Aller au contenu

Dysprosium Blog

  • billet
    1
  • commentaires
    7
  • vues
    3 927

L'absolu relativisme, partie 1.


Ioan

1 648 vues

L'ABSOLU RELATIVISME, PARTIE 1

« Toute vérité n'est pas bonne à dire » a écrit Beaumarchais, repris ensuite dans le jargon quotidien. Dans cette fameuse phrase, Beaumarchais suppose-t-il l'existence de plusieurs vérités, ou doit-on comprendre cette phrase comme stipulant que toute affirmation vraie d'un point de vue absolutiste n'est pas bonne à faire connaître publiquement ? La sempiternelle question sur l'existence ou la non-existence des vérités relatives ne finit pas d'alimenter les débats. Il s'agit de deux conceptions en apparence très différentes de ce qu'est une vérité, mais pourtant pas autant incompatibles qu'on pourrait le penser. Ce sont deux théories avant tout mal comprises dont je ferai un résumé ici.

4-verites.gif

I - Quelques notions

Nous utiliserons ici le dictionnaire "Le Trésor Informatisé de la Langue Française" dit TLFi, et le dictionnaire de l'Académie Française 8eme et 9eme éditions.

a) La vérité

TLFi

LOG. Vérité (logique). Conformité de la pensée ou de son expression avec son objet. La définition traditionnelle de la vérité la tient pour copiée sur son objet. Elle serait l'adéquation de l'intellect à la chose (...). Cette définition n'est simple qu'en apparence; car toute la question est de savoir en quoi consiste l'objet (H. Dreyfus-Le Foyer, Traité de philos. gén., 1965, p. 151).

Académie

VÉRITÉ se dit encore de la Conformité de l'idée avec son objet, par opposition à Erreur. La vérité de la religion chrétienne. Les défenseurs de la vérité.

b) Le dogme

TLFi

Proposition théorique établie comme vérité indiscutable par l'autorité qui régit une certaine communauté. Un dogme moral, métaphysique; le dogme du fatalisme.

A.− RELIG. Point de doctrine contenu dans la révélation divine, proposé dans et par l'Église, soit par l'enseignement du magistère ordinaire et universel (dogme de foi), soit par le magistère extraordinaire (dogme de foi définie) et auquel les membres de l'Église sont tenus d'adhérer.

Académie

Point de doctrine, proposition ou principe établi ou regardé comme une vérité incontestable. Il se dit surtout en matière de Religion. Les dogmes de la religion. Des dogmes religieux. Par extension, Des dogmes politiques, littéraires, etc. Il se dit absolument, au singulier, des Dogmes d'une religion. Attaquer le dogme. Disputer sur le dogme. Fixer le dogme.

c) L'axiome

TLFi

2. LOG. et MATH. MOD., avec l'apparition des géom. non euclidiennes.

a) Énoncé, proposition posés à la base d'un système hypothético-déductif ou plus généralement élément d'une axiomatique

Académie

XVI e siècle, au sens 1. Emprunté, par l'intermédiaire du latin, du grec axiôma, « ce qui paraît juste, convenable », d'où « ce qui est requis pour servir de base à une démonstration, principe évident de soi-même ».

1. PHIL. Prémisse considérée comme évidente et reçue pour vraie sans démonstration. « Le tout est plus grand que la partie » est un axiome. À la différence du postulat, l'axiome est une proposition si évidente qu'il est impossible à quiconque en comprend le sens de la mettre en doute.

2. MATH. Proposition non démontrée prise comme base d'une théorie.

3. Par ext. Proposition admise sans discussion. Axiomes juridiques. Admettre, établir, énoncer un axiome. Gobineau professait l'inégalité des races comme un axiome. Par ext. Sentence. Il ne parle que par axiomes.

II - Principes relativistes

  • Il existe plusieurs vérités et plusieurs types de vérités.

