-
Compteur de contenus
153 -
Inscription
-
Dernière visite
Type de contenu
Profils
Forums
Blogs
Calendrier
Vidéos
Quiz
Movies
Tout ce qui a été posté par I.Thomas-Gil
-
L'orage vient de passer. La nuit est maintenant tombée et nous sortons faire un tour sur le chemin du phare. Les lointains roulements du tonnerre nous accompagnent, les feuilles des platanes laissent tomber des gouttes sur notre passage. Nous discutons de la fameuse phrase : maîtres et possesseurs de la nature. Comment les philosophes du 17° s ont-ils imaginé ce programme ? je résume le cours du collège de France. La science nouvelle repose sur la construction pensée mathématiquement, structurellement à partir de laquelle les faits sont priés de répondre par leur venue à la tentative humaine de les produire. Cela marche parfois et l'on dispose dès lors d'une recette fondée sur des quantités qu'il suffit de mettre en présence pour que le fait recherché se produise. Cette maîtrise doit permettre de produire des effets à volonté. La grande question, celle que Platon dévoile, reste entière : qu'en est-il du Bien ? Le discours de la méthode s'appuie sur le christianisme avant de s'en échapper. D'abord, se fiant au Texte sacré, l'homme apprend qu'il ne doit pas pécher : la loi divine nous “oblige à procurer autant qu'il est en nous le bien général de tous les hommes”. Mais le philosophe cherche à s'autonomiser, à cesser de suivre aveuglément les ordres du Très-Haut, à faire de la conduite de la vie l'effet du savoir, les ultimes fruits du savoir : connaissant son corps, obtenant la santé de son corps, l'homme maîtrisera ses passions et rendra son âme bonne.
-
Fifine entre dans l'épicerie et s'adresse à Mauricette qui tient boutique en l'absence de Pedro, notre épicier préféré. Ils ont installé le chapiteau sur la place, tu as vu. Difficile de ne pas le voir, maugrée l'épicière. Chut, laisse moi écouter, ajoute-t-elle. Elle monte le son de sa radio. C'est Jaira Burns que tout le monde adore ici parce que c'est le portrait de Minouch ou plutôt de sa fille Lise qui s'est installée dans la villa avec nous, pas plus tard que hier. Quel orage, dit Fifine, putain, j'étais aux champs en train de buter les haricots ... merci Mauricette, et je sors avec ma bourriche. Direction la pinède en bordure de la plage des Tortones et hop de bon matin, je me mets au travail : écouter les oiseaux et, de temps en temps un cours donné au Collège de France sur la philosophie du début du 17° s. Cela commence : les hommes sont emportés par le courant : ils se précipitent dans leurs affirmations ou bien ils font les morts, attendent qu'on leur dise ce qu'ils doivent faire. Mais, dit le philosophe, la pensée peut si elle se résoud elle-même à se discipliner, atteindre la vérité. J'en ai fais l'expérience, dit-il et il nous narre son parcours : les Méditations. Quelques pages pour nous montrer qu'à la condition de considérer avec attention ce que nous pensons spontanément, nous pouvons distinguer des absolus sur lesquels on s'appuie aveuglément et qu'il faut donc tester afin de savoir s'ils sont aussi certains qu'ils le paraissent (par exemple : deux et deux font quatre). C'est ainsi qu'au 17° s, on en est venu à faire appel à des critères subjectifs pour progresser dans la découverte de la vérité objective.
