Le facteur est passé ce matin, il a klaxonné, c'est donc un recommandé.

Tandis que mon chien aboye je signe l' avis sous le regard du préposé. Un bref salut, il continue sa tournée.

J'ouvre le courrier recommandé dans la cuisine. Je me doute du contenu...

C'est la merde ! Je suis convoqué à une audience au tribunal d'instance: le requéreur m'a bien niqué.Je ne pensais pas que ce serait si rapide.

Tout s'éffondre autour de moi. J'ai un sentiment horrible de déjà vécu des années auparavant.

Ca ne cesse pas!

Bien sur je vais me battre pour être crédible devant le juge qui préfèrera sans doute les arguments de l'avocat du requérant, sûr de ses effets puisqu'il représente une banque au logo rouge et noir, et qui ,de plus, doit bien connaitre son affaire.

C'est ma dernière ligne droite avant le désert qui m'attend aprés la décision du juge.

Alors, autant faire ce dernier match en mettant les chances de mon côté et en préparant au mieux mon argumentaire.

Je suis soulagé parce que d'une façon ou d'une autre mes emmerdes vont prendre fin.

Soulagé aussi parce que depuis plus de trente ans je vis avec des boîtes aux lettres chargées de courriers de relances, de commandements de payer, des lettres de menaces d'agences de recouvrement et d'huissiers, auxquels je donne toujours suite. Sans compter les innombrables coups de téléphone façon harcélement.

J'ai toujours réglé mes dettes même si cela a prit du temps. Mais là, on dirait que la banque veut récupérer son argent et les inrérêts de suite. Comme si un petit gars comme moi pouvait du jour au lendemain s'acquitter d'une dette de plus de sept mille euros!

Soulagé parce que je suis comme un vieux boxeur qui attend le gong final de son ultime combat pour rejoindre son coin où personne ne l'attend plus, sans même écouter la décision des juges, quitter le ring, aller au vestiaire une dernière fois, et s'enfoncer dans la nuit.

Le soleil se lèvera demain et mes journées rseront froides. J'entendrai les gens vivre mais ils ne me verront plus, ils ne m'entendront plus.

Alors,

J'entrerai dans le désert du peu qu'il me restera à vivre. Mes chiens et moi nous nous tiendrons compagnie.

Je verrai une dernière fois le soleil se lever, je montrerai ça à mes chiens. Personne ne cherchera nos ossements. Personne ne nous cherchera d'ailleurs !

Le soleil ne se lèvera plus .

Slootie . "Expérience" le 03/02/2012.