La proposition de loi interdisant de fumer dans les lieux publics se heurte à l'opposition de l'UMP
LE MONDE | 03.11.05 | 13h18 ¿ Mis à jour le 03.11.05 | 13h18 Le député (UMP) du Bas-Rhin Yves Bur, également vice-président de l'Assemblée nationale, a rendu publique, mercredi 2 novembre, une proposition de loi qui vise à interdire de "fumer dans tous les lieux fermés et couverts qui accueillent du public ou qui constituent un lieu de travail, ainsi que dans l'enceinte des établissements d'enseignement et d'éducation". En déposant ce texte, qui ne fait pas l'unanimité au sein de son propre groupe parlementaire mais qui est approuvé à 80 % par la population, selon les sondages, M. Bur entend faire "acte de santé publique pour protéger contre les dangers du tabagisme passif".
OAS_AD('Middle');Le parlementaire part du constat que "le tabagisme est un vrai fléau : le tabac tue 60 000 fumeurs par an en France et près de 3 000 non-fumeurs, ce dernier chiffre étant selon toute vraisemblance sous-évalué, d'après le directeur général de la santé, qui évoque plutôt 5 000 décès de non-fumeurs" . Yves Bur rappelle que les prévisions à quinze ans sont de 160 000 décès annuels dus au tabac, dont 60 000 décès féminins (contre 5 000 aujourd'hui).
"Les méfaits du tabagisme passif sont avérés. On trouve davantage de substances cancérigènes et autres substances toxiques dans la fumée passive" , souligne le député.
Deuxième motivation, l'application seulement partielle de la loi Evin : "15 % à 20 % seulement des établissements scolaires respectent l'interdiction totale d'y fumer prévue dans la loi Evin", s'indigne M. Bur. Dans l'exposé des motifs de sa proposition de loi, il explique que, "près de quinze ans après la promulgation de cette loi, force est de constater que ce dispositif précurseur n'a été qu'insuffisamment appliqué".
"A l'inverse, tout a été fait pour compliquer sa mise en oeuvre et le rendre ainsi de facto inapplicable" , ajoute l'élu, qui rejette de ce fait la position des représentants de l'industrie hôtelière et de la restauration. Opposés à l'initiative du parlementaire, qui doit les rencontrer vendredi 4 novembre, ceux-ci proposent à présent une application plus stricte de la loi Evin.
Or, indique M. Bur, "la Cour de cassation a précisé dans un arrêt du 29 juin 2005 qu'il existe une obligation de résultat pour les entreprises en matière de protection de leurs salariés face aux risques spécifiques liés au tabagisme passif. Il faut protéger tous les salariés dans toutes les entreprises. Il faut arrêter de se raconter des histoires sur l'aération des locaux. Ce sont des combats d'arrière-garde" .
D'ici à la fin de la semaine, M. Bur proposera son texte à la co signature de ses collègues de l'UMP, ainsi qu'à l'UDF. De plus, Jean-Marie Le Guen (PS, Paris) a fait savoir qu'il se situait sur la même longueur d'onde et le premier secrétaire du Parti socialiste, François Hollande, a indiqué que son parti pourrait soutenir cette initiative.
RéTICENCES DE L'UMP
Des soutiens qui pourraient compenser la "très grande prudence" , selon les termes de M. Bur, manifestée par le président du groupe UMP à l'Assemblée nationale, Bernard Accoyer. Celui-ci a indiqué que son groupe ne soutenait pas la proposition car ses membres préféraient "la prévention, l'éducation et le volontariat" .
Dominique Paillé (UMP, Deux-Sèvres) s'est même félicité que soit enterré ce qu'il considère comme "une ineptie sans égale" et un texte "répressif" . "On n'entend pas directement l'industrie du tabac, qui fait parler d'autres gens à sa place. Elle a ses porte-voix. Demandez à mon collègue Paillet pour qui il parle...", a rétorqué M. Bur devant les journalistes.
La proposition de loi de M. Bur ne sera donc pas inscrite dans une niche parlementaire de l'UMP. Les seules options restent que le gouvernement la reprenne à son compte ou qu'elle soit reprise à l'identique et déposée de nouveau par un autre groupe parlementaire. "Au gouvernement de prendre ses responsabilités, lance M. Bur . Lors de la discussion au Palais-Bourbon sur le projet de loi de financement de la Sécurité sociale, le ministre de la santé, Xavier Bertrand, a déclaré que le statu quo actuel n'était plus possible."
La Mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie a fait des propositions au gouvernement pour de nouvelles initiatives sur le tabac. Elles devraient être examinées dans les semaines à venir.