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Personne morale. On pouvait difficilement choisir meilleur titre que celui du livre de Justine Augier, paru en 2024 chez Actes Sud, qui, non content d’exposer les rouages de l’affaire Lafarge avec une minutie extrême, met en évidence ce qui en fait la spécificité, à savoir que, pour la première fois, une entreprise française, c’est-à-dire une « personne morale », est mise en examen pour « financement d’entreprise terroriste » (instruction bouclée), en attendant, peut-être, « complicité de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité » (toujours en cours d’instruction). En l’occurrence, on reproche à l’entreprise Lafarge d’avoir, d’une part, financé des groupes armés (parmi lesquels, excusez du peu, Daech) en les soudoyant pour pouvoir continuer à faire tourner son usine en Syrie ; et, d’autre part, d’avoir acheté des matières premières auprès de ces mêmes groupes. Accessoirement, d’avoir mis en danger la vie de ses employés en les obligeant à venir travailler chaque jour, alors que le pays entier sombrait dans le chaos le plus total. (Certains se sont fait enlever, rançonner, battre. Au moins deux d’entre eux sont vraisemblablement morts : on ne les a jamais retrouvés.) https://www.humanite.fr/monde/daech/proces-lafarge-le-symbole-dun-systeme-capitaliste-en-phase-terminale Alors que la France s’apprête à commémorer les attentats islamistes du 13-Novembre, le tribunal de Paris abritera à partir du mardi 4 novembre le procès de la multinationale du ciment Lafarge, poursuivie pour financement du terrorisme après avoir versé des millions d’euros, entre 2012 et 2014, à plusieurs groupes terroristes en Syrie. Plusieurs anciens dirigeants, dont le PDG Bruno Lafont, sont également sur le banc des prévenus de ce procès de la cupidité d’entreprise. L'alliance des patrons avec les islamistes. L'alliance du capitalisme et de l'islamisme.
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http://www.lemonde.f...85707_3212.html De vilains post colonialistes ont une lecture puérilisante des conflits en terre arabo musulmanes, alors même que d'autres colonies de l'Asie du Sud-Est à l'Amérique du Sud échappent à cette grille de lecture . Le conflit lybien est l'un d'eux , certes l'Occident a sans doute à tort démis un dictateur sans avoir prévu le coup d'après . Mais voir la crise des migrants comme un juste retour des choses n'est il pas manquer d'humanité en oubliant un peu vite le sort que réservait ce "grand despote éclairé " aux migrants ? N'est ce pas non plus oublier que la cause première du conflit lybien est la tribalisation des pays arabo musulmans , dévorés par des conflits religieux recuits dont la plupart remontent à Kerbala ? Point sur la situation en Lybie ---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Spécialiste de la Libye, Moncef Ouannes est professeur de sociologie politique à la faculté des sciences humaines et sociales de l’université de Tunis. Il est notamment l’auteur de Militaires, élites dans la modernisation de la Libye contemporaine (L’Harmattan, 2009) et Révolte et reconstruction en Libye (L’Harmattan, 2014). Dans un entretien accordé à Tunis au « Monde Afrique », il décrypte les origines de la guerre civile qui déchire la Libye depuis un an. Depuis l’été 2014, la Libye est déchirée par un affrontement entre deux camps politico-militaires rivaux, l’un basé à Tobrouk et l’autre à Tripoli. Le chaos qui en résulte illustre l’échec de la transition démocratique post-Kadhafi. Quelles sont les origines profondes de cet échec ? Pour commencer, il faut dire que l’intervention de l’OTAN en Libye en 2011 avait essentiellement pour but de détruire l’ancien régime considéré comme une menace pour les civils. Mais la conséquence en fut désastreuse car si on a détruit le régime de Kadhafi et massacré ses institutions, bien qu’elles fussent très faibles et fragiles, on n’avait pas travaillé à une alternative. « Les milices, bien alimentées en armes et en argent, sont devenues les véritables maîtresses du pays et la situation est devenue chaotique »Cette intervention militaire a ainsi ouvert un vide institutionnel qui a facilité la montée en force des milices. D’autres facteurs ont également joué. Pendant les affrontements de 2011 à Benghazi entre la population libyenne et l’ancien régime, il y avait déjà deux visions complètement différentes. L’une portée par le général Abdulfatah Younes Labidi, le dernier ministre de l’intérieur de Kadhafi, qui proposait de créer une armée de libération et considérait les milices comme étant une menace pour la révolution. La deuxième vision était surtout celle de Mustafa Abdeljalil, le premier président du Conseil national de transition (CNT) et des islamistes et des mouvements extrémistes. Ils considéraient que chaque groupe politique ou religieux devait avoir sa propre milice autonome, l’essentiel étant de faire tomber l’ancien régime. Ces visions contradictoires ont facilité la « milicisation » de la révolte libyenne, surtout après l’assassinat du général Abdelfattah Younes Labidi en juillet 2011. Ces milices ont ensuite bénéficié d’appuis à l’intérieur du pays comme à l’extérieur. Lire aussi : « Les groupes extrémistes doivent quitter la Libye » Certaines milices étaient soutenues par le Qatar, la Turquie et le Soudan, tandis que d’autres étaient appuyées par les Emirats arabes unis, l’Arabie saoudite et l’Egypte. Ces milices, bien alimentées en armes et en argent, sont devenues les véritables maîtresses du pays et la situation est devenue chaotique. Puis les élections de 2012 et de 2014 ont abouti à la cristallisation de deux camps. Comment peut-on les identifier politiquement ? Le pays s’est divisé en deux. Une partie soutient les islamistes, les Frères musulmans et des groupes extrémistes. C’est le camp « Aube de la Libye », basé à Tripoli. Une autre appuie les forces libérales, laïques, nationalistes et tribales. C’est le camp basé à Tobrouk. Mais peut-on résumer la fracture à cette identification politico-idéologique quand on voit un port marchand comme Misrata, pas franchement islamiste, affilié au camp de Tripoli ? Misrata est en fait une ville dominée par les Frères Musulmans mais des Frères musulmans alliés aux hommes d’affaire de la cité. Lire aussi : Misrata, l’injonction des morts Misrata est l’une des villes les plus riches de la Libye, forte d’une longue tradition commerciale. Ses hommes d’affaires ne sont pas spécialement islamistes mais ils sont alliés aux islamistes pour défendre leur ville. Peut-être par calcul, par peur, par intérêt. En Libye, la prégnance des identifications urbaines est troublante. On dit « les gens de Misrata », « les gens de Zintan » ... comme si les Libyens se définissaient avant tout comme appartenant à une cité au-delà de tout clivage politique. Il ne s’agit pas seulement d’identités urbaines mais, disons, tribalo-urbaines. Parce qu’en Libye, même si on vit dans une ville comme Tripoli, Misrata ou Benghazi, cette appartenance locale urbaine vient après l’appartenance tribale. Par exemple, quelque dira qu’il appartient d’abord à la tribu Warfalla et ensuite qu’il réside dans telle localité. Dans quelle mesure l’héritage de Kadhafi pèse dans cette crise libyenne ? « Quand l’OTAN est intervenu, en 2011, l’opération a-t-elle démoli ce qui existait déjà, elle a facilité l’écroulement d’institutions déjà épuisées, fragilisées, mais sans offrir d’alternative »Le phénomène Kadhafi est très complexe. Kadhafi avait détruit toutes les élites formées sous la monarchie d’Idris al-Senoussi. Il les a condamnées au silence ou à l’exil. Il avait aussi phagocyté les institutions de l’Etat. Il a beaucoup affaibli l’Etat, fraîchement constitué sous la monarchie. Il a dominé ces institutions au point d’en faire sa propriété privée. Il a ainsi empêché l’émergence d’un Etat moderne, fort et représentatif en Libye. Lire aussi : La Libye, une menace pour l’Europe Aussi quand l’OTAN est intervenu, en 2011, l’opération a-t-elle démoli ce qui existait déjà, elle a facilité l’écroulement d’institutions déjà épuisées, fragilisées, mais sans offrir d’alternative. Les gens ont alors été tentés de former leurs propres milices pour se défendre contre d’autres tribus, d’autres régions. Cet héritage néfaste de Kadhafi est donc une des sources du blocage de la transition. Kadhafi avait aussi beaucoup joué sur les tribus…. La société libyenne est une société profondément tribale. Même les anciens occupants ottomans ne sont pas parvenus à dominer les tribus. Celles-ci ont toujours su conserver une marge de liberté et une autonomie politique par rapport au pouvoir central, qu’il soit national ou étranger. Lire aussi : En Libye, après le sud saharien, la menace djihadiste gagne le littoral Kadhafi était un fin connaisseur de cette histoire tribale. Il connaissait parfaitement les conflits intertribaux. Une fois au pouvoir en 1969, il a manipulé cette histoire de vengeances et de haines. Il ne voulait pas voir se consolider en face de lui un Etat moderne. Il a préféré ressusciter, réinventer les appartenances primaires et jouer sur les alliances et les conflits tribaux afin de dominer cet empire désertique libyen vaste comme trois fois la France. À la faveur du chaos qui s’est installé en Libye, Daech [acronyme arabe de l’Etat islamique] a élargi son implantation. Comment évaluez-vous cette menace en Libye ? Il s’agit d’une menace très sérieuse non seulement pour la Libye mais aussi pour ses voisins, l’Egypte et la Tunisie. Daech gagne du terrain. Il domine une ville comme Syrte, l’ancienne ville de Kadhafi, et occupait jusqu’à ces dernières semaines Derna, dans l’est. « Daech est venu s’installer à Syrte parce qu’il sait qu’il est capable de manipuler cette mentalité de la revanche tribale. Et les ex-Kadhafistes de Syrte sont prêts à jouer ce jeu de Daech »Aujourd’hui, Daech prépare à partir de Syrte une attaque sur Misrata avec l’objectif de dominer la Tripolitaine. Si on n’arrive pas à stopper sa progression vers la Tripolitaine à l’ouest et vers le croissant pétrolier (Brega, Ras-Lanouf et Sidra) à l’est, on s’achemine vers de très gros problèmes, aussi bien en Libye qu’en Tunisie et en Egypte. A Derna, il y a eu des combats entre Daech et le Conseil local des révolutionnaires lié à Al-Qaida. Daech a été battu, expulsé de Derna. Mais ce n’est pas fini, à Derna. Daech peut se recomposer, faire appel à d’autres troupes de Syrte pour venir les aider. Le combat n’est pas encore gagné. Lire aussi : L’inexorable progression de l’Etat islamique À Syrte, l’ex-ville de Kadhafi, il s’est passé un phénomène troublant, une espèce d’hybridation entre ex-kadhafistes et combattants de Daech. Comment l’expliquez-vous ? En 2011, Syrte a été une région complètement écrasée à l’issue des affrontements entre les fidèles de Kadhafi et les révolutionnaires de Benghazi. C’est une ville humiliée. Il ne faut pas oublier cette histoire de haine tribale, la mentalité de la revanche tribale. Daech est venu s’installer à Syrte parce qu’il sait qu’il est capable de manipuler cette mentalité de la revanche tribale. Et les ex-Kadhafistes de Syrte sont prêts à jouer ce jeu de Daech. ----------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Cette grille de lecture est transposable à la Syrie , en y ajoutant une géopolitique beaucoup plus complexe . Il est en tout cas bien dommage qu'une grille de lecture post colonialiste mette l'Occident en position d'alpha et d'Oméga de tout problème en terre arabo-musulmane , alors même que seule une prise de conscience non victimaire et empreinte de séparation du temporel et du spirituel lui permettrait d'émerger .