-
Elle éclate en sanglots. Sur la terrasse, la pluie arrive brusquement et inonde les vitres du bistrot. Des éclairs balafrent l'océan. La fille de Minouchka est arrivée hier soir. Jusque là coincée à Paris dans une colocation, elle a pu enfin venir nous rejoindre. Le mois qu'elle vient de passer a été apocalyptique. Bref, elle reprend ses pinceaux, ses pigments, essuie ses larmes, se met à peindre furieusement. Je la contemple béat d'admiration devant tant d'énergie et de grâce mêlées. Tu vois ta fille ! elle illustre ce que disait Francesca hier soir. Je résume : il y a ce que nous sommes en surface (des choses que nous savons faire, la peinture, la musique, la cuisine, le jardin, la pêche ..., choses que nous prenons, laissons, reprenons avec plaisir), il y a ce que nous sommes en profondeur (érotisme, jalousie, souffrance ..), il y a les autres (dans la même situation) qui sont intégrés à notre surface et ceux que l'on voudrait intégrer. C'est cette intégration des autres qui est le coeur du volcan. Elle se fait et se défait. Oui, dit Minouchka, c'est notamment le coeur du politique. Cette intégration des autres dans l'ensemble des choses qui nous représentent se produit par la parole et donc par une renonciation. Nous sommes là, les uns et les autres dans une unité humaine qui se projette dans l'avenir. La violence, le viol, l'agressivité sont le fait de ceux qui échouent à vivre à la surface (humaine) et qui sont entraînés par le chant des sirènes. Le politique, c'est la violence faite aux hommes. L'intégration n'est plus le fait de l'humanité, la surface est un fac similé : elle est une violence qui cherche en profondeur, qui cherche à entrer de force, que les impuissants infligent à ceux ne leur demandent rien (c'est ce qui les fâche). Le politique veut prendre en charge le destin des hommes .. qui doivent alors obéir, se prêter à n'être plus que moyen de jouissance des hommes qui ne savent que commander : fais-ci, fais-ça. Fausse surface. La politique échoue à créer l'humain.
-
Les pouvoirs dit publics porteront une grande partie de la responsabilité de notre stupidité. Certes, tu as raison, je dis à l'épicière, Noémie, mais comment virer de bord ? Il faut savoir d'où viennent le vent et les courants, qu'elle me fait. Je résume son propos : Le 11 mai, l'incendie redémarrera. Cela viendra de la stupidité des masse manipulées par des pouvoirs aux abois. La stupidité des masses : incapables de percuter la nature de cette infection. Les pouvoirs : occupés à leur méchante cuisine (se maintenir : le seul contenu du pouvoir selon certains théoriciens, pour le reste ils ne savent pas faire, ils tiennent un gouvernail de théâtre). Comment vivre avec cette possibilité de mourir ? en adaptant intelligemment nos comportements. Mais les cervelles d'oiseau répètent ce que disent les ministres et oublient de faire attention. Elles ne veulent rien entendre, rien changer : moi, moi, moi ....voilà ce qui les remplit d'aise, sourds et aveugles, s'en remettant au pouvoir comme un enfant s'en remet à ses parents (avant l'âge de raison). En janvier, on sait tout ce qui nous attend. On ne se prépare pas. Mars, on fait le mort et on ne se prépare pas. Mai, fais ce qu'il te plait : on fait changer la salle de bain, on va aux putes, on se rue dans les magasins ... On n'a rien compris. Pendant ce temps, les gens intelligents sur la planète continuent à vivre, à travailler, sans s'être interrompu, en maintenant une distance avec son prochain (une bonne distance) et en portant des masques pour éviter de les infecter (car on ne sait jamais si on n'est pas en train d'incuber).
-
L'école va réouvrir. L'instit nous a demandé de l'aider à organiser la reprise des cours. Primo, il va falloir autant que possible faire classe en plein air. On va donc monter le chapiteau du cirque qui traîne dans notre salle des fêtes (vieux souvenir du temps où une école du cirque s'était installée chez nous). Ce sera magnifique ! Rouge et or au milieu de la place du Marcadieu. Les tables seront espacées de trois mètres. Les enfants qui présenteront de légers signes de rhume auront un masque ou resteront chez eux. On se lave les mains chaque heure. La récréation se déroulera avec des masques et avec la consigne de ne pas s'approcher trop près les uns des autres. Aucun enfant n'est infecté, ici. Aucun adulte. Nous avons des tests et nous en sommes quasiment sûrs. Mais nous savons que ce damné virus peut arriver sans crier gare. Aussi, devons-nous savoir comment il se transmet. Il faut savoir qu'il est au sol, sur les surfaces, dans l'air. Nous allons, comme dans notre épicerie, notre salon de coiffure, notre cabinet médical, notre criée ...etc nettoyer cette école, à la javel, toutes les surfaces et laisser ouvert pour que l'air extérieur entre en permanence. Nous sommes une vingtaine à passer du désinfectant plusieurs fois par jour : une heure pour chacun de nous, c'est pas le bout du monde. Il y va de notre survie. Ensuite nous partons nous promener, ou bien deviser joyeusement au Bistrot ou bien en solitaire affonter la colère des goélands. Hier, j'ai dû aller en ville. Incroyable : deux scènes surréalistes à quelques mètres de distance, montrant tout ce que nous devons encore apprendre : un bus bondé démarrant à côté d'une escouade de la gendarmerie en train de verbaliser une grand-mère promenant son chat (sans doute était-elle trop loin de son domicile).
