Les sectes et la chasse aux personnes âgées

Quand les sectes recrutent par la formation professionnelle :

Focus Dans son rapport annuel, la Mission interministérielle de lutte contre les sectes alerte sur la montée de ce phénomène.

Par MARIE PIQUEMAL LibérationVous êtes au chômage. Après des mois d’attente et de rendez-vous à Pôle emploi, on vous propose une formation de coaching pour parfaire votre CV et être béton en entretien d’embauche. Mais là, surprise: le formateur demande à tous les participants de se déshabiller. Se mettre nu pour se sentir à l’aise, et mieux déballer sa vie privée pour, soi-disant, améliorer sa confiance en soi. Des exemples aussi farfelus, Serge Blisko, le président de la mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (la Miviludes), en a à la pelle. Il les égrenait ce jeudi matin du perron de Matignon, juste après la remise de son rapport annuel au Premier ministre.

Cette année, la Miviludes a souhaité alerter sur un phénomène, jusqu’ici marginal mais qui prend de l’ampleur: ces pseudo organismes de formation professionnelle sous l’emprise de mouvements sectaires.

«Quand on gratte un peu, derrière des formations du type "développement personnel", on trouve parfois des programmes délirants, raconte Serge Blisko. J’ai en tête le cas d’une formation organisée dans un château isolé à la campagne. Les élèves étaient invités à transpirer nus, dans un sauna. Collectif, évidemment. On s’est rendu compte que l’un des formateurs appartenait à l’ordre du Temple solaire.» Autre exemple : un organisme de cours d’anglais à Paris... dirigé par trois raéliens. «Quelle est la part de prosélytisme? Est-ce une officine de camouflage ou pas? Comment savoir?», interpelle de son côté, Catherine Picard, la présidente de l’Union nationale des associations pour la défense des victimes de sectes (l’Unadfi).

«Un terreau facile pour recruter»

Il existe en France des dizaines de milliers d’organismes de formation. Certains ont le statut d’entreprise, d’autres d’associations loi 1901. Le secteur est peu réglementé. Pas assez, selon Catherine Picard qui explique: «Il existe un agrément mais c’est seulement sur le volet administratif. Il n’y a aucun contrôle du contenu de la formation. N’importe qui peut se présenter demain comme formateur.»

Le premier moteur de ces formations bidons est d'abord financier. C’est d’ailleurs l’un des critères utilisés par la Miviludes pour repérer les organismes suspects. Les coûts sont souvent exorbitants (entre 6 000 et 20 000 euros par personne). «Ensuite, ajoute Serge Blisko, il y a toujours cette notion d'emprise, commune à toutes les formes de sectes. Lorsque vous faites des choses qui vous sont préjudiciables et que vous n’auriez jamais faites dans votre état normal.»

«La secte intervient sur les peurs, les doutes, poursuit-il. Quand vous êtes sans emploi, vous êtes plus fragile. C’est un terreau facile pour recruter. Capter de nouvelles victimes.»

2 600 signalements

Le phénomène est cependant difficile à quantifier. Les signalements auprès de la Miviludes restent trop peu nombreux. «Vous comprenez bien qu’un DRH qui s’est fait berner par un pseudo organisme de formation ne va pas aller s’en vanter. Quant aux victimes, elles ont souvent tellement honte, qu’elles se taisent.»

Au total, l’année dernière, la Miviludes a reçu 2 600 signalements tous domaines confondus. Les dossiers principaux proviennent des dérives sectaires dans le domaine de la santé, avec ces pseudos thérapies pour guérir du cancer.

Serge Blisko, président de la Miviludes, répond à Libération :

tchat La Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires constate dans son rapport 2011-12 que les sectes diversifient leurs cible, s'en prenant aux personnes âgées, malades, ou à celles qui cherchent à se réinsérer. Serge Blisko, président de la Miviludes, a répondu à vos questions.

Libération

Flora. Les responsables des maisons de retraite sont-ils suffisamment informés sur le risque d’entrisme des sectes dans leur établissements ?

Serge Blisko. La Miviludes assure des formations auprès des organisations professionnelles responsables de maisons de retraite. Elle assure également des formations à l’Ecole de la santé publique de Rennes qui forme les futurs directeurs d’hôpitaux ou d’établissements médico-sociaux.

Rosalie. Existe-t-il un organisme où les familles peuvent se renseigner pour savoir si l’établissement qui va accueillir leur parent est fiable ?

