Une histoire. Une belle histoire. Une dont je me souviendrai encore pour longtemps. Mais que faire? Comment doit-elle donc être pour me marquer à ce point? Doit-elle être d'amour ou d'amitié? De magnificence et de brièveté? Ou peut-être de haine et de méchanceté? Il m'est si difficile de le savoir. Peut-être que son insignifiance sera telle qu'elle ne m'aura pas même interpellé au moment où je l'ai vécu? Qui sait si je ne fais pas erreur en cherchant à trouver de quoi m'occuper plus tard.
Arrêtons néanmoins ces futiles lamentations. Je n'en ai pas l'âge. Y en a-t-il vraiment un pour autant? Je souhaitais donc raconter une histoire. Je ne saurais dire si elle est vraie, autant pour les autres que pour moi. En vérité, je ne sais pas même encore ce qu'elle va pouvoir bien conter, si tout ceci aura le moindre sens, le moindre intérêt. Seulement, nul ne le saura si je ne l'écris pas, si je n'essaie pas de le faire comprendre. Ce qui parait tout à fait logique. En tout cas, je le crois.
Je pourrais donc introduire en décrivant au mieux cet être aussi singulier que banal, cet être qui ne sortirait aucunement d'un paysage ou d'une foule tant il est commun. Et pourtant, il est notre héros, ou du moins, le centre de notre attention, pour vous à cette lecture, et pour moi dans l'un des coins de mon encéphale. D'ailleurs, je ne vous cacherai pas qu'il apprécie la promenade et la réflexion, la poésie de la nature et des multiples visages. En effet, c'est un être capable de penser, et il lui arrive d'en avoir des étranges, comme celle de croire que, dans chaque ride, chaque parcelle de peau, chaque élément qui forme l'apparence d'une personne, il y a un récit à la lecture si complexe que rares sont ceux qui osent tenter de le décrypter. Il croit en la magie des rencontres, en la beauté de toutes choses, et surtout, en la bonté et la justesse de ce tout auquel il appartient.
Alors, il se promène, notre présent ami, là où il veut, là où il peut. Et il regarde, réfléchit et pense, il insuffle les ondes bienfaisantes de tout ce qu'il peut apercevoir. Il apprécie simplement la vie et ses cadeaux. C'est un bon vivant.
N'empêche que, malgré cela, il est dans la nécessité de faire son travail. Un travail fatiguant, de longue haleine, qui lui prend la majeure partie de son temps. Ce n'est pas qu'il n'aime pas gagner sa vie, et aider du même fait celle des autres, mais c'est un rêveur. C'est sa nature, son tempérament, et à cela, on ne peut échapper. Vous comprendrez donc sans difficultés pourquoi il se montre tous les jours si impatient à l'idée d'être enfin en soirée. C'est qu'il se sent exister uniquement lors de ces trop brefs moments. C'est un nocturne, comme le sont souvent ces gens-là.
Je ne vous le cacherai plus : ce bonhomme là, j'en ai des milliards. Il est une partie de moi, il est ce que je suis. Sans lui, je ne suis rien. Je ne peux bouger, manger, me déplacer, aimer, ou même rêver. Ce bonhomme là, il est ce auquel je tiens, il est ce que je sais, ce que je fais. Il est moi. Et je ne vous cacherai pas non plus que, toutes les nuits, il s'assure que je puisse rêver au mieux, pour inspirer ma journée à venir, et pour conclure au mieux la beauté de celle qui c'est terminé au moment où je me suis abandonné à son pouvoir.