-
Les dirigeants ont de l'argent, du pouvoir et cela leur donne à la fois des responsabilités et des tentations. On ne peut déterminer a priori ce qu'ils vont faire de leur pouvoir. Mais ils ne sont pas seuls et que font les autres? Ils ne peuvent rien avec cet argent et avec ce pouvoir : car tout cela ils le tiennent des autres !
-
cela montre l'efficacité des masques et c'est une excellente nouvelle. Mais, cela implique, qu'en l'absence de vaccin on va devoir se coltiner des masques. Or, cela répugne à nos habitudes (on ne vit pas masqué, on n'est pas des ...) : d'où l'idée de laisser filer cette gripounette jusqu'à ce qu'on s'avise de ses conséquences (50 millions d'immunisés, c'est 500 mille morts et une économie HS lorsqu'on se voit obligé de la mettre à l'arrêt pour éviter que les soins intensifs n'implosent). Très mauvais calcul de l'Europe et des EU, assez incompréhensible.
-
Il est évident que bien des gens pensent que le virus va permettre d'éliminer le surplus. Naturellement personne ne pense faire partie de ce surplus. Faire de chaque humain une fin en soi : c'est la loi morale, pour nous modernes. Mais, des gens comme Trump et tous les racistes, fascistes ... pensent qu'il y a des gens supérieurs qui doivent être les maîtres du monde et des gens inférieurs qui doivent être si possible éliminés. Comment peuvent-ils croire cela ? Ils pensent être supérieurs tout simplement. Et ils pensent être supérieurs parce que cela leur permet de vivre avec une bonne image d'eux-mêmes. Mais n'ont-ils pas honte plutôt, de ne pas aider les autres? Non, car ils aident les autres en sauvant les bons et en éliminant les mauvais. Ils sont donc fiers d'eux-mêmes en sauvant l'humanité de ce qui la détruit. Pour eux donc, l'homme n'est pas une fin en soi. Est-ce possible ? Si ces gens sont de mauvaise foi, ils luttent donc contre la loi morale qui est écrite en eux. S'ils sont de bonne foi, cela montre que cette loi morale n'est pas écrite dans nos gênes, qu'elle est culturelle. Si elle est culturelle, on ne peut que l'explorer dans sa structure et la transmettre le mieux possible (en joignant le geste à la parole, par exemple : d'où l'exemplarité nécessaire des adultes et des gouvernants).
-
la vie n'est donc pas tranquille du tout !
-
Tout à fait, il ne faut pas baisser les bras. Il est bien sûr possible que notre économie, notre technologie, notre volonté politique nous permettent de mettre au point un traitement capable de vaincre ce virus. Que ce soit nous ou les allemands, est certes quelque chose d'important, de révélateur de l'état de notre nation. Mais pour ce qui est du traitement lui-même, qu'il soit trouvé par les uns ou par les autres, est sans importance véritable : l'essentiel est qu'on y parvienne. Beaucoup de choses de notre avenir en dépendent et c'est ainsi qu'on peut relativiser ces questions d'orgueil national (honte ou fierté) : pure question de survie de l'humanité.
-
c'est juste le comportement du gvt que je cherche à décrypter. Quant aux moyens physiques de vaincre le virus, je suppose que des puissances économiques, technologiques, politiques comme celle de la Chine ou des Usa vont mettre le paquet ! Ce qui me parait bizarre c'est ceci : que des Etats aient voulu chercher l'immunité collective, comme l'Angleterre ou la Suède. Comme s'ils avaient un doute sur la possibilité de parvenir à un vaccin. Mais il parait que les chinois sont en train de tester des vaccins ! tout cela est bizarre.
-
Cette phrase est proprement surréaliste : "préconiser" le port du masque dans les transports en commun. Pourquoi? parce qu'il est évident que si on veut éviter de contaminer les autres, dans un lieu confiné comme un bus, il faut impérativement porter un masque. Question : pourquoi le gvt en vient à envisager si tard cette "possibilité" ? réponse possible : parce qu'il est dans une stratégie plus complexe où il cherche, en fait, à faire en sorte qu'un maximum de personnes s'immunise naturellement. Il préconise les masques, les tests en dernier ressort alors qu'une stratégie d'arrêt de l'épidémie (sans immunité collective obtenue) les imposerait de toute évidence comme premières mesures. ceci, n'est qu'un raisonnement et une vague intuition face à cette stratégie bizarre du gvt (où tout semble contradictoire)
-
Hier, phrase surréaliste du premier ministre : je suis pour le port obligatoire du masque dans les transports en commun. Comment peut-on dire une chose pareille ? On peut le dire parce que le gvt est sur une autre équation. Trop peu de français ont contracté le virus, il faut donc savoir que tous les gens que nous rencontrons sont potentiellement contaminants. Que veulent dire ces phrases ? Quelle est la stratégie du gvt ? On peut la résumer en une équation : dans un premier temps : faire baisser le nombre d'infections = renoncer à l'immunité collective = confinement maximum (autant que l'économie peut le supporter). mais alors : question : pourquoi laisser la porte ouverte à l'infection dans les transports sans masques obligatoires, dans les magasins, sur les lieux de travail ? réponse possible : le gvt suit l'idée qu'l faut un maximum de gens contaminés (immunisés) pour envisager une relative défense collective en attente du vaccin. pourquoi laisser la porte ouverte à l'infection dans les lieux de confinements (famille, voisinage) au lieu d'extraire les personnes contaminées au moindre doute ? Même réponse. question : pourquoi avoir voulu l'immunité collective en sachant que cela causerait des centaines de milliers de morts ? réponse possible : c'est une stratègie pensée en vue d'une vie future sans vaccin.
-
On s'est bien marré ce matin. Ange nous a expliqué par le menu la stratégie européenne (sans rien nous dire de ses sources). Les frontières sont d'abord restées ouvertes et le message était : à quoi bon les fermer puisque le virus ne connait pas les frontières. Le but caché de cette stratégie est la sauvegarde de l'économie face à la Chine qui n'avait déjà plus de nouveaux cas. Les européens pensaient qu'ils étaient assez solides (sanitairement) pour encaisser une contamination à 70% (synonyme d'immunisation). Mais l'Italie et l'Espagne explosent et c'est la panique en France et un peu partout : donc on accepte l'idée d'un arrêt partiel de l'activité économique pour permettre une contamination lente. Il faut, parait-il, que 70% d'entre nous aient connu le virus. Pour l'instant, il n'y en aurait que 6% et 20 mille morts. Il faudra donc, nous dit Ange, que 200 mille français meurent. Et cela va prendre du temps. Tout s'explique, dit alors Francesca : les gvt ont bien pris la mesure du problème, ils laissent (en toute hypocrisie) les gens à se contaminer tout en les retenant afin que les services hospitaliers puissent gérer les millions de gens qui vont se retrouver en réa. Yes ! dit Ange et pourquoi croyez-vous je vais si souvent en ville et pourquoi n'y a-t-il pas de masques dans les transports et dans les magasins ? J'ai compris quel était mon devoir : me contaminer pour immuniser le corps social et cela en respectant les lois qui m'obligeaient à ne pas contaminer trop de personnes ! Ange, là, tu m'épates. Pourquoi on ne nous inocule pas le virus tout de suite et qu'on en finisse ! Oui, t'as raison, approuve Ange, mais il faudra ne nous l'inoculer que dans les limites que peuvent supporter nos services soignants qui en ont raz le bol de cette stratégie. Débile ? Oui, reconnait Ange. C'est débile, mais il est trop tard pour reculer.
-
Arsène travaille en Australie. On converse grâce à WhatsApp. Il nous raconte la suite de l'histoire du bateau de croisière que les autorités locales ont laissé, au mois de mars, débarquer sans contrôle. Et ils ont contaminé 10% des 6000 cas recensés en Australie ! Depuis, les australiens font gaffe. Pour lui, nous vivons un combat pour les Lumières. D'un côté, la stricte et tranquille observation des faits, de l'autre la folle excitation et la récupération par les religions, les politiques, les médias : ce qui explique, selon lui, une bonne part de notre attitude déphasée face à cette contamination, c'est le sens inconscient qui obscurcit, noie, axphyxie notre réflexion basique. Pour Arsène, tout ce qui, dans nos sociétés produit inconsciemment du sens, médiatise ainsi la relation aux faits, nous fait glisser vers des systèmes de compréhension s'opposant à la prise en compte de la réalité (comme par exemple : voir dans une maladie une épreuve, se focaliser sur un personnage énigmatique, se comparer aux autres pour se glorifier, chercher des indices prouvant que telle catégorie d'humains ne sont pas sans rapport avec la contamination...etc). Il nous propose de lire ces extraits et d'en discuter ensemble. A propos de l'homme, libre penseur. […] C’est un homme qui détruit des chimères nuisibles au genre humain pour ramener les hommes à la nature, à l’expérience, à la raison. C’est un penseur qui, ayant médité la matière, son énergie, ses propriétés et ses façons d’agir, n’a pas besoin, pour expliquer les phénomènes de l’univers et les opérations de la nature, d’imaginer des puissances idéales, des intelligences imaginaires, des êtres de raison, qui, loin de faire mieux connaître cette nature, ne font que la rendre capricieuse, inexplicable, méconnaissable, inutile au bonheur des humains.[…] des hommes guidés par l’expérience et le témoignage de leur sens, qui ne voient dans la nature que ce qui s’y trouve réellement ou ce qu’ils sont à portée d’y connaître, qui n’aperçoivent et ne peuvent apercevoir que de la matière, essentiellement active et mobile, diversement combinée, jouissant par elle-même de diverses propriétés, et capable de produire tous les êtres que nous voyons ; des physiciens convaincus que, sans recourir à une cause chimérique, l’on peut tout expliquer, des gens qui ne savent point ce qu’est un esprit et qui ne voient point le besoin de spiritualiser ou de rendre incompréhensibles des causes corporelles, sensibles et naturelles, des hommes qui rejettent un fantôme, dont les qualités odieuses et disparates ne sont propres qu’à troubler et à plonger le genre humain dans une démence très nuisible ; pour lors, ils ne seraient pas regardés ni comme des insensés ni comme des furieux, mais comme des hommes sans préjugés, dont les opinions, ou si l’on veut l’ignorance, seraient bien plus utiles au genre humain que les sciences et les vaines hypothèses qui depuis longtemps sont les vraies causes de ses maux. D'Holbach, Système de la nature (1770), partie II, chapitre XI, 1770
-
Le difficile est de se régler soi-même. De tenir bon. Le problème dans le réglage, c'est le maintien de la décision. Parce que nous sommes des vivants, du temps, du changement, nous ne pouvons main-tenir le “même” que parce qu'il y a une résolution qui nous crée en permanence. Elle est déjà là. Elle se crée à partir de la compréhension de la situation qui la requiert. C'est donc cette compréhension qui fait défaut lorsqu'on cesse peu à peu de décider de faire “ainsi” chaque fois qu'il y a “ceci”. Je décide de “faire” ceci pour autant que je constate “cela”. Je décide qu'il en sera ainsi. Je me règle. Oui, mais pour que cette règle soit vivante, condition acceptée, assentiment où “je" suis partie prenante, il faut, en amont, que je comprenne que “cela” a lieu. Or, cette irruption de “cela” est un événement qui modifie le réglage habituel et nécessite un effort pour le “voir”. Exemple : je vis avec des habitudes qui sont des réglages qui se maintiennent dans une situation, une forme de vie que je maintiens (ou plutôt qu'une communauté maintient, une famille, un village, un Etat, une culture ..). Arrive un virus mortel qui nécessite une compréhension de ce qu'il faut faire pour y échapper. Cette compréhension conduit à décider de faire “ainsi”. Cette décision qui “doit” être prise avec les autres, conduit à modifier mes habitudes. Il y a des forces de résistance qui viennent des raisons que j'ai de vivre selon mes habitudes “ainsi” et “ainsi”. C'est un équilibre qui “doit” être trouvé dans la compréhension de la situation. C'est cela qui est difficile, c'est comme de se hisser à la force des bras. Comprendre, avoir l'esprit clair, avoir la lucidité, est chez les humains, la condition de la survie et donc de la vie plaisante avec les autres. C'est pour y suppléer que les Etats imposent de force des conduites à tenir : fais pas ci, fais pas ça. Mais, ce n'est qu'un expédient, il faut que chacun y mette du sien, en vienne à comprendre et à se décider. Exemple : comprendre que le fond d'une relation avec l'autre est dans la bonne humeur que l'on maintient donc par pure décision. En quoi cela relève de la décision et d'une règle ? je demande à Minouchka qui vient de nous faire, au petit déjeuner, pris sur la terrasse, malgré le crachin, ce brillant mais obscur commentaire sur “qu'est-ce qu'une règle ?”
-
Ici : pas de virus. On le sait comment ? parce qu'on teste chaque personne qui a un rhume. Des parisiens sont arrivés : on les a testés. Ceux qui étaient positifs ont dû porter des masques, des gants, désinfecter le lieu de leur quatorzaine. Depuis, plus rien, sauf la jolie Angélina et ses fameuses copines, sans cesse fourrées dans la ville voisine, elles ont choppé le virus en faisant leurs courses (alors qu'on a suffisamment sur place). Trois ont été hospitalisées, une est en réa. On a des nouvelles du vrai faux "pays" : ça y sent fort mauvais. Partout les gens deviennent méchants, enragés délateurs. Grrr, ça grogne, ça ricane, ça mord si possible. Ici, on a Angelina : on lui dit que ce n'est pas zoli, ni poli de montrer du doigt. Elle n'en a cure. Tout y passe : les chinois, les pangolins, les musulmans (qu'est-ce qu'ils ont à voir ? mystère), les allemands (ah oui, ils laissent les gens se promener, non mais quelle honte!). La puanteur partout : la haine monte des égouts. La Peste brune. On ne sait comment se défaire de l'angoisse : elle remonte inéxorablement du passé loupé. Les autres : ah oui ! c'est de leur faute. Plutôt que d'assumer et de prendre en charge la situation : on enrage, on accuse, on traque, on attrape, on juge, on pend. Un sacré beau "pays" qui sombre, qui s'échoue. Naufragé volontaire : pour l'instant il fait le mort, il broie du noir.
-
Vivement le 11 mai ! Angelique (de son vrai prénom : Marie-Ange qu'elle déteste, voulant qu'on l'appelle Anzèle, Anzélique ... ces héroïnes cinématographiques du XX° siècle) s'exclame chez le boulanger. “ze vais faire une de ces nouba avec mes copines", elle sort en nous faisant un clin d'oeil. Le boulanger éclate de rire : la seconde vague de contamination est programmée. A peine sortie, voilà Angèle pliée par un coup de vent. Son parapluie se retourne. Elle revient en catastrophe : mince, qu'elle nous fait, z'avais pas vu qu'il y avait de l'orage. Les pays qui imposent des règles et qui ne s'appuient pas sur le jugement des humains sont mal gouvernés. Les gens y sont bêtes, n'apprennent rien, obéissent servilement. Une maladie se déclare : circulez y a rien à voir. Face à la triste réalité de la mort, faut bien faire quelque chose (quand même) : la police verbalise. Les médecins réussissent à soigner : c'est fini ? on peut sortir ? Rien ne s'est donc passé. Tout est oublié. Il s'est passé quelque chose ? Une vie entièrement passée dans la main des pouvoirs : à qui il suffit d'aboyer les ordres.
-
C'était dans la nuit. Il y avait des indiens qui rôdaient et que l'on entendait imiter le cri des chiens sauvages. Nous étions rassemblés à deviser, mi rires, mi larmes. Nous avions un peu abusé du cambusard. D'autres villageois s'étaient joints à nous, les parisiens étaient là avec leur petite musique si particulière. La phrase de Léo : les gens il conviendrait de ne les connaître que disponibles, à certaines heures pâles de la nuit ... https://www.youtube.com/watch?v=O_yIfT5pXpA&feature=youtu.be
-
Aujourd'hui, je n'ai pas fait grand-chose. Pourtant ce n'est pas l'ouvrage qui manque. Alors ? La bascule : honte, fierté. Honte, fierté, cela me remplit. On aimerait s'en passer. Il y a peut-être aussi le : ‘ni honte, ni fierté’, mais on ne sait pas comment cela se fait. Je dis “on” mais je devrais peut-être dire “je”, je ne sais pas pour les autres. Mais je ne sais pas mieux pour moi. Donc, je dis “on”, c'est pour réfléchir au sens des mots. Honte face à ce quelque chose que je fais et que je juge “ nul” : par exemple, si je suis payé pour casser des cailloux. Fier face à ce quelque chose que je fais et que j'applaudis : par exemple, si je suis en train d'aider un pêcheur à retaper son bateau. C'est donc que ce que je fais me représente, me revient sous la forme d'un message (ce message dit si j'accomplis mon essence ou bien si je la fuis) : ce que j'éprouve ne ment pas, la vérité de qui je suis apparait. On peut objecter que ces choses (honte, fierté) m'arrivent si l'autre me regarde et donc qu'il ne s'agit pas de ce que je pense mais de ce que les autres pensent. A cela je répondrais : ce que les autres pensent s'appuie sur la même essence que ce que je pense et il s'ensuit que les autres me permettent de ne pas me fuir. Question : pourquoi cette Chute, cette fuite hors de l'essence ?
-
Ce que cette période met en suspens : la vie habituelle. On se retrouve un peu dans la situation d'un homme échoué à la suite d'un naufrage. Seul. Or la solitude a été pensée par notre “civilisation”, celle qui fait naufrage, comme la condition de l'homme. Ce que la philosophie, la science, la politique, la morale ..manquent ainsi, c'est que ce qui compte pour l'homme, c'est l'autre homme. Ce que montre un roman comme celui de Robinson Crusoe, c'est que le moment de vérité pour Robinson, ce n'est pas de se bricoler un monde confortable, d'avoir une relation avec les choses, ni d'éduquer vendredi pour lui donner une forme convenable. Il est travaillé par l'absence de l'autre homme, celui qui le voit. Rien de ce qu'il fabrique n'existe plus véritablement pour lui. Cela n'existe véritablement que pour un autre homme. Or, il n'y en a pas et tout semble se dissoudre jusqu'à ce qu'il découvre une empreinte de pied toute récente. Puis, il va oublier ce moment et il va tenter de maitriser ce regard de l'autre homme. La philosophie, la morale, la religion, la politique, la guerre ..etc ...tentent de maîtriser ce regard : le réduire à un objet que l'on maîtrise, que l'on éduque, que l'on connaît, que l'on échange, que l'on achète, que l'on commande afin d'obtenir l'homme parfait, parfaitement autonome (se maîtriser en parvenant à une maîtrise de l'objet).
-
On a retrouvé les gars du Taer, de retour, ce soir. Tous méchamment torchés. Toutes les peines à me lever de ma chaise. Minouchka m'a aidé à monter dans ma chambre et s'est eclipsée. Minouchkaya où tu t'en vas ! Pfft ! et je me suis retrouvé comme le petit Marcel, seul dans mon trop grand lit. Bernado s'est enflammé, ce soir, Les effets du cambusard. J'ai du mal à me souvenir de ce qu'il a dit. Qu'est-ce que nous nommons “la” science, nous a-t-il demandé... une singularité, un prodige. Elle vient de Socrate. L'oracle de Delphes aurait dit : il est le plus savant des hommes. Quoi ! qu'est-ce que je sais que les autres ne savent pas ? Il s'est mis à chercher cette mystérieuse vérité que seul il connaissait. Ses enfants, petits enfants, par millions partent encore à la “recherche” de la vérité, s'identifiant à lui, appelés par le même démon, vivant la même vocation. Descartes explique ainsi ce prodige : plutôt que de faire comme monsieur tout le monde, s'en tenir à son solide bon sens, appliquer les règles apprises,s'appuyer sur la vérité (et certes pas la chercher) .. partir, ne pas s'en laisser conter, être au moins le temps de la recherche sans foi ni loi, faisant table rase de tout ce qui est certain, ouvrant méthodiquement la porte à de “nouveaux savoirs”, à de nouvelles terres ... et quoi ! que de nouveautés apparaissent alors ! Quiconque a fait un peu de “recherche” sait ce que c'est que cette joie de partir à l'aventure, sans savoir ce qu'on va trouver, puis la joie rare, merveilleuse de rencontrer l'inconnu, immense, se dérobant, et voir l'horizon qui recule.
-
Qu'est-ce qui rend l'instant agréable ? L'érotisme et l'humour. Ce qui le rend vite insupportable ? le narcissisme et le sérieux. Les gens bêtes et disciplinés sont horribles dans les geôles. Ils sont méchants avec un sérieux et une suite dans les idées exemplaire. Ils gardent la geôle du dedans. Leur angoisse de mal faire remonte sans nul doute à leur petite enfance : ils n'ont jamais rien compris, rien appris. Devenus des mécaniques avec des airs supérieurs. Leur prévisibilité est ce qu'il y a de pire en eux. L'humour et l'érotisme : la transgression et la subversion de l'ennui où nous maintiennent ces gardiens de la lettre de la loi (que nous sommes trop souvent).
-
Qui est là ? (Aucune réponse) Je me lève, je me heurte à un quelque chose qui ne devrait pas être là. Je me replie précipitamment vers mon lit. Ce n'est pas une bonne idée. Il faut en avoir le coeur net. Je me relève, j'explore ce qui est là. Il y a : moi et ce que je suis (mystère complet, surprise complète, qu'est-ce que “ça” va encore inventer ? .... “je”! qui es-tu?) Il y a : l'autre. Là, un mur. Je m'adresse à lui. Il ne comprend pas, n'écoute pas, suit ses pensées, répond par politesse, est ailleurs, croit que le monde tourne autour de lui, dit la vérité, sollicite ma réponse, ne supporte pas ma réponse (ce qui compte apparemment pour lui, c'est qu'il détienne la vérité, voilà la grande question, l'angoisse peut-être, la parole qu'il risque est la vérité, oui, mais c'est quoi cette vérité qui supplie pour une “réponse ” ? voilà peut-être la clé de la relation humaine ? la clé de l'agressivité ? du manque, de la souffrance ? cela me fait penser à la prière chez les chrétiens). Il y a : la communauté dite nationale. Un mur également. Cela parle là aussi et cela montre là encore une suffisance qui demande qu'on la confirme. Il y a là aussi un fil de pensée qui suit son cours. Cela me fait penser à la dictée de hier soir. Sous la véranda, dans la douce chaleur emmagasinée pendant le jour, sous un ciel étoilé, Minouch, notre maîtresse avec ses tresses et une voix profonde, nous a dicté ce texte : Voici le titre : L'enfant. Le fleuve apparut à l'enfant comme un être inexplicable, mais combien plus puissant que tous ceux qu'il connaissait. Christophe se pencha pour mieux voir. Où allait-il ? Que voulait-il ? Il avait l'air sûr de son chemin... Rien ne pouvait l'arrêter. A quelque heure que ce fût du jour ou de la nuit, pluie ou soleil au ciel, joie ou chagrin dans la maison, il continuait de passer ; et l'on sentait que tout lui était égal, qu'il n'avait jamais de peine et qu'il jouissait de sa force. Quelle joie d'être comme lui, de courir à travers les prairies, les branches de saules, les petits cailloux brillants, le sable grésillant, et de ne se soucier de rien, de n'être gêné par rien, d'être libre ! R. ROLLAND, re Jean-Christophe n. Editions Albin Michel.
-
Quelle histoire est celle de ce virus ? Il dépend d'un animal, il dépend des hommes qui mangent cet animal. Or les hommes mangent cet animal depuis des millénaires. Et le virus était sans histoire. Il a dû muter, déclencher des pneumonies au lieu des petits rhumes qui circulent sur la planète dans les avions gros porteurs d'hommes et de leurs virus. Ce qui est le plus compliqué à se représenter, ce n'est pas le virus, c'est le fait que les hommes puissent être un jour à Pékin, le lendemain à Moscou. Cette histoire est celle du libéralisme, autrement dit celle de l'idée de principe. Qu'une règle puisse être “créée” et que l'homme en soit le principe, voilà qui pour nous est normal. L'homme se règle. On voit pourtant ce que cette idée a de délirant. Elle ne peut avoir de réalité effective. Dans les faits, les hommes apprennent les règles et les suivent bon gré, mal gré. On a donc une idée de nous-mêmes comme créateurs de nous-mêmes tout en sachant qu'il n'en est rien. Cela produit des effets : nous revendiquons des droits conformes à la haute idée que nous avons de nous-mêmes. C'est le démarrage de l'économie de masse, de la politique communicante et au service de chacun : le mythe de la toute puissance, le mythe du souverain est maintenu, après voir été situé dans le dieu de la Génèse, puis dans la personne du roi, puis dans le peuple, le voici dans l'individu quelconque, un jour ici, l'autre là, libre de faire ce que bon lui semble.