S. B. Il y a très peu d’établissements qui posent problèmes. Mais ce sont les formations qui sont proposées au personnel qui peuvent être plus problématiques. C’est donc le rôle de «filtre» et la vigilance du responsable de l’établissement qui sont fondamentaux.

Jean-Christophe. Le constat que vous faites dans votre dernier rapport est consternant. Comment se fait-il que les centres de formation ne soient pas plus surveillés ?

S. B. Il y a trop d’instituts de formations, l’offre est très diffuse. Il y a des dizaines de milliers d’instituts, de centres, qui proposent des formations dans les entreprises, ou à Pôle Emploi. Il faut absolument resserrer le contrôle et l’évaluation de ces institutions, et des formations elles-mêmes.

Jannick. Pour ce qui concerne les propositions de formations professionnelles, sur quoi se base votre dernier rapport ? Avez-vous recueilli des plaintes de la part de participants ? Des retours de Pôle Emploi ?

S. B. Ce sont souvent des stagiaires qui, après avoir «subi» un stage ou une formation étrange, nous alertent et posent la question de savoir si cette formation était sérieuse.

Damien. Pourquoi la Miviludes ne conseille-t-elle pas au gouvernement de mettre en place un numéro vert ou un site internet pour donner la possibilité à tous ceux qui se retrouvent dans ces situations de mise sous influence d’apporter leurs témoignages ?

S. B. Vous pouvez saisir la Miviludes par Internet et signaler ce qui vous paraît suspect ou anormal.

Hervé. Comment se fait-il que Pôle Emploi ne soit pas plus vigilant sur le type de formations qu’il propose aux chômeurs ?

S. B. Pôle Emploi est totalement, et malheureusement, débordé par l’augmentation du nombre de demandeurs d’emploi, et n’a pas, me semble t-il, les moyens de vérifier toutes les offres de formations. C’est au ministère du Travail de renforcer les moyens de contrôle.

Benet. N’y a-t-il pas dans les sphères du pouvoir des lobbies et des moyens de pression pour protéger certaines sectes comme l’Eglise de scientologie ?

S. B. La Scientologie essaye d’infiltrer beaucoup d’institutions, mais les gouvernements successifs ont été très attentifs à cela.

Fragolo. La Milivudes considère-t-elle les dérives sectaires dans leur ensemble, incluant les sectes répondant au nom de «religions», dont les plus connues sont les catholiques, les juives ou les musulmanes ?

S. B. Il y a des dérives sectaires dans toutes les religions, petites ou grandes. Et nous travaillons avec des responsables de ces organisations religieuses pour les aider à faire le ménage.

Oeildelynx. Vous ayant contacté par l’intermédiaire de votre site Miviludes pour un grave problème de dérive sectaire, il y a quelques mois, je n’ai eu absolument aucune réponse, même pas un accusé de reception... A quoi servez-vous en réalité ?

S. B. Nous avons pris beaucoup de retard, tant notre site internet a du succès. Le gouvernement actuel s’est engagé à renforcer nos effectifs, ce qui nous permettra de combler ce retard dont nous nous excusons. Mais nous répondons à toutes les saisines, mais parfois tardivement, hélas.

Totof. Les sites internet sont-ils surveillés ? Je me suis intéressé à celui de G.-C. Burger, sorti de prison, et en cherchant bien, on y trouve l’apologie explicites de la pédophilie, et un recrutement sous-jacent par des forums.

S. B. Une cellule de vigilance de la gendarmerie nationale surveille les sites pédopornographiques et, également, mais dans une moindre mesure, les sites dangereux, apocalytiques, survivalistes qui pourraient entraîner des internautes dans des aventures très préjudiciables.

Nicolas. Les gouvernements successifs tiennent-ils compte des constats que vous faites dans vos rapports ? Comment réagissent-ils ? Voyez-vous au fil des années des améliorations, lesquelles ? Des dégradations, lesquelles ?

S. B. J’ai remis le rapport annuel 2011-12 au Premier ministre, hier. Et il a marqué sa volonté de continuer, d’amplifier la lutte contre les dérives sectaires. Je rappelle qu’il y a toujours eu unanimité de tous les partis politiques au Parlement, en faveur de ce combat. Et que la loi About-Picard a été votée en 2001, à l’unanimité de l’Assemblée nationale et du Sénat, pour introduire dans le code pénal l’emprise mentale - le procès des reclus de Monflanquin, dont l’appel s’achève aujourd’hui, montre bien les drames auxquels l’emprise mentale peut conduire.