Exemple de quatre types de vérités :

- La vérité scientifique : cette vérité scientifique est basée sur les sciences mathématiques, physiques, biologiques, et parfois même historiques. Il s'agit d'expliquer les vérités factuelles avec des théories pertinentes. Ex : la pomme tombe de l'arbre --> explication scientifique : la gravitation/la déformation de l'espace-temps. Ainsi une vérité scientifique fait appel à des notions, dans l'exemple précédent il s'agit de l'espace-temps. Dès lors, l'existence de l'espace-temps devient une vérité scientifique. Les mathématiques sont une science exacte qui fait appel à des notions abstraites, notions de vérité scientifique comme l'infini, ou le point géométrique : ce sont des vérités mathématiques qui ne sont pas factuelles mais ont un rapport à la réalité puisqu'elles permettent de faire des prédictions vérifiables.

gravite.jpg

- La vérité factuelle : en terme de tautologie, c'est ce que tente d'expliquer la science à travers ses théories. En fait, les vérités factuelles ce sont ... les faits. Pour reprendre l'exemple de la pomme : la pomme tombe est un fait. Je vois la pomme tomber d'un certain angle et d'une certaine hauteur, parfois même à une certaine vitesse si je ne suis pas immobile dans le référentiel terrestre : ces données là sont subjectives. Au final je me fais un interprétation subjective d'un fait soit-disant objectif : c'est la vérité factuelle. Cependant du référentiel pomme, cette dernière ne tombe pas, mais le sol se rapproche ----> puisqu'il n'y a pas de bon ou de mauvais référentiel, la pomme tombe et ne tombe pas à la fois. Ce sont deux vérités portant sur un même fait : une vérité factuelle dépend donc de son observateur. Attention : ne pas confondre une croyance personnelle avec une réalité factuelle, cette dernière est indépendante de toute croyance ---> ce n'est pas parce que je crois qu'une pomme tombe que cette dernière tombe forcément. Il me faut une perception, indépendante de la croyance.

pomme.jpg

"Ceci n'est pas une pomme" : non, effectivement, c'est la représentation d'une pomme.

- La vérité religieuse : c'est une croyance religieuse. Le dogme est un exemple de vérité religieuse (cf. définition b). Un dogme est imposé comme une vérité incontestable et souvent indémontrable par une autorité religieuse : dès lors que cette imposition est faite par l'autorité compétente (un

concile par exemple), c'est une vérité religieuse. N'importe quel religieux ne peut pas créer des vérités religieuses, en revanche il existe des dogmes bien connus comme "Dieu existe" qui est à la base des religions théistes, ou encore "Il existe plusieurs divinités" qui est un fondement du paganisme quel qu'il soit. Il existe donc plusieurs vérités religieuses bien qu'en apparence contradictoires, elles ne le sont pas car elles appartiennent à des sous-domaines différents. "Dieu est unique" est un dogme monothéiste, et "Il existe plusieurs dieux" est un dogme polythéiste, la première affirmation est vraie et la seconde aussi car toutes les deux dogmatiques. Il est certain que du point de vue polythéiste, l'affirmation "Dieu est unique" est stupide et fausse, mais c'est une contradiction linguistique car les vérités de deux domaines et deux sous-domaines n'interfèrent pas.

730348religion.jpg

Ce schéma est volontairement très incomplet, il permet juste de rendre compte de la complexité des dogmes.

- La vérité personnelle, ou vérité en soi : elle dépend bien sûr de chaque individu. Aussi, elle permet de confirmer le deuxième principe du relativisme que nous verrons plus bas. Il s'agit de considérer comme vraie une opinion ou un fait qui n'est pas forcément reconnu comme étant vrai dans les autres types de vérités. Si vous pensez que je raconte n'importe quoi, ça sera votre vérité personnelle, ce que vous établissez immédiatement comme vrai à partir de votre expérience personnelle. Ma vérité personnelle en revanche, est que j'ai raison et que vous avez tort de penser que j'ai tort : ce sont deux vérités différentes. Cette vérité personnelle est aussi liée à la croyance, puisqu'elle peut ne s'appuyer que sur son propre avis.

A SUIVRE :

  • Toute affirmation est vraie dans au moins un domaine et fausse dans au moins un domaine.
  • L'homme est la mesure de toute chose.

III - L'absolu relativisme.

IV - Relativisme et scientifiques : une parfaite illustration d'un absolutisme mal énoncé et mal compris.

7 Commentaires


Commentaires recommandés

La citation de Beaumarchais « Toute vérité n'est pas bonne à dire » n'a rien à voir avec l'existence de vérités multiples et contradictoires entre elles.

Elle veut simplement dire qu'il ne faut pas tout dire, tout révéler.

Quant à la distinction entre vérité factuelle et vérité scientifique, elle est absurde. Le but de la science est bien de parler des faits, et non pas d'inventer une réalité alternative dans laquelle la science pourrait affirmer tout et n'importe quoi.

Lien vers le commentaire

Ton interprétation de Beaumarchais est l'une des possibilités. En revanche, on peut supposer une autre interprétation qui est celle relativiste.

Pour la distinction entre vérité factuelle et vérité scientifique, elle est parfaitement cohérente dans le sens où les mathématiques qui sont une science exacte ne parlent pas des faits. Il s'agit au contraire d'un univers de vérités abstraites dites vérités mathématiques qui peuvent avoir la particularité de faire des prédictions sur le réel sans pour autant être dans le réel.

Un point n'existe pas, une droite n'existe pas, l'infini n'existe pas, et la liste est longue. Pourtant ce sont bel et bien des vérités scientifiques dans un sous-domaine mathématique.

Distinction confirmée, cohérente et intéressante. D'autant plus qu'il faut garder à l'esprit qu'un fait reste un fait, et ceci bien avant que la science puisse dire quoi que ce soit sur un fait. Il était et reste une vérité factuelle que la Terre n'est pas plate, et pourtant la science ne l'a pas toujours su.

Lien vers le commentaire

La classification des religions est-elle aussi imperméable que ton schéma le laisse croire ? Les différents polythéismes se mélangeaient, les romains pouvaient vénérer des dieux égyptiens et vice-versa. Quant aux monothéismes, il y a toujours des intermédiaires, comme les Juifs messianiques qui croient en Jésus qui sont juifs et chrétiens, à cheval entre les deux.

Lien vers le commentaire

Je te repose ici la même question qu'à LaFolie sur le forum : comment hiérarchises-tu les différentes vérités ?

Il n'y a aucune hiérarchie, j'y ai déjà répondu. Nous avons tendance cependant à accorder plus d'importance au factuel puisque nous vivons dans le factuel au niveau physique.

La classification des religions est-elle aussi imperméable que ton schéma le laisse croire ? Les différents polythéismes se mélangeaient, les romains pouvaient vénérer des dieux égyptiens et vice-versa. Quant aux monothéismes, il y a toujours des intermédiaires, comme les Juifs messianiques qui croient en Jésus qui sont juifs et chrétiens, à cheval entre les deux.

Oui, les polythéisme se mélangent. Isis entre dans le culte grec au Ve siècle avant Jésus-Christ par exemple. Pour autant, il n'y a pas d'opposition entre les dogmes, et c'est ce qu'il est nécessaire de retenir. Il y a des ponts entre les religions, il y a plusieurs ponts même entre le monothéisme et le polythéisme : le christianisme s'inspire du point de vue iconographique de l'Antiquité égyptienne, c'est très important de le remarquer.

Il y a des ponts, certes, et le schéma est quelque peu simpliste, mais c'était volontaire.

Lien vers le commentaire

Il n'y a aucune hiérarchie ? Mais alors à quoi servent vos concepts ? Sont-ils utiles à quelque chose ?

Le seul intérêt de la vérité est de classer les jugements en deux ou trois catégories : les jugements vrais, les jugements faux, et éventuellement, les jugements dont nous ne savons pas s'ils sont vrais ou faux.

Si tout est vrai dans une vérité, et que vous ommettez de hiérarchiser ces vérités, alors vos concepts de vérités n'ont plus d'utilité, nous pouvons les oublier, ils ne servent à rien parce qu'ils ne permettent plus de classer et de discriminer les jugements.

Lien vers le commentaire
Invité
Ajouter un commentaire…

×   Collé en tant que texte enrichi.   Coller en tant que texte brut à la place

  Seulement 75 émoticônes maximum sont autorisées.

×   Votre lien a été automatiquement intégré.   Afficher plutôt comme un lien

×   Votre contenu précédent a été rétabli.   Vider l’éditeur

×   Vous ne pouvez pas directement coller des images. Envoyez-les depuis votre ordinateur ou insérez-les depuis une URL.

Chargement
×