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Quelque chose qui me tient à coeur - Des maux sans mots


Charlie_C

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Charlie_C Membre 16 messages
Baby Forumeur‚
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Salut à tous ! :)

J'écris depuis bien longtemps déjà, des textes, des poèmes, mais j'ai décidé de passer à la vitesse supérieur ! Bien que j'ai déjà écrit quelques petits récits, j'ai eu envie d'écrire quelque chose de plus grand, de mieux, et de m'y tenir ! Je vous fait donc part du premier chapitre de ma petite histoire, j'espère que ça vous plaira, et surtout que ça en intéressera. N'hésitez surtout pas à me donner votre avis, qu'il soit positif ou non, c'est vraiment ce que je cherche.

Merci. :)

-------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

C'est comme ça que tout a commencé.

Je voulais que les gens remarquent.

J'ai cessé de manger.

Ils seraient donc alertés.

Se poseraient des questions.

Essaieraient de comprendre.

Ce sera dur. Mais ils finiront par y arriver.

Je vais leur montrer.

Sans leur parler.

1

J'attends dans la salle d'attente. Il n'y a personne, je suis la prochaine. Je n'ai même pas un peu de temps pour paniquer. Je ne sais pas ce qu'elle va m'annoncer cette fois-ci. Surprise. J'entends la porte s'ouvrir. La dame qui en sort rit. Les gens sont toujours heureux quand ils sortent de chez le médecin; "Vous avez la grippe. -Mais quelle bonne nouvelle !". Déprimant.

Mon coeur accélère, je sais que je vais devoir me lever. Je patiente jusqu'à la dernière minute. Je serai prête à partir en courant, je l'ai déjà fait.

Sur le pas de la porte, le docteur est là et me sourit. Cette femme est toujours de bonne humeur, quelles que soient les circonstances, quoi qu'elle vous dise. "Mademoiselle, c'est à vous." Je ne comprends toujours pas pourquoi elle me vouvoie, après des mois de rendez-vous mensuels. J'entre donc malgré moi dans son fichu bureau.

Les murs blancs ne sont décorés que par une horloge. Son bureau est noyé dans la paperasse, je ne vois même pas son clavier. Des fleurs sont posées là où il y a de la place. Des fausses, de réelles fleurs seraient probablement mortes vues l'odeur d'hôpital qui règne ici. Je m'assois sur le siège dont il manque quasiment tout le tissu recouvrant la mousse. Je me sens mal à l'aise, tant par le bazar que par le simple fait d'être ici. Heureusement que c'est à peu près propre. Elle s'assoit, joint ses mains et me dit "Il faudrait peut-être que j'entame des rénovations." Vous croyez ?

"Comment allez-vous, mademoiselle ?"

Je ne dis rien. Elle attend une minute et comprend à mon regard que je ne suis pas décidée à lui répondre. Je ne lui parle que très rarement. Dans un instant, elle me demandera de me déshabiller, de me mettre sous le mettre puis sur la balance. Les rendez-vous se passent toujours comme ça. Je fais donc ma routine avant qu'elle n'ait ouvert la bouche.

"Un mètre soixante-quatre, vous avez pris un demi-centimètres depuis le mois dernier !" Pourquoi est-elle heureuse pour moi ? Parfois, je me dis qu'elle s'implique bien trop dans son travail.

En montant sur la balance, son expression est la même que les chiens attendant désespérément que de la nourriture tombe lors du repas. Je refuse de regarder le nombre qui s'affiche. Son visage s'assombrit, puis elle se ressaisit aussitôt. Je comprends alors que j'ai maigri. Mon visage s'éclaircit.

Elle prend ma tension -huit et demie- puis se rassoit derrière son bureau.

"Vous n'êtes pas en très bonne forme, mademoiselle. Il va falloir vous ressaisir ou vous serez hospitalisée".

Je ne dis rien. Elle me menace de m'interner depuis des mois, mais ne le fait jamais, alors je ne m'inquiète pas trop. Elle me dit ensuite qu'il faut vraiment que j'aille consulter un psychiatre, car cela pourrait m'aider à aller mieux. Finalement, elle me tend un papier. Je lis dessus les noms de deux médicaments encore inconnus. Pourquoi m'en donne -t-elle ? Des médicaments pour me faire grossir ? Je ne crois pas que cela existe.

"Il y a un médicament contre les angoisses et un pour la tension, j'ai longtemps hésité à te les prescrire, mais je pense que c'est une bonne chose".

Je sors de son cabinet aussi muette que quand j'y suis entrée. Elle m'a redonné un rendez-vous pour le mois prochain, auquel ma mère m'obligera encore à aller. Je ne sais vraiment pas à quoi ça me sert: je fais toujours en sorte de ne pas prendre de médicaments, je ne lui parle pas et elle ne m'aide pas.

En arrivant chez moi, ma mère est absente, comme à son habitude. Elle est avocate,

et travaille énormément. Elle se lève à cinq heures pour travailler sur des dossiers, puis part quelques heures après. Elle ne rentre qu'en début d'après-midi, quand elle n'oublie pas qu'elle a une maison. Elle est déjà arrivée plus tard, protestant une réunion de dernière minute. Je ne savais pas que les avocats avaient des réunions. De toute façon, ça ne change pas grand-chose ; quand elle rentre tôt, elle va directement se coucher. "L'idiotie des gens l'a fatiguée" .

Je vais dans ma chambre pour préparer mes affaires de demain. Je n'ai aucune envie d'aller au lycée. Les gens sont moqueurs et méchants, les cours sont ennuyeux et les profs chiants. Mais je n'ai pas le choix, je suis en première S et je dois prouver que je peux y arriver. Je travaille d'arrache-pied pour ne pas redoubler. Ma mère dit que je me mets trop la pression, alors que je sais que je pourrais faire bien plus si je n'étais pas aussi fatiguée. Il faut encore que je fasse mes maths. J'aimerais avoir fini avant qu'elle n'arrive, histoire qu'elle soit fière de mon travail. Je sais qu'elle ne me demandera pas comment s'est passé mon rendez-vous, le médecin l'appel dès que je ne peux plus l'entendre.

L'heure suivante, je finis mon devoir. Je suis exténuée, mais sais que je ne peux pas encore aller me reposer. J'entends la porte d'entrée s'ouvrir.

"Andréa ? Tu es rentrée ?"

Ne m'entendant pas, elle entre dans ma chambre.

"Tu as fini tes devoirs ?". Je pense intérieurement "bonjour, maman". Je lui tends ma feuille. "Bien, je vais me coucher", elle hésite un instant puis dit :

"Si tu veux manger ce soir, réveille-moi, je commanderais quelque chose", il y a une pointe de tristesse dans sa voix, elle sait que je ne la réveillerais pas.

Quand j'entends la porte de sa chambre se fermer, je sors. Nous avons un jardin tout juste assez grand pour laisser place à mon petit trampoline. Je l'adore, je suis toujours fichue dessus. J'ai l'impression de voler. Le médecin a dit à ma mère que cela avait été une très mauvaise idée de me l'acheter, ce serait pour moi un "autre moyen de m'éloigner du monde". Je pourrais passer des heures à sauter dans tous les sens, essayant toujours d'aller le plus haut possible. Parfois, j'essaie même de voir ma mère dormir au deuxième étage à travers sa fenêtre, mais mes jambes n'ont pas assez de force pour l'atteindre.

Vers dix-neuf heures, je décide de m'arrêter. Je cours jusqu'à ma chambre pour faire quelques abdos puis me remets au travail. Je décide finalement de me coucher vers vingt-et-une heure.

Je mets beaucoup de temps à m'endormir. Je repense à ma journée, à celle de demain. Ce que j'ai fais, ce que j'ai oublié de faire et surtout ce que je vais devoir faire. J'ai l'impression d'être surpassée, et paradoxalement de ne pas bouger.

Je finirai par m'endormir vers quatre heures du matin, pour me lever deux heures plus tard.

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  • 2 semaines après...
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Charlie_C Membre 16 messages
Baby Forumeur‚
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Personne ?... C'est si mauvais que ça ? x)

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Invité Tar Baby
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Invité Tar Baby
Invité Tar Baby Invités 0 message
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Pas du tout. C'est une fiction ou bien c'est autobiographique ?

J'attends la suite.

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Charlie_C Membre 16 messages
Baby Forumeur‚
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On va dire.. un peu des deux ! :) Je m'inspire de moi mais l'histoire en elle-même est inventée. :)

Voici la suite :

2

Quand je suis en classe, les gens me regardent comme un extraterrestre. Qui est cette fille maigre qui ne parle pas beaucoup ? Il paraît qu'elle est malade. Mais ils se trompent, je ne suis pas malade. Parfois ils viennent me voir, sûrement pour savoir si je suis capable de parler. Ils seraient bien étonnés de tout ce que je peux de dire. Je leur réponds mais n'engage pas la conversation, alors ils s'en vont. Une fois, une fille est restée. Elle m'a demandé mon prénom et si j'avais réussi le contrôle qui venait de se terminer. J'ai hoché la tête, elle a dû comprendre que c'était mon moyen de m'exprimer et est devenue mon amie. Enfin, je ne sais pas vraiment si quelqu'un à qui on ne parle pas peut être considéré comme son amie. Disons qu'elle me rejoint le matin devant le grillage, qu'elle reste avec moi pendant la récréation et qu'elle m'attend à la sortie des cours. Elle s'appelle Molly -heureusement que les profs font l'appel, où je ne l'aurais jamais su. Elle me raconte beaucoup de choses qu'elle ne dit pas forcément aux autres ; elle me l'a dit. C'est sûrement parce que je ne lui réponds pas et donc ne risque pas de la juger -du moins, pas à haute voix. Elle m'a aussi dit qu'elle espérait que je lui réponde un jour et l'aide autrement qu'en l'écoutant. J'ai été surprise, je ne pensais pas l'aider du tout. Peut-être que plus tard je lui ferais des phrases entières, quand on se connaîtra depuis plus de trois malheureux mois. Contrairement à d'autres, Molly ne m'a pas parlé comme si j'étais étrangère pendant très longtemps. Les gens pensent souvent que je ne suis pas française, ou handicapée. J'aimerais leur crier que je suis tout à fait lucide.

Les professeurs réagissent différemment. Certains ont vu dès le début que parler n'était pas mon truc, d'autres attendent encore que je leur crie que je sois présente quand ils m'appellent. Ils m'interrogent à coup sûr quand on peut répondre seulement par oui ou non, mais ne cherche pas à me questionner autrement, ils savent que c'est peine perdu. Les plus gentils me donnent une feuille en début de cours pour que je puisse leur écrire ce que je ne comprends pas, mais la feuille reste bien souvent vierge. J'assimile parfaitement leur cours, alors pour ne pas les offenser, je fais quelque exercice sur cette même feuille puis leur rend en fin de cours, histoire qu'ils ne croient pas que je ne veuille pas leur écrire.

Molly dit souvent qu'ils me préfèrent aux autres élèves, car ils font attention à mes moindres réactions. A-t-elle comprit ? Essaie-t-elle de nous dire quelque chose ? J'aimerais lui dire qu'ils espèrent seulement des faits qui n'arriveront jamais. Elle dit que s'ils ne me préféraient pas, ils me traiteraient comme une élève normale. Chose que je ne suis pas d'après elle, vu que je ne parle pas. Je crois bien qu'elle se trompe. Comment pourrait-on favoriser une élève qui ne vous dit ni bonjour, ni merci, qui ne répond pas à vos questions, qui finit les devoirs pour le lendemain dans l'heure (quelle idée de nous les donner en début de cours), qui ne pose pas son stylo quand il le faut et qui détourne les yeux dès qu'elle croise votre regard ? Moi j'appelle ça une élève insolente. Les profs ne me préfèrent pas, ils me détestent.

Il n'y a pas qu'eux qui me déteste d'ailleurs, un groupe d'élèves, ceux qui ne sont jamais venus me voir -c'est-à-dire les vingt-sept élèves de la classe restants, sur trente.

J'ai déjà entendu dire que j'étais une sale petite veinarde qui avait de bonnes notes, une fille complètement folle qui ne sait pas aligner deux mots, une intello, une malade, bref, une attardée, tous simplement. Molly m'a dit qu'un garçon avait été raconter que si j'avais quitté mon ancienne ville, c'était parce que j' "avais essayé tous les garçons du lycée" et m'a demandé si c'était vrai. Bien sûre ! Pourquoi avait-il dit ça ? J'étais énervée, intérieurement, bien sûr. Comment une personne que je ne connaissais pas pouvait se permettre de dire de telles choses. Quelqu'un qui ne m'avait jamais parlé ! J'étais sidérée. Pourquoi avait-il inventé ça ? Quel idiot. J'étais tellement triste et en colère que je ne suis pas venu pendant deux jours. Le médecin dit que je suis hypersensible, encore une autre de ses conneries.

Depuis ce jour, Molly ne m'a pas raconté d'autres commérages.

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Invité Tar Baby
Invités, Posté(e)
Invité Tar Baby
Invité Tar Baby Invités 0 message
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Je suis toujours là. ;)

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Charlie_C Membre 16 messages
Baby Forumeur‚
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Comment tu trouves la suite ? :)

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Invité Tar Baby
Invités, Posté(e)
Invité Tar Baby
Invité Tar Baby Invités 0 message
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Tu as piqué ma curiosité et j'ai envie de connaître le fin mot de l'histoire. ;)

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Charlie_C Membre 16 messages
Baby Forumeur‚
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Le fin mot sera pas pour tout de suite. XD

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Invité Tar Baby
Invités, Posté(e)
Invité Tar Baby
Invité Tar Baby Invités 0 message
Posté(e)

Mais je ne suis pas pressée.

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Membre, Posté(e)
Charlie_C Membre 16 messages
Baby Forumeur‚
Posté(e)

Voici la suite ! :)

3

En rentrant de cours, ma mère, qui est là pour une fois, cours vers moi en criant: "ANDREA ! Grâce au médecin, j'ai pu trouver une psychologue !"

Je me demande bien ce que ma mère peut trouver à ce médecin.

"Tu vas pouvoir lui parler et lui dire tout ce que tu as sur le coeur. Je sais qu'un psychiatre aurait été mieux, mais toutes celles que j'ai contactées étaient indisponibles, mais ne t'en fais pas ! Celle-ci a été très gentille au téléphone, nous avons rendez-vous la semaine prochaine, lundi à quinze heures ! J'espère vraiment que tu vas avancer grâce à cette femme."

Non. Je n'ai pas envie. Je n'ai pas envie de me retrouver face à une femme que je ne connais pas, à qui je devrais raconter ma vie. Je n'arrive déjà pas à parler à Molly, alors imaginez à une inconnue. Je n'ai pas envie d'aller à ce rendez-vous, de la voir. Je n'ai pas envie qu'elle m'aide. Je n'ai pas envie qu'elle me pose des tonnes de questions, ni lui parler de ce qui ne va pas. Je ne veux pas lui faire confiance comme il se doit, je ne veux pas. Je devrais lui raconter mon enfance et tout ce qui s'en suit et je n'ai vraiment pas envie de parler de ça, je n'en ai pas besoin. Qu'est-ce que ça pourrait bien lui faire, après tout ? Ce sont mes problèmes et je n'ai pas besoin d'aide. Tout va bien.

Je ne sais pas si ma mère espérait un cri de joie, mais elle semble déçue ; elle s'agenouille alors face à moi et me dit:

"je sais que tu ne veux pas parler, mais il le faut bien, ça fait presque un an maintenant et tu peux comprendre à quel point c'est dur pour moi..."

J'ai failli rire. Dur ? Pour elle ? Elle qui ne m'adresse pas un mot de la journée, puis qui va se coucher ? Elle qui ne s'occupe pas de moi ? Je suis bien étonnée d'ailleurs qu'elle m'est cherché une psy, sûrement une autre raison de ne pas me voir.

Oui, ma mère n'est pas une mère attentionnée qui vous fait un bisou avant de vous dire bonne nuit, elle n'a jamais été comme ça. Petite, elle me disait juste un au revoir de la main le soir, les peu de fois où elle n'était pas au lit avant moi. On ne se voyait pas de la journée et quand elle rentrait du travail, on mangeait, puis souvent, elle partait dans sa chambre. Comme une enfant. Les repas étaient animés par mon père et on rigolait bien; mais seulement mon père et moi. On pourrait croire que maintenant qu'il n'est plus là, nous nous sommes rapprochés, mais non. Mon père était comme la quatrième roue d'une voiture. Sans cette roue, la voiture n'avance pas. C'est ce qui se passe avec ma mère.

Je pars dans ma chambre sans dire un mot, quelle menteuse.

Malheureusement, je suis pourtant bien obligé de retourner dans le salon, car j'ai besoin de l'ordinateur pour le devoir de science. Je suis étonnée de voir ma mère dans la cuisine, en train de cuisiner. Oui, ma mère, la mienne, en train de cuisiner. Ca ne lui est pas arrivée depuis...toujours, en fait. Ma mère n'a jamais fait à manger, c'est toujours mon père qui le faisait, elle était bien trop fatiguée. Peu de temps après sa disparition, elle commandait à manger, puis ensuite elle achetait des plats tout faits et enfin, elle n'a plus rien fait. Elle me disait toujours "Tu te feras quelque chose, d'accord ? Je crois qu'il y a un steak dans le congélateur, je vais me coucher". Alors, au début, je me faisais ses steaks puis à force, j'ai fini par en avoir marre de manger seule, alors je ne mangeais plus.

Ma mère sort, fière d'elle, un plat à la main. La table est mise.

"A table !"

Je la regarde, étonnée. La table est mise. Miracle. Je m'assois, curieuse de voir ce qu'elle a fait.

"J'espère que ça va te plaire, une collègue m'a donné la recette"

Bon, ok, ce ne sont que des spaghettis bolognais et elle a eu besoin d'une recette, mais c'est déjà ça.

"J'espère que tu as faim".

Je m'assois au bout de la table; non, je n'ai pas faim. Elle me met une flanqué de pâtes dans mon assiette. J'attends qu'elle détourne le regard pour me mettre à mastiquer pour de faux, mais elle me regarde avec insistance.

"Alors ? ? ? Goûte !".

Elle sait. Elle sait parfaitement que je ne veux pas manger, que je n'ai pas faim. Elle le fait exprès pour me mettre mal à l'aise, pour me faire du mal. Alors, je me prépare. Je sépare mes pâtes en deux parties. Je coupe la première partie en minuscules morceaux et laisse l'autre tranquille. Je prends une bouchée timidement. J'avais presque oublié comment me servir des couverts. Ma mère attend. Etonnamment, c'est presque bon. La viande n'est pas assez cuite, à mon avis. Du moins, de ce que je me rappelle du goût de la viande.

"Alors ? !"

Je fais un effort pour avaler, puis pour ouvrir la bouche.

"C'est bon, merci"

Ma mère fait de grands yeux et émet un grand sourire. Je ne sais pas si elle était heureuse parce que je lui ai dit que son plat était bon ou parce que j'avais parlé. Ma mère n'avait pas entendu ma voix depuis des jours. Peut-être même depuis plusieurs semaines. Elle finit par aller chercher un verre d'eau, j'en profite pour remettre ma deuxième partie de pâtes dans le plat, et donner le reste à la chienne.

Cracotte est une Samoyède. Je ne sais pas comment on a pu donner un nom si moche à une race si belle. Je l'ai eu à la rentrée alors c'est encore un bébé, elle a six mois. Elle ressemble vraiment à une peluche, avec de longs poils blancs et de petits yeux bridés. Ca m'est déjà arrivée qu'on me demande de la prendre en photo dans la rue. Ma mère dit que ce genre de chien ne sert à rien à part à prendre de la place. Quand elle sera grande, elle fera environ cinquante-quatre cm pour vingt-deux kg. Elle dit aussi que si je continue à faire ma tête de mule, elle sera plus grosse que moi.

J'essaie de lui apprendre quelque tour tel qu'assit et pas bouger. Ensuite, j'essaierai de lui apprendre à ne pas tirer, car j'ai toujours peur de la lâcher quand je la sors. Un jour, je demanderai à ma mère si ce serait possible de l'emmener dans un centre pour l'éduquer, car j'ai peur de ne pas avoir assez de force plus tard pour la promener et ne comptez pas sur ma mère pour la sortir à ma place.

Je suis sûre que Cracotte est super-intelligente en plus, elle aboie quand quelqu'un fait du bruit dans la rue le soir, elle fait ses besoins dans les caniveaux sans même lui avoir appris et un jour, elle a aboyé jusqu'à ce que ma mère vienne me voir car j'étais tombée.

Ma mère est très étonnée de voir que je n'ai plus rien dans mon assiette en revenant de la cuisine, mais je sais qu'elle se doute que la nourriture n'est pas dans mon ventre. Je quitte la table quelques instants après pour faire mes deux heures sports habituel.

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Nouveau, Posté(e)
Arnaudettes Nouveau 1 message
Baby Forumeur‚
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J'aime beaucoup ton texte. Il parle de sentiments, d'états d'âme, de pensées simples du quotidien, pas toujours faciles à faire partager par l'écriture je pense. Il décrit bien les situations, les décors et leurs implications sur l'état d'esprit de la narratrice. Je ne suis plus ado mais j'éprouve une compréhension, une empathie avec ce personnage. C'est tout l'intérêt, non ?

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Charlie_C Membre 16 messages
Baby Forumeur‚
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Exactement, merci beaucoup, vraiment. :)

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tattoopourplaire Nouveau 1 message
Baby Forumeur‚
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ce que tu dis du lycée, et surtout des autres élèves, me rappelle vraiment ce que j'y vivais à l'époque...

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Charlie_C Membre 16 messages
Baby Forumeur‚
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Ha oui ? Je pensais beaucoup exagérer pourtant.

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  • 2 semaines après...
Membre, Posté(e)
Charlie_C Membre 16 messages
Baby Forumeur‚
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Chapitre 4 !

4

La semaine suit son cours, je continue de réviser comme une malade, de m'agiter dans tous les sens et je n'ai plus dit un mot depuis le super dîné de ma mère. Lundi, c'est la catastrophe. Je ne dors presque pas, me lève quatre fois et me réveil donc en retard: je n'entends même pas mon téléphone sonner. Je me dépêche sans pour autant supprimer ma séance d'abdos matinale, ce qui me rend encore plus en retard et me fais paniquer, ceci me provoquera une crise d'angoisse et un léger malaise.

Ca m'arrive quelquefois les crises d'angoisse et les malaises. Quand je suis très stressée et paniquée, que j'ai très peur ou que j'appréhende beaucoup certaines choses, il m'arrive de faire des crises. J'en fais aussi la nuit en me réveillant en sursaut ou quand je suis très triste. Bien sûr ma mère ne vient pas dans ces moments-là, je crois même qu'elle fait semblant de ne pas m'entendre pour ne pas se lever. Vous comprenez, il ne faut pas perturber son sommeil.

En ce qui concerne les malaises, ceux là arrivent moins souvent. Parfois quand je décide soudainement de manger quelque chose, mon corps ne comprend pas et à un coup de mou. Quand j'oublie de manger pendant trop longtemps, aussi. Je ne vous dirait pas comment ma mère réagit dans ces cas-là, vous devez vous en douter.

Je finis finalement par aller au lycée l'après-midi. En m'apercevant, Molly court vers moi pour me demander ce que j'avais. Je regarde autour de moi pour voir s'il y a du monde. Deux gars de la classe.

"Je ne me sentais pas bien.

- C'est-à-dire ?

- ...

- Tu peux me parler, tu sais.

Oui, je le sais, j'en ai envie, mais je n'y arrive pas. Parfois, j'aimerais parler. Crier. Dire ce que j'ai sur le coeur. Il m'arrive de me dire "Aujourd'hui, je dois dire trois phrases", mais je n'y arrive jamais. Je me prépare, me force et fait tout mon possible, mais les mots ne sortent pas. Au départ quand j'ai arrêté de parler il y avait une part de volonté. Je voulais me taire pour ne pas me faire remarquer mais petit à petit je n'arrivais tout simplement plus à parler. J'ai beau essayer, même seule, les mots ne sortent que très rarement. Quand je me force beaucoup j'arrive à dire quelques phrases. Aujourd'hui avec Molly, c'est très dur mais j'y arrive et j'en suis presque fière. Je prends mon courage à deux mains et lui fait une phrase. Une LONGUE phrase. Je lui raconte les événements du matin en omettant le passage des abdos.

- Comment se fait-il que tu ne dormes pas ?

- Je pense.

- A quoi ?

A la nourriture. La nourriture m'obsède. Avec les cours et le sport. Je veux être parfaite. La meilleure. Mais je ne veux pas le lui dire alors je ne réponds pas. Je ne veux pas qu'elle sache. Je veux que personne ne sache ce que je suis. Ce que j'ai fait.

J'entends un des gars pas loin dire haut et fort "La muette a retrouvé la voix !", d'autres se rapprochent et ajoutent "Sérieux ?" "Elle a parlé ?!" "Qu'est ce qu'elle a dit ??", une fille vient me voir pour me demander comme un paparazzi. Molly les repousse et leur dit d'aller faire chier quelqu'un d'autre. Elle est vraiment gentille, j'aimerais plus que tout vouloir lui dire tout ce que je pense et à quel point elle est sympa. Je sais qu'elle reste avec moi parce que je suis seule mais qu'au fond elle aimerait aller avec les autres: cela lui éviterait bien des critiques. Un jour elle m'a dit qu'elle m'avait remarqué dès la rentrée et j'avoue avoir été surprise: elle ne m'a parlé qu'un mois après.

Je quitte le lycée plus tôt pour rejoindre ma mère à quinze heures chez la psymachin. J'y vais à reculons, appréhendant beaucoup ce qui va se passer. Je n'ai pas envie de parler à cette dame, je n'ai rien à lui dire. J'ai vu sur l'internet qu'au premier rendez-vous, les psys posaient surtout des questions aux parents pour avoir des informations sur notre enfance. Je me demande bien ce que ma mère va dire. La vérité ? Forcément. Mais est-ce qu'elle va tout dire ? D'un côté je l'espère, car j'entendrai de sa propre bouche ce qu'elle pense d'elle-même, ça montrerait aussi qu'elle est consciente de ce qu'elle m'a/me fait subir, mais d'un autre... Je n'ai pas envie d'entendre toutes ces choses. Ces choses qui me font mal.

En arrivant au rendez-vous, je vois ma mère qui attend dehors, assise en face d'une petite table devant la porte d'un immeuble. Je me rends compte alors qu'il n'y a pas de salle d'attente et qu'on doit attendre dehors. Ma mère a ramené de la paperasse de son boulot jusqu'ici. Je me disais bien que c'était trop beau . Elle ne prend même pas la peine de lever la tête lorsque je m'assois à côté d'elle.

Le froid me gèle. Mes mains sont raides. Si j'enlevais mes gants, je verrais qu'elles sont mauves. Je mets pourtant plusieurs couches de vêtements: débardeur qui ne laisse pas passer le froid, t-shirt à manches courtes, à manches longues, polaire, gilet, pull...un vrai esquimau. Il doit faire cinq degrés en ce mois de janvier.

Après dix minutes d'attente dans le silence le plus total, ma mère n'ayant pas levé une seule fois les yeux de ses papiers, la psymachin ouvre la porte de son appartement et m'appelle "Mademoiselle Len ?" Ma mère sursaute puis se lève d'un bond pour saluer la dame ; moi, je me contente de la regarder.

Elle est petite, un mètre cinquante-cinq, tout au plus. Elle doit avoir la quarantaine. Je crois qu'elle est de corpulence moyenne ; parce qu'on ne peut pas dire que ma vision de ces choses-là soit objective. Elle a une petite voix et paraît assez gentille. Je me détends. Elle est bien habillée: une jupe mi-longue, un chemisier blanc, un collant et des chaussures noirs. Ses cheveux sont bruns et lâchés. Elle porte un petit collier avec un pendentif qui représente la lettre A.

Anaëlle ? Anabelle ? Anaïs ?

Le bureau dans lequel nous sommes accueillit est en fait la première salle dans laquelle nous entrons. C'est une petite pièce avec un fauteuil et un canapé. Sur le côté se trouve un bureau en désordre, emplit de feuilles, de pots à stylos, d'un téléphone et de dossier. Je m'imagine que chaque dossier est pour un patient, comment peut-elle écrire autant ?

Elle s'assoit en face de nous.

"Si tu as froid prend la couverture qui est là"

Elle prend un calepin et un stylo.

"Bien, bonjour à toutes les deux, je m'appelle Anne Mélord. Pouvez-vous me dire ce qui vous amène ici aujourd'hui ?

Ma mère ne répond pas de suite ; elle croit que je vais le faire ? La dame sourit, attendant une réponse.

"C'est-à-dire qu'il y a plusieurs choses qui ont amené le médecin d'Andréa à vouloir la faire consulter, commence ma mère, heu, tout d'abord elle refuse de manger, je ne la vois faire aucun repas et ensuite et surtout, elle ne parle pas.

- Tout ça dur depuis combien temps ?

- Son père est décédé il y a de ça un an, donc ça doit faire... deux ans et cessé de manger un mois après... il me semble.

La psymachin semble étonner.

- Vous n'êtes pas sûre ?

- Non, je travaille beaucoup et ne l'aie pas remarqué tout de suite...

La conversation continue, la dame posant des questions et ma mère répondant, de plus en plus gênée. Elle raconte mon enfance, dit que je ne pleurais jamais, ait toujours été renfermée, ne paraissait pas ressentir de sentiments. Elle dit que plus je grandissais, moins je parlais, moins je dormais, moins je mangeais ; d'après mon père, car elle était absente. Elle évoque rapidement la période où mon père était en train de se tuer à petit feu à cause de l'alcool, expliquant que je refusais d'aller le voir à l'hpopital. Elle livre le fait qu'elle m'ait fait arrêter la gym, prenant comme excuse que cela devenait trop cher, alors que je sais parfaitement que c'est seulement parce que ça l'embêtait de me voir "perdre mon temps là-bas" alors que je pourrais être "en train de réviser".

La psy écoute et note chaque détail.

Si ma mère savait, elle aurait pu dire qu'en troisième, une grande partie de la classe m'harcelait. Ils m'insultaient sans cesse, à peine avais-je mis un pied en classe. On me poussait dans les couloirs et me traitait de tous les noms. Parfois, je retrouvais des menaces dans mon casier. On m'envoyait des SMS comme "Tu mérites de mourir", "T'es bonne à rien", "Sale pétasse", "Tu devrais crever", "Pends-toi !", "Ne viens pas demain, on fêtera ça". Des élèves sonnaient à ma porte disant que je devais sortir avec eux, alors quand je disais à mon père que c'était faux et que je ne voulais pas, il criait en disant que je ne faisais rien pour m'intégrer. Un jour, une fille m'a frappé, parce que je l'avais apparemment provoqué du regard. La classe s'est mis autour d'elle pour applaudir, certains l'ont même aidé; j'ai cru que j'allais mourir. Ils avaient été assez intelligents pour ne pas me frapper au visage, j'ai donc pu cacher mes plaies. Plus tard, d'autres personnes recommenceront. Ma mère, voyant parfois quelque bleu, disait que je n'étais qu'une incapable qui ne faisait attention à rien: je n'ai jamais fait le rapprochement avec les bleus.

Je n'ai pas toujours été seule, j'ai bien eu une ou deux amis, mais elles finiront par sombrer du côté obscur. Je pense qu'elles ont fait ça pour ne pas se faire harceler à leur tour et pour se faire apprécier. Un jour, lorsque j'ai trouvé un énième bout de papier dans mon casier, j'ai tout de suite reconnu l'écriture d'Angela, une des deux filles. J'ai compris que tout était fini, que j'étais seule. Le début de la fin.

"Bien, finit par conclure la psymachin à la fin de la séance, on peut dire qu'Andréa a toujours été très secrète ? Elle n'a jamais extériorisé ses sentiments et ne les a même jamais exprimés ? Je pense qu'il y a d'une part le fait que ce soit son père, alcoolique, qui s'est occupé d'elle alors que vous étiez en train de travailler et d'autre part l'arrêt d'un sport, qui peut être un moyen de s'évader pour une enfant ou une adolescente. En lui enlevant ça, Andréa a pu se sentir prisonnière et seule avec son mal-être qu'elle a contracté lors de son enfance. Bien sûr, ce ne sont que des hypothèses, nous approfondirons tout ça durant les séances prochaines. Dis-moi, tu as des amis ?

Je fais oui timide de la tête, je pensais à Molly. Cette femme parlait comme un médecin, ma première impression se dégradait petit à petit. Non, je ne veux pas de médecin.

- seulement une ou plusieurs ?

Je fais non, consciente qu'elle allait se demander si j'avais ou non, des amis.

Bizarrement, elle ne me pose pas la question. Il suffit de faire le rapprochement avec mon passé pour se douter de la réponse: je n'ai jamais été accepter où que j'aille. Même à la gym, j'étais seule.

Elle nous donne un rendez-vous pour la semaine prochaine et ma mère lui tend un chèque de cinquante euros. Cinquante euros pour une heure de blabla, ça fait cher la séance quand on sait que cela revient à un euro et deux centimes la minute. Je serai seule, ma mère ne viendra pas avec moi. Ce n'est pas plus mal finalement, même si je n'ai absolument pas envie de parler à cette dame. Elle a peut-être fait du bon travail aujourd'hui, mais je suis sûre que ma mère aurait pu conclure la même chose si elle prenait la peine de me regarder un peu plus que quand elle a le temps - jamais.

Je ne comprends pas pourquoi elle accepte de payer si cher une thérapie, mais dit ne plus avoir assez d'argent pour la gym. Si je fais dix séances, cela lui reviendrait plus cher qu'une année de sport. Je sais qu'elle me ment et qu'elle m'a fait arrêter seulement pour ne plus avoir à m'y emmener. Cela dit elle ne le faisait qu'une fois par mois, le samedi, quand mon bus ne passait pas. Les autres jours je me débrouillais toute seule. Je la soupçonne d'utiliser ma maigreur et ses revenues comme excuses. Ma mère n'est qu'une manipulatrice.

Sur le chemin du retour, ma mère ne m'adresse toujours pas la parole. Je claque des dents, sans vraiment savoir si c'est à cause du froid ou de l'émotion. L'émotion. Je ne ressens pourtant jamais rien. Je n'ai pas le droit.

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  • 2 mois après...
Membre, Conteuse aux fils d'argent, 93ans Posté(e)
Ludwige Membre 788 messages
Forumeur alchimiste ‚ 93ans‚ Conteuse aux fils d'argent,
Posté(e)

Bonjour Charlie C

Je viens de lire les premiers chapitres de ton histoire et, malgré quelques maladresses de style, je les ai trouvé très intéressants. J'espère que tu vas continuer parce que ce serait dommage de t'arrêter en si bon chemin.

Si ce n'est pas trop indiscret, j'aimerais savoir si c'est autobiographique.

En attendant la suite, je te souhaite une bonne soirée,

L...

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