Sdurif. Quels sont les critères pour considérer un mouvement comme étant une secte ?

S. B. Nous avons une dizaine de critères. Le plus important que l’on retrouve toujours la notion d’emprise mentale. Mais il y a aussi les prétentions financières exhorbitantes. Il y a également, entre autres, la rupture des liens familiaux ou avec l’environnement social professionnel.

Brusel. L’emprise mentale ? Dans ces conditions, considérez-vous Libération comme une secte ?

S. B. Libération n’est pas une secte !

Coco. Quand vous attaquerez-vous à la secte la plus importante, la franc-maçonnerie, qui en a toutes les caractéristiques et qui compte un nombre très importants de politiciens. Avez-vous vraiment les mains libres pour votre mission ?

S. B. On pose souvent la question de la franc-maçonnerie, de son secret, et de ses rituels. Chacun en pense ce qu’il veut, mais, il est nettement plus facile de quitter une loge franc-maçonne qu’un groupement sectaire. Idem pour un parti politique...

Pascal. Quoique mystique, je n’appartiens à aucune d’entre elles, j’ai simplement lu des trucs. Est ce plus c** que le show-biz, que les people, que les partis politiques, que les supposés experts omniprésents, que les sondages, allons ! Soyez sérieux.

S. B. Pascal, vous croyez en ce que vous voulez. En France, la liberté de croyance et de religion est complète. Nous ne luttons que contre les dérives sectaires, et ceux qui exploitent les malheureux qui tombent dans les griffes de ces malfaisants. Merci à tous ceux qui nous ont permis de préciser le sens de l’action de la Miviludes.

(voir aussi :)

Le centre de documentation, d'éducation et d'action contre les manipulations mentales (CCMM).

Personnellement, je ne vois pas cette tendance (si tendance il y a, on est tellement manipulé et sans le savoir !) de la même façon que vous

Premièrement, pour ma part, on ne peut pas reprocher à des minorités religieuses de colporter leur bonne parole ou alors il faudrait interdire à toutes les religions de pouvoir enrôler les enfants dans leur mouvement, par exemple, ce qui à mon avis est aussi extremement préoccupant

On ne peut pas leur reprocher aussi de vouloir faire de l'argent sur le dos des personnes vulnérables, car il faudrait aussi interdire le commerce, la pub, les sociétés d'assurances et autres société commerciales qui s'intéressent tout autant que les minorités religieuses à l'argent

Le fait de vouloir s'enrichir est le "leïmotifv" le saint graal de notre société et les minorités ne font pas exception

Deuxièmement, si on en croit cet article, toute personne agées est une victime potentielle des minorités et donc sans défense et complètement sénile, incapable de se défendre et si elle opte pour une de ces minorités, elle a forcemment plus sa tête et s'est fait abusée...

Comprennez vous la manipulation ?

On enlève la liberté aux personnes agées que l'on rabaisse au rang du légume lobotomisé, de pouvoir choisir un mouvement religieux qui apaise ses souffrances et manques affectifs même si c'est au prix de sommes d'argent puisque pour eux, c'est la seule façon d'avoir du réconfort

Je ne dis pas que c'est bien, au contraire, toute personne qui a des chiffres dans le coeur ne sera jamais un humain digne de ce nom et ne connaitra jamais la paix, mais c'est la société toute entière qui en veut à notre argent !

Savez vous combien coute une maison de retraite ?

C'est une somme exhorbitante, et ce n'est pas du raket ?

Tant que la société ne proposera pas une réponse humaine et non à but lucratif à la souffrane humaine, nous aurons des mouvements intéressés par l'argent, religieux ou non tels des vautours en recherche de proies, de personnes à dépecer et les minorités offrent leur services comme des mercenaires de la fraternité si je peux parler ainsi

Et une fois de plus, plutot que de se poser les vraies questions, on s'en prend une fois de plus à ces minorités qui sont stigmatisées et désignées comme coupables faciles (c'est plus courageux de s'en prendre aux religions majoritaires) alors que c'est la société qui elle est bien plus abjecte qui crée les vrais problèmes

c'est quoi ton but d’encourager les sectes? et de dire qu'elles sont pas manipulatrices?