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Galice (Espagne) : Amis de la patrie, ennemis des travailleurs


Black Survitual

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Galice (Espagne) : Amis de la patrie, ennemis des travailleurs

Tous les 25 juillet a lieu, dans la Communauté autonome de Galice (au

nord-ouest de l'Espagne), la commémoration de la "fête de la Galice" qui

est pour certains, avec plus d'emphase, la "fête de la Patrie", et pour

les catholiques, jamais en reste dans la région, la "fête de l'apôtre St

Jacques". Ce jour-là est particulièrement mis à profit par les partisans

du "Galicianisme" pour essayer de convaincre les égarés (qui sont nombreux

de toutes parts), de l'excellence des surhommes nationalistes galiciens du

début du XXème siècle et de la mauvaiseté intrinsèque des madrilènes et

plus généralement des castillans tout comme des andalous et natifs des

autres régions d'Espagne, sans oublier la merveille que constitue le

simple fait d'être né Galice... et la difficulté dans laquelle "nous nous

trouvons à cause des espagnols", etc.

Depuis qu'ils sont au pouvoir et qu'ils tiennent le Gouvernement de

Galice, les nationalistes galiciens n'arrêtent pas de privatiser des

services pour les concéder à leurs camarades de parti et financer les

pots-de-vin de leurs acolytes (pratiques qu'ils ne se privaient pas de

dénoncer, lorsqu'ils étaient dans l'opposition, chez le chef du

gouvernement d'alors, Fraga, certes galicien mais partisan de l'Etat

espagnol). Dans le même temps, ils réalisent l'objectif de leur politique

culturelle nationaliste qui est de créer de toutes pièces des signes

d'identité. Rien de tel pour cela que de promouvoir un réseau d'écoles

exclusivement en patois galicien ("galescolas") dans lesquelles, dès le

début, tous les enfants apprennent l'hymne de Galice et la vie, les ¿uvres

et les miracles des saints de la tribu galicienne ; tout ça pour fabriquer

la "Patrie".

Le discours du nationalisme galicien idolâtre deux figures emblématiques,

deux politiciens du début du XXème siècle : Alfonso Rodriguez Castelao et

Alejandro Boveda. Ce faisant, il construit une image idéalisée et

totalement fausse des deux héros. Quelques épisodes de la vie des saints,

que les nationalistes galiciens tentent de passer habilement sous silence,

que nous avons retrouvés dans la presse de l'époque, permettront de fixer

les idées.

Alfonso Rodriguez Castelao

Ce chantre des libertés régionales, de la beauté des "langues

minoritaires", de la nécessité de l'autonomie, ce politicien qui

fustigeait l'horrible Etat espagnol (pour nous effectivement horrible,

comme tous les Etats et toutes les nations) n'a pas vacillé une seconde à

montrer la réalité de ses convictions quand les circonstances historiques

effleuraient son portefeuille de nanti. C'est un journal de son bord, "Le

Peuple Galicien", qui nous l'apprend, dans son édition du 17 octo-bre

1934, p. 11. Qu'y lisons-nous ? Que monsieur Alfonso Rodriguez Castelao

vient de verser, avec d'au-tres richards de sa ville et toute la "jet

society" espagnole, une contribution pécuniaire volontaire aux forces de

l'ordre pour les récompenser de leur action. Quelle noble action A.R.

Castelao récompense-t-il de ses deniers ? Avoir écrasé le peuple ouvrier

asturien révolté. Qu'elles forces de l'ordre récompense-t-il ainsi ?

Serait-ce au moins une police asturienne ? Que nenni ! Il s'agit de

l'armée de l'Etat espagnol, commandée par un général dont

l'ultranationalisme espagnol n'a jamais fait le moindre doute : Francisco

Franco !

Que s'était-il donc passé dans les Asturies ? Dans l'unité à la base, les

militants de la CNT et de l'UGT (centrale alors socialiste) s'étaient

lancé dans une révolution sociale à l'échelle de toute la région

asturienne. Ils se révoltaient contre le patronat et contre l'Etat (en

occurrence, l'Etat espagnol, puisqu'il n'y en avait pas d'autre). La

répression, menée par Franco (qui, ironie du sort, était galicien lui

aussi), fut particulièrement sanglante.

En toute logique, un régionaliste de conviction aurait dû soutenir les

Asturiens puisqu'ils s'attaquaient à l'Etat central (même sans être

eux-mêmes régionalistes). Il n'en a bien sûr rien été. Et il y a pour cela

une bonne raison : au-delà du rejet de l'Etat espagnol, ce que les

travailleurs asturiens voulaient faire, c'était une révolution sociale qui

abolisse l'exploitation. Il y avait danger pour la bourgeoisie. Et la

bourgeoisie, galicienne ou pas, sait être pragmatique : elle a jeté aux

orties les oripeaux des "valeurs régionalistes" le temps qu'il faut, et le

saint homme du régionalisme galicien n'a pas vacillé une seconde à

apporter tout son soutien moral et financier à l'horrible Etat

centralisateur espagnol.

Ce n'est pas d'ailleurs-là le seul appui que le chef historique du

régionalisme galicien ait apporté à ce même Etat. Ainsi, le journal

régional de la CNT de Galice du 25 mars 1933 dénonce le vote des cinq

représentants du parti galicien à la chambre des députés espagnols (l'un

d'entre eux étant bien sûr notre Alfonso Rodriguez Castelao), un vote

ultra-espