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satinvelours

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Tout ce qui a été posté par satinvelours

  1. « Il faudrait avoir le courage ou l’audace ou la prétention de dire ce que chacune de ces lignes nous suggère... » Nous ne le pouvons pas. En revanche ce que nous pouvons c’est essayer de ressentir la résonance de ces vers et d’essayer d’expliquer ce qui se passe en nous à ce moment-là.
  2. Je reprends le sujet. Je l’avais ababdonné, Beckett est un écrivain très difficile à décrypter, mais je n’aime pas laisser inachevé un travail que j’ai entrepris. Je continue donc Beckett. Le roman–Molloy–se présente comme un discours comme si le personnage narrateur répondait à un questionnement du lecteur qui, lui, a cessé de se poser des questions puisque l’effet premier pour le lecteur est la complexité. En dehors de l’effet d’humour que peut susciter ce texte, ce qui est symptomatique c’est l’impossibilité de dire quelque chose qui soit certifiable. Ce qui peut échapper de sa parole ne lui appartient pas. Deux vertiges sont pensés par Beckett et sa génération : –le vertige de la psychanalyse (Beckett a entamé une psychanalyse avant son arrivée en France, il a beaucoup lu Jung) –le vertige d’un « je » qui ne peut pas retrouver sa propre origine, savoir ce qui lui appartient en propre parce qu’il est d’emblée nourri par un langage, le langage de la culture dans laquelle il naît , qui est un langage culturellement et idéologiquement marqué. Dès que « je » parle, quelque chose parle en moi qui n’est pas moi. C’est soit l’inconscient, soit ce qui renvoie à ce pensum appris et oublié, et que l’on ne peut que combiner. On combinera à partir de brides que l’on croit être à nous mais qui ne le sont pas. La question devient un élément romanesque pittoresque. Elle devient une forme, un morceau décoratif dont on émaille les discours, mais n’aura aucune efficacité sur le plan de la pensée. Ce qui reste de romanesque dans cette œuvre c’est cette attache aux souvenirs d’un moment où on pouvait penser, ou on s’avait penser, où il était pertinent de penser, où on croyait pouvoir penser, moment dont on est sorti. On sait qu’on ne peut plus penser. Dans « compagnie » je m’invente des questions pour meubler ma solitude, pour créer une compagnie. C’est un élément qui me permet de survivre, alors que je sais que je n’aurai pas de réponse. C’est une façon de ne pas rester seul, comme l’enfant tout seul dans le noir qui s’invente des histoires pour se tenir compagnie. La question n’a plus aucune pertinence sur le plan de la logique. Compagnie est un texte tardif de Beckett, postérieur à l’expérience dramatique, postérieur à « Not I ».
  3. satinvelours

    Concept et Idée

    En quoi l’idée est différente ? L’idée est moins instrumentale parce qu’elle m’arrache à l’expérience. Le concept est un instrument qui me permet pour moi-même de nommer l’expérience que je fais, de la ressaisir, de la faire mienne et la faisant mienne de pouvoir la communiquer à autrui. L’idée a comme assise le concept et comme le dirait Kant ouvre le concept. L’idée va au-delà de l’expérience. Elle s’appuie, s’enracine dans l’expérience et sa seule mission est de rendre intelligible pour nous les expériences que nous faisons. Les concepts sont des clés qui nous permettent d’ouvrir ces serrures logiques qui nous permettent d’accéder à la réalité avec l’idée que la limite de l’opérativité du concept c’est la réalité elle-même. L’idée est beaucoup plus transcendante dans son essence puisqu’elle part du concept, donc il y a une partie commune concept–idée. Et là où la différence va se signaler à nous c’est que par définition l’idée ne s’arrête pas là où s’arrête l’expérience. Il n’y a pas de concept de Dieu, il n’y a pas de concept d’âme. Voilà des choses qui ne sont que des idées, c’est-à-dire que je m’en fais une représentation mentale. Je peux définir Dieu c’est vrai, du moins je tente, mais en même temps aucune expérience jamais ne peut venir valider ou invalider la définition que je donne. Quand on peut se représenter mentalement quelque chose et que de l’autre côté on ne peut étayer définitivement et radicalement cette définition par le recours de l’expérience, je n’ai plus strictement affaire à un concept mais ce qu’en philosophie classique les philosophes continuent d’appeler l’idée.
  4. satinvelours

    Concept et Idée

    Donc synthèse de nos intuitions, de nos impressions sensibles qui, sans le détour du concept resteraient une sorte de fatras non représentable. Et d'un autre côté comme le concept est borné par l’expérience il ne nous permet pas de comprendre l’expérience à laquelle nous avons affaire, il ne rend pas compte de la réalité humaine dans son ensemble. La réalité humaine a autant besoin de cette expérience qui est la nôtre que de sortir de cette expérience « l’homme est un animal métaphysique » Schopenhauer. Il veut dire que personne ne peut se satisfaire définitivement de l’expérience. Nous posons la question de l’homme, de son immortalité qu’elles que soient les réponses que nous allons nous donner, mais nous formulons ces questions. L’immortalité de l’âme, la question de la liberté, la question de Dieu qui nécessairement se posent à tout être humain en tant qu’humain sont des objets transcendant c’est-à-dire qui dépassent l’expérience. Or là ce n’est plus le concept qui peut m’aider puisque je n’ai aucune expérience à ma disposition qui va me permettre de vérifier la justesse de mon concept. Là je passe à l’idée, c’est-à-dire l’idée est toujours au-delà du concept.
  5. 3. La voie de l’analogie : voie intermédiaire. Voie où l’on retrouve le problème du nom de Dieu et où St Thomas dit si nous voulons aimer Dieu, lui rendre grâce de ce qu’il nous a donné, à commencer par la vie, l’existence, soit nous nous contentons de crédulité grossière et aveugle et finalement pourquoi ce Dieu plutôt que n’importe quelles divinités archaïques. On retombe dans toutes les croyances que l’histoire de l’humanité déploie. Ce n’est bien sûr pas la voie d’un théologien. La voie de l’analogie qui est la voie thomiste par excellence, est la voie qui postule la nécessité d’une communauté de noms, permettant de parler de Dieu, d’évoquer Dieu et donc de prier, étant entendu que de la même façon que le terme analogie met l’accent sur l’idée d’un rapport de ressemblance qui existe entre deux choses, deux choses qui peuvent être de nature tout à fait différente. Il y a analogie entre moteur de voiture et organisme vivant. Deux choses de nature radicalement différente : une chose animée, une chose inanimée. Cela dit il y a des rapports de ressemblance. L’analogie dit qu’il est possible de postuler un rapport de ressemblance entre deux entités qui par ailleurs peuvent être de nature hétérogène, donc de nature radicalement différente. La voie analogique va postuler l’existence d’un nombre de noms possibles permettant de désigner Dieu, de le faire exister dans nos discours, étant entendu qu’aucun nom ne saurait véritablement être adéquat à l’essence divine puisque Dieu excède tout effort de nomination et tout nom.
  6. 1. La voie de l’univocité : c’est l’anthropomorphisme naïf. C’est la première voie qu’a choisi une multitude de théologiens lorsqu’ils postulent qu’il n’y a pas de différence de nature entre l’entendement humain et l’entendement divin. Il y a juste une différence de degré. L’entendement divin est plus, mais la nature est la même. Donc forcément une connaissance de Dieu est possible. C’est la voix de l’univocité, entendement humain et entendement divin parlent d’une même voix, sauf que du côté de Dieu il y a un plus. Thomas a le plus grand des mépris pour cette voie. 2. La voie dite de l’équivocité : postule l’inverse. Entre l’entendement humain et l’entendement divin il y a une distance abyssale. L’un n’est même pas le reflet de l’autre, et dans ce cas-là aucune connaissance de Dieu, aucun discours sur Dieu n’est possible. C’est la ruine de toute la théologie en tant que telle. Cela ne peut être la voie choisie par Thomas.
  7. Tous les arbres toutes leurs branches toutes leurs feuilles L’herbe à la base des rochers et les maisons en masse Au loin la mer que ton œil baigne Ces images d’un jour après l’autre Les vices les vertus tellement imparfaits La transparence des passants dans les rues de hasard Et les passantes exaltées par tes recherches obstinées Tes idées fixes au cœur de plomb aux lèvres vierges Les vices les vertus tellement imparfaits La ressemblance des regards de permission avec les yeux que tu conquis La confusion des corps des lassitudes des ardeurs L’imitation des mots des attitudes des idées Les vices les vertus tellement imparfaits L’amour c’est l’homme inachevé. On a l’impression que ces états d’âme se révèlent par leurs symptômes physiques qui se répètent sans cesse au cours de l’existence ; on croirait pouvoir les compter. Ainsi, est-il plus juste d’affirmer qu’il y a dans la poésie d’Éluard une nuance ou une impression secondaire de l’abstrait.
  8. Je chante la grande joie de te chanter, La grande joie de t’avoir ou de ne pas t’avoir, La candeur de t’attendre, l’innocence de te connaître, Ô toi qui supprimes l’oubli, l’espoir et l’ignorance Qui supprimes l’absence et qui me mets au monde, Je chante pour chanter, je t’aime pour chanter Le mystère où l’amour me crée et se délivre. Tu es pure, tu es encore plus pure que moi-même. Le verbe chanter introduit une couleur vivante aux abstractions qui l’entourent. L’emploi du pluriel des noms abstraits réduit encore la portée de l’abstrait dans la poésie d’Éluard, la pluralité confère un caractère physique et plus déterminé aux abstractions.
  9. Dans le vocabulaire philosophique le concept est un terme qui induit l’idée logique. Le concept est ce terme générique qui me permet de rassembler, d’unifier, de synthétiser donc de rendre intelligible un divers sensible qui sans le détour du concept ne le serait pas. Arbre est un concept car dans la vie je ne croise jamais d’arbres. Ce que je croise ce sont des chênes, des boulots, des ormes, des saules, des sapins, des mélèzes bref je croise des essences particulières comme je croise des individus particuliers, jamais l’Homme. Je croise tel ou tel arbre, je ne croise pas l’Arbre. À partir du moment où dans l’évolution de l’espèce humaine nous nous arrachons progressivement à la nature et à ce qu’elle produit sur nous, nous commençons à fabriquer des concepts, et ces concepts vont nous permettre de rassembler un divers vécu, perçu, pour pouvoir n’en retenir que les caractéristiques communes et pouvoir identifier les choses au-delà des différences. Un sapin ne ressemble pas à chêne, mais au-delà des différences que je perçois bien, ces deux réalités partagent rn commun quelque chose fixé à tout jamais par le concept arbre Arbre. Le concept a quelque chose d’instrumental, de logique. C’est un instrument qui me permet de penser, de délimiter des coupures, dans une expérience de vie qui, elle, n’est qu’un flux ininterrompu de sensations. Le concept travaille dans le champ de l’expérience. C’est une clé qui ouvre une serrure laquelle ouvre une porte qui ne nous permet que d’accéder dans une pièce qui est borné par les murs constituant l’expérience. Le concept est quelque chose que nous construisons intellectuellement et qui nous permet de circuler dans ce que nous appelons l’expérience de façon à ressaisir, synthétiser, unifier les impression que forcément l’expérience sensible nous donne et au moyen de cette chose qui est unifiée nous permet de rendre intelligible l’expérience. Le concept ne permet pas d’excéder l’expérience le concept. Or nous avons besoin aussi d’excéder l’expérience. Par exemple la science travaille à partir de concepts et non d’idées. La science construit des concepts qui sont toujours bornés et bornés par le champ de l’expérience. Mais en philosophie un concept est quelque chose qui permet d’homogénéiser, de synthétiser.
  10. Je vais ouvrir un fil "Concept et Idée". il sera plus aisé de développer ce sujet.
  11. Je parle de te voir Je te sais vivante Il n’y a pas une goutte de nuit dans tes yeux Je vis dans une lumière exclusive la tienne. Il y a une vivante et heureuse harmonie de clarté et de mystère, de desserrement et de cohésion, de l’actuel et du passé. Le style s’accorde très bien à la fois à l’idéologie surréaliste et au désir d’exprimer une pensée intime et individuelle. C’est un langage concret qui reflète le monde perceptible par les sens. C’est le langage des réalités physiques, symboles visibles du sentiment et des idées. Dans son vocabulaire, c’est le substantif qui domine, je l’ai peut-être déjà mentionné. Le substantif est la seule partie du discours qui peut imposer directement et pleinement la présence et la substance des êtres et des choses. Eluard réduit par conséquent la portée du verbe et de l’adjectif.
  12. J’ai regardé devant moi Dans la foule je t’ai vue Parmi les blés je t’ai vue Sous un arbre je t’ai vue Au bout de tous mes voyages Au fond de tous mes tourments Au tournant de tous les rires Sortant de l’eau et du feu L’été l’hiver je t’ai vue Dans ma maison je t’ai vue Entre mes bras je t’ai vue Dans mes rêves je t’ai vue Je ne te quitterai plus. Les images surgissent spontanément du subconscient. L’association la plus vraie et la plus juste est celle qui est la plus lointaine. Ce rapprochement libre montre avec le plus d’efficacité le vrai fonctionnement de la pensée. C’est le règne de l’inattendu.
  13. La question leibnizienne pourquoi y a-t-il quelque chose plutôt que rien, pour un Grec n’a aucun sens. Platon nous montre que ce qui existe du point de vue des dieux, c’est ce non-temps que nous traduisons par éternité, et le temps n’est que le reflet mobile, car le temps est lié au mouvement, de ce non-temps.Cet aphorisme représente bien cette idée : attention de ne pas reprojeter de façon rétroactive nos propres catégories avec leurs limites sur Dieu, cette essence que je ne peux pas véritablement saisir. Ce que je suis obligé de percevoir dans l’ordre de la succession, et par ailleurs hors de la succession, qui est souligné par la discursivité du langage puisque quand je parle je suis obligé de dérouler mes phrases, et cela souligne l’aspect successif des choses. Pour comprendre l’un, je suis obligé de passer par le multiple, je suis obligé de fractionner l’unité première. Je suis obligé de casser cette unité en petits morceaux pour pouvoir m’approprier cette unité.Je ne peux pas intuitivement accéder à l’un. Je suis obligé de faire le détour par le multiple. Mais ce n’est pas parce que nous sommes assujettis au temps, à la succession et à l’analyse entre autre infligée par la discursivité du langage que forcément les choses sont comme cela. St Thomas va bien souligner que pour Dieu il n’en n’est rien. Dieu voit toutes choses aussi bien dans son présent divin, aussi bien dans l’ordre du passé que l’ordre du futur, puisque ces catégories sont des catégories inadéquates, imparfaites qui ne conviennent pas à son intelligence. Donc simplicité de Dieu, pas de limites propres qui renvoient à notre entendement humain, qui nous fait séparer, diviser, décomposer, analyser puisque nous sommes des êtres de composition.D’où l’idée thomiste, faire de la théologie, c’est travailler le langage de telle façon qu’il puisse un peu s’élever vers cet objet transcendant qu’est Dieu et ne pas, par un anthropomorphisme naïf, rabaisser Dieu pour vouloir absolument le faire rentrer dans nos propres catégories. D’où les trois voies possibles chez Thomas. A la question fondamentale de la théologie : Comment une connaissance de Dieu est-elle possible ? Dans quel sens peut-on comprendre que Dieu existe ? Trois voies sont possible : deux sont léguées par la tradition et vont être rejetées par St Thomas comme étant inadéquates, la troisième étant originale et qu’il va proposer.
  14. Ce sont deux trajectoires différentes, l’une circulaire puisqu’il n’y a ni commencement ni fin, l’autre linéaire, il y a un commencement créé par Dieu mais il ne peut y avoir de fin.
  15. Je te le dis, gracieuse et lumineuse, Ta nudité lèche mes yeux d’enfant. Et c’est l’extase des chasseurs heureux D’avoir fait croître un gibier transparent Qui se dilate en un vase sans eau Comme une graine à l’ombre d’un caillou. Je te vois nue, arabesque nouée, Aiguille molle à chaque tour d’horloge, Soleil étalé au long d’une journée, Rayons tressés, nattes de mes plaisirs. C’est un poète qui glorifie le corps féminin. Le vocabulaire simple et concret est centré sur la femme et la nature. Les images assimilent la femme au principe de lumière et fluidité. C’est la femme, essence même de la fécondité qui s’identifie avec la nature dans un univers où tout est limpide.
  16. Pourquoi sans puissance ? Parce que si l’on conférait de la puissance, au sens aristotélicien, à Dieu cela voudrait dire que Dieu n’est pas toujours en acte, et c’est toute la notion même de création qui se trouve menacée. Pour être cohérent St Thomas est obligé de dire que c’est un être sans puissance, non pas sans pouvoir, mais puissance reliée à acte chez Aristote. C’est un être sans puissance, c’est un être sans forme, chez les Grecs la forme est ce qui nous limite, et donner une forme à Dieu ce serait précisément le limiter.C’est donc un être absolument simple ce qui signifie pour St Thomas que, contrairement à toutes les autres choses, exister pour Dieu ne veut pas dire être une substance qui ensuite recevrait une pluralité de prédicats. On ne peut pas dire qu’il y a une substance Dieu qui recevrait comme prédicat la bonté, la toute puissance, l’ubiquité, l’omniscience, toutes les qualités que l’on a coutume de reconnaître à Dieu, mais il est l’ensemble de ces qualités ou de ces prédicats.On doit à St Thomas une idée très féconde que l’on trouve chez les grecs mais insuffisamment développée, qui va prendre toute son ampleur au sein du christianisme, à savoir l’idée qui consiste à nous faire comprendre que l’entendement humain par sa propre limitation, par son imperfection précisément est obligé de concevoir dans le temps, c’est-à-dire dans la succession, de découper, d’analyser l’entendement divin. Lui le conçoit dans l’éternité, dans le non-temps.Platon disait déjà « Le temps est l’image mobile de l’éternité » Timée. Dialogue très difficile où il est question de cosmologie, comment le cosmos a été fabriqué par les dieux. Quand les dieux fabriquent le cosmos il faut qu’ils fabriquent le temps. L’idée importante est que ce qui existe à l’origine, c’est du non-temps, un présent éternel.Le non-temps évidemment n’a pas le même sens pour un Grec que pour un chrétien. La notion même de création donne l’idée d’origine. Pour les grecs il n’y a pas de commencement du monde. Quand les grecs disent le monde est éternel, ce n’est pas du tout dans un sens chrétien. Quand nous disons (tradition judéo-chrétienne) le monde est éternel cela veut dire qu’il a été créé par Dieu, il a donc forcément un début, mais il n’aura pas de fin. Nous menons notre existence terrestre, l’humanité est programmée pour durer un certain temps. Ce n’est qu’un petit bout de ce temps qui s’est mis à exister à partir de ce temps zéro qu’est la création, mais ensuite nous attendent des réjouissances et nous entrons dans cette éternité quelques soient les modalités sous lesquelles nous la livrons. Pour un grec l’idée est qu’il n’y a ni commencement ni fin. S’il n’y a pas de fin, il n’y a pas de commencement, le monde a toujours été présent, sous des formes différentes. Il y a toujours eu quelque chose.
  17. Elle est debout sur mes paupières Et ses cheveux sont dans les miens, Elle a la forme de mes mains, Elle a la couleur de mes yeux, Elle s’engloutit dans mon ombre Comme une pierre sur le ciel. Elle a toujours les yeux ouverts Et ne me laisse pas dormir. Ses rêves en pleine lumière Font s’évaporer les soleils Me font rire, pleurer et rire Parler sans avoir rien à dire. La femme est son ressort poétique, Eluard donne à la poésie le pouvoir de recréer la joie de l’amour physique. Le monde réel et la femme dépendent d’abord du regard. On le voit bien dans le poème ci-dessus.
  18. Je suis tombé de ma fureur, la fatigue me défigure, mais je vous aperçois encore, femmes bruyantes, étoiles muettes, je vous apercevrai toujours. Et toi, le sang des astres coule en toi, leur lumière te soutient. Sur les fleurs tu te dresses avec les fleurs, sur les pierres avec les pierres. Blanche étreinte des souvenirs, étalée, étoilée, rayonnante de tes larmes qui fuient. Je suis perdu. La lumière réduit l’obscurité, rend tout transparent. Eluard cherche à réduire la noirceur des choses : tout devient limpide. La femme s’offre comme exemple parfait de cette union entre l’homme et la clarté. Elle devient aussi claire et limpide que le monde dans lequel elle vit, suggérant ainsi un état de réceptivité, de liberté et d’ouverture sur le monde qui l’entoure.
  19. Le front aux vitres comme font les veilleurs de chagrin Ciel dont j’ai dépassé la nuit Plaines toutes petites dans mes mains ouvertes Dans leur double horizon inerte indifférent Le front aux vitres comme font les veilleurs de chagrin Je te cherche par delà l’attente Par-delà moi-même Et je ne sais plus tant je t’aime Lequel de nous deux est absent. Il faut préciser cependant au sujet du sens de l’amour, que l’amour pour lui se définit par son accomplissement physique. Il n’y a aucun amour platonique chez Eluard, on le voit bien dans sa poésie par l’abondance de références au corps de la femme et aux gestes amoureux.
  20. Mon amour pour avoir figurer mes désirsMis tes lèvres au ciel de tes mots comme un astreTes baisers dans la nuit vivanteEt le sillage de tes bras autour de moiComme une flamme en signe de conquêteMes rêves sont au monde Clairs et perpétuels. Et quand tu n’es pas là Je rêve que je dors je rêve que je rêve. C’est le poète de l’amour, celui qui chante la femme, celui qui éterniseses i stands amoureux, ses émotions amoureuses dans le langage, dans la poésie. S’il s’inscrit bien dans le mouvement surréaliste, il ne perd pas pour autant sa propre individualité. Les images lui sont propres, il reste toujours fidèle à son inspiration à travers les orages du surréalisme.
  21. Le brouillard mêle sa lumière A la verdure des ténèbres Toi tu mêles ta chair tiède A mes désirs acharnés.
  22. A toutes brides toi dont le fantôme Piaffe la nuit sur un violon Viens régner dans les bois Les verges de l’ouragan Cherchent leur chemin par chez toi Tu n’es pas de celles Dont on invente les désirs Tes soifs sont plus contradictoires Que des noyées Viens boire un baiser par ici Cède au feu qui te désespère. Par les métaphores les plus frappantes, il y a une approche de la réalité.
  23. Inconnue elle était ma forme préférée Celle qui m’enlevait le souci d’être un homme Et je la vois et je la perds et je subis Ma douleur, comme un peu de soleil dans l’eau froide.
  24. Les bracelets d’un baiser autour d’un bras interminable La rosace de l’ivresse à la pointe d’un sein Les remous des regards ne me font pas peur J’embrasse avec ferveur la chair des arbres sous leurs écorces Je cherche dans la terre la flamme de la pluie Les agates de la chaleur Les plus petites graines du soleil d’hiver A l’odeur de cendre et couleur de lys L'union des images de l'eau et du feu est récurrent chez Eluard.
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