Conscience, libre arbitre et compassion
Conscience et libre arbitre évolueraient-ils en parallèle ?
Plus on est conscient des choses, plus notre libre arbitre grandit, moins notre choix est fondé sur des réflexes "archaïques" de survie pure et dure ?
A l"inverse moins nous sommes conscients, ("aware" comme dirait un certain Jean-Claude, qui ne dit pas que des inepties d'ailleurs si l'on ose regarder un peu derrière les apparences), plus notre libre arbitre se réduit, plus nous évoluons comme sur des rails. Ces derniers rétrécissent le champ des possibles certes, restreignent notre liberté, mais en même temps nous offrent la possibilité de devenir plus conscients. Car ils ne nous bloquent pas sur un chemin par hasard : ils vont nous faire repasser inlassablement sur les mêmes types d'obstacles, précisément ceux dont nous avons besoin pour évoluer, remettre en question nos croyances erronées, et ouvrir notre champ de conscience. Car la liberté commence à l'intérieur, dans la tête et le coeur, et une apparente liberté extérieure ne sera que confiture aux cochons si nous restons empêtrés dans la toile de notre esprit.
C'est une façon d'interpréter ce que certains appellent la "roue karmique". On parle souvent de karma en termes de mérite ou de punition, conséquences de nos actes passés. Mais je pense que ces notions autoritaires sont purement crées par l'homme dans un soucis de contrôle et ne font nullement partie des lois de la nature. La nature est bien assez puissante et intelligente pour n'avoir pas besoin de fonctionner selon des règles de soumission à son autorité, de devoirs et de punitions. L'homme lui, de par la faiblesse de sa conscience et la force de son ego, en est venu à créer de tels concepts et à les disséminer dans l'inconscient de son prochain dès le plus jeune âge. Mais la conscience humaine peut évoluer, et nous pouvons choisir de cesser de nourrir la carapace de l'ego et renoncer à ces lois d'asservissement et de domination.
Pour revenir à la notion de rails et de roue karmique : plus notre conscience s'ouvre, moins nous avons besoin d'être orientés, moins nous avons besoin d'obstacles précis et douloureux pour comprendre et ouvrir notre coeur, plus les rails s'effacent. Car nos choix seront naturellement justes et auront moins besoin d'être aiguillés par des forces "extérieures" à nous.
Ces obstacles et difficultés auxquels nous sommes confrontés, dépendent à mon sens davantage de nos croyances et de nos intentions profondes que de nos actes extérieurs. La vie nous offre l'opportunité de nous aligner avec la vérité, de comprendre l'essence profonde des choses, d'avoir une vision "juste" et donc un esprit en paix.
Par exemple, une personne qui globalement se conduit très respectueusement avec les autres mais est prise au piège d'une culpabilité maladive à cause d'une grande sensibilité, de certains événements traumatiques de son enfance relayés plus tard par une société infantilisante, sera comme par hasard régulièrement confrontée à des personnes qui précisément la mettront face à son sentiment de culpabilité, des personnes au fonctionnement "pervers", qui savent détecter les failles des plus "faibles" et s'en servir comme nourriture de leur propre ego.
Il serait alors une erreur d'interpréter ces événements comme une preuve de sa culpabilité réelle ("si tant de gens me disent que je suis coupable, c'est que ce doit être vrai, à la fin !"). Bien au contraire... Il s'agit d'enfin être au clair avec soi-même et de réaliser l'injustice que l'on se fait subir en ayant des croyances erronées sur soi, et par là-même, sur le monde.
Si la liberté commence à l'intérieur, se sentir libre de ressentir momentanément de la colère envers les personnes qui se sont servies de nous pour satisfaire leurs besoins égotiques est un premier pas fondamental vers l'ouverture de conscience. Sinon, nous resterons éternellement dans un fonctionnement de moutons obéissants et soumis à l'autorité, fonctionnement dont les conséquences désastreuses ont pourtant bien été mises en évidence par l'expérience de Milgram il y a déjà plus d'un demi siècle...
Toutes ces histoires d'ouverture de conscience sont étroitement liées à la compréhension de la nature profonde des choses, compréhension qui nous pousse tout naturellement à la compassion, envers soi-même et envers les autres, donc à la douceur et au refus de la violence, même sous ses formes les plus subtiles. Il y a un lien étroit entre conscience et amour. On ne peut développer notre champ de conscience sans, en plus de la compréhension intellectuelle, cultiver l'amour. Car "on ne voit bien qu'avec leur coeur, l'essentiel est invisible pour les yeux"... "Je te vois" mieux que tout, parce que je t'aime plus que tout...
Evidemment, ce parcours n'est pas sans souffrance. La capacité de souffrance est probablement proportionnelle au degré d'ouverture du coeur. Mais elle est également proportionnelle à la capacité de joie et d'amour. Vouloir l'un c'est être prêt à accueillir l'autre. Mais une souffrance comprise et conscientisée porte en elle le germe du véritable changement et de la libération. La souffrance n'a pas vocation à être éternelle. Elle provient de la violence, en soi et à l'extérieur de soi, c'est à dire du "viol" des lois fondamentales de la nature, issu de l'inconscience. A partir du moment où nous commençons à nous aligner avec ces lois, la souffrance a de moins en moins de raisons de pointer le bout de son nez. La compréhension profonde de la nature des choses nous guide naturellement vers l'ouverture du coeur, la compassion, les actions justes et efficaces, et la véritable joie.
Notre libre arbitre, est-ce alors cette part éveillée en nous, cette lumière au sein de l'obscurité, cette petite flamme à l'intérieur suffisament consciente et responsable pour décider de prendre les commandes et de nous guider vers des chemins plus lumineux ?
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