendre quand elles étaient assez proches. Mais entre le Gallo et le Picard, entre le Provençal et le Charentais, le Béarnais et le Savoyard, par exemple, il y avait peu de chances que cela ressemble à un patrimoine commun. Un Catalan avait plus de chances de comprendre l'Occitan qu'un Gascon n'en aurait jamais. Villers-Coterêt et l'alphabêtisation en français par la République n'auraient pas été de tels chocs culturels sans cela (et pas qu'en Bretagne, en Flandres, en Alsace, en Catalogne ou au Pays Basque): Frédéric Mistral aurait-il eu un tel succès sans cela?

Lien à poster
Partager sur d’autres sites

Membre, Posté(e)
PHP Membre 6 messages
Baby Forumeur‚
Posté(e)
C'est Marc Bloch qui a dit que celui qui ne sentait pas sa nuque se hérisser à l'évocation du baptême de Clovis ET de la fête de la Fédération ne pouvait vraiment se dire français (moi, rien que de l'écrire, ça me le fait encore).

C'est grave si ça me laisse froid? :bo::coeur: :blush:

Lien à poster
Partager sur d’autres sites

Membre, 47ans Posté(e)
Anksunamun Membre 1 572 messages
Baby Forumeur‚ 47ans‚
Posté(e)

Grave? Non. Mais c'est triste. :)

Allez, fais bisou et rends ton passeport, méchant faux Gaulois! :bo: :blush: :blush: :coeur:

Lien à poster
Partager sur d’autres sites

Membre, Posté(e)
PHP Membre 6 messages
Baby Forumeur‚
Posté(e)

Je pense que la France c'est enrichit a fur a mesure de l'histoire, sa a commencer avec les Gaulois, la civilisation Romaine a civilise ses Gaulois, les barbares Francs, et puis la France c'est forger son identité et son histoire avec ses peuples...

peu importe la langue ou la religion, le plus important ces qu'on retrouvera les memes genes que sa soit il y a 9000 ans ou aujourd'hui...

Un Francais se sentira toujours un peu Gaulois, il trouve un peu de fierte et se forge une identite et une histoire...

Lien à poster
Partager sur d’autres sites

Membre, 47ans Posté(e)
Anksunamun Membre 1 572 messages
Baby Forumeur‚ 47ans‚
Posté(e)

On n'est pas dans la gentille glorification du melting pot, là. On va pas entrer dans ce débat: les migrations sont autant une chance qu'un risque pour le pays. Rien de nouveau. A ceci près que toute migration dans l'histoire de France a une condition de réussite, et une seule en fait depuis les Francs: l'acculturation. Ca ne veut pas dire renier d'où l'on vient, mais cela suppose un immense effort de la part des arrivants dont le devoir est de s'approprier la culture, les us et les coutumes de la terre d'accueil. Hors, on assiste à une déculturation au profit des "tribus", le plus souvent autour des identités d'origine. Et la culture française, tronc commun nécessaire, n'est plus apprise pour imposer ce qui unit avant ce qui divise. Le devoir de l'Etat, et son action depuis l'origine, a toujours été d'unifier, de combattre les conséquences de la trop grande diversité de l'espace français. C'est toute l'histoire du centralisme (puis du jacobinisme), des débuts de la monarchie à nos jours. Chaque fois que les identités/communautés ont été trop fortes (je ne nie pas leur légitimité à exister mais le moment à partir duquel elles se mettent à penser en termes de pouvoir et à placer leur droit/bien particulier au-dessus du droit/bien commun), la division au mieux, la guerre civile au pire, en a résulté. Je ne nie pas les abus du centralisme non plus: il s'agit d'un équilibre très délicat et impossible à trouver durablement. Chaque génération doit se démerder avec un équilibre instable. Mais le plus souvent, les mouvements de centralisme ont toujours été en réaction à des abus inverses, qu'il s'agisse de la féodalité en conflit avec les notions de suzerain/souverain (avec comme réaction les grandes heures des Capétiens: Philippe Auguste, Philippe Le Bel), de la féodalité comme désir d'indépendance ou concurrence (et là on a les Valois: Charles V, Charles VII, Louis XI, François Ier; mais aussi des mouvements), des religions (et arrivent Henri III, Henri IV et Louis XIII; mais avant et après cela, on trouve la lutte éternelle entre temporel et spirituel, ultramontains et Gallicans....), de retours de la féodalité (avec son chant du Cygne, la Fronde, et Louis XIV en face), des oppositions juridiques ou de professions (la Fronde Parlementaire, Etienne Marcel).... On y trouve aussi les indépendantismes locaux, les querelles linguistiques, les esprits de clocher.... Toutes ces identités ont une légitimité, mais comme toute logique, elles cherchent à s'affirmer et finissent par dépasser la limite; le plus souvent parce que des hommes les instrumentalisent par ambition, opportunisme, prétention....

Je crois en fait qu'on ne trouvera pas de meilleure définition de la France en tant que nation depuis l'origine: la France est une volonté, c'est à dire une idée exprimée en termes d'action (et non un simple désir). Cette volonté est née avec Clovis, même si elle a été amorcée avant par la résistance à l'invasion romaine (le "big bang" qui a contraint les tribus gauloises à commencer à se penser comme un ensemble) et influencée par la Gaule romaine. Les grandes migrations, d'où la domination des Francs (par assimilation et non séparation entre une caste de dominants et un peuple) a émergé avec adjonction de l'Eglise comme renfort du principe unifiant, ont créé l'Etat et un premier espace où les grandes logiques de l'Histoire de France sont nées. C'est de l'Etat qu'a procédé la France, et l'Etat est né en France avec Clovis. Que la définition du royaume des Francs soit débattue comme origine de la France et de l'Allemagne, c'est plus que légitime et pertinent. Mais entre les Etats mérovingiens, carolingiens et capétiens, il y a une continuité (hors l'épisode impérial de Charlemagne et Louis le Pieux) complète et une permanence dans l'aspiration. Clovis, Clothaire II, Dagobert Ier, Charles Martel, Pépin de Herstal ou Pépin le Bref n'ont pas fait autre chose que ce que les Capétiens ont fait: unifier le royaume.

j'ajoute que cette fiction et cette volonté partagées sont aussi le résultat de la simple nécessité: on est plus forts ensemble qu'isolés. C'est sur la conjonction de la nécessité, de la relative proximité culturelle et d'une dimension mystique que la volonté peut s'exercer. L'Union Européenne n'a pour l'instant que l'argument de la nécessité.

De même, sur le sujet de l'immigration, ce sont là encore la fiction partagée et la volonté qui jouent: un immigrant a le devoir de s'acculturer, de faire sien les usages, les codes et la culture français. Parce qu'en devenant français, il acquiert aussi des ancêtres gaulois. C'est la part de fiction nationale à laquelle il adhère afin d'aider à continuer d'écrire le roman qu'est la France. S'il refuse ces ancêtres là, le ressort se casse et le clash arrivera tôt ou tard.

Personne ici n'est vraissemblablement capable de savoir où et qui étaient ses ancêtres au Xème siècle; donc la question de la lignée génétique est d'une connerie monumentale. La question de la race aussi: quand on pense que Pouchkine, blanc de blanc, avait un grand père noir, le fameux général russe pupille de Pierre Ier appelé Gannibal, on voit que ces questions sont triviales au possible. Donc la question des ancêtres, de la région, des racines.... est avant tout morale, intellectuelle et affective. Je citerai pour cela encore un écrivain nationaliste, Barrès, sur "la terre et les morts" qui indiquent à chacun une continuité et une façon d'agir en n'oubliant pas son passé.

Je suis absolument incapable de savoir qui étaient mes ancêtres français avant le XVIIIème siècle et je m'en contrefous dans les grandes largeurs. J'ai du Poitevin, du Vendéen, du Charentais (ou Aunis et Saintonge), du Parisien, un peu d'Italien, un doigt d'Allemand, un poil d'Irlandais, pas mal de Suédois ,et une bonne portion de Norvégien dans mon ascendance. Je suis Français par naissance et par choix; mes ancêtres s'appellent Bayard, Vercingétorix, Godefroy de Bouillon, Napoléon, Philippe Auguste, Clovis, d'Artagnan, César, Du Guesclin, La Hire, Jeanne d'Arc, Philippe Le Bel, Buridan, Richelieu, Abélard, Robert le Fort, Guillaume le Conquérant, Charles Martel, Charles de Gaulle, Baudoin de Jérusalem, Turenne, Gaston Phébus, Guillaume d'Acquitaine, René d'Anjou, Clemenceau, Nominoë, Voltaire, Richelieu, Henri IV, Pierre Mendès-France, Blanche de Castille et le soldat inconnu (et quelques autres).

Je peux aussi y mettre Gilles de Rais, Charles le Mauvais, Landru, Marat, les rois maudits ou fainéants, Fouquet, Ravaillac, Robespierre, St Just, Marie de Médicis, Pétain.... Après tout, tout n'est pas rose.

Ou encore le capitaine Fracasse, Edmond Dantès, Cyrano, Gargantua, Renard, Lancelot, la Princesse de Clèves, Candide, Gavroche, Jacquou le croquant, Mélusine, Merlin, Isis (très vénérée à Paris bien avant le Christ), les neuf preux, Arsène Lupin, Toutatis ou le chevalier d'Amadis.

Ca a la classe non comme parenté?

Lien à poster
Partager sur d’autres sites

  • 3 semaines après...
Membre, 40ans Posté(e)
makno Membre 12 messages
Baby Forumeur‚ 40ans‚
Posté(e)

(moi j'ai un cousin, il s'appel Gilou :blush: )

Dans la société actuelle, ces références que vous citez tendent à se perdre au profit de nvlles réference plus mondiale,on ne peux plus demander aux nouveaux arrivants l'acculturation (telle que vous la définissé) dans la mesure où ils n'ont plus de culture sur laquelle se baser (qui connait 1/5eme des personnes que vous avez cités?)

Personellement je pense qu'on doit à l'ordonnance de Villers-Cotterêts la génese de la France, dans la mesure où le francais devint un outil administratif déstiné à fortifier la centralisation, mais aussi à unifier les francais,les rendres solidaires. En effet ils possedaient désormais un patrimoine commun qu'il fallait défendre,et surout ils avaient la possibilité de se comprendre

Lien à poster
Partager sur d’autres sites

  • 3 semaines après...
Membre, 47ans Posté(e)
Anksunamun Membre 1 572 messages
Baby Forumeur‚ 47ans‚
Posté(e)

De mon avis personnel c'est surtout Clovis 1° qui lance la chose et Charlemagne qui confirme.

Lien à poster
Partager sur d’autres sites

Annonces
Maintenant

Archivé

Ce sujet est désormais archivé et ne peut plus recevoir de nouvelles réponses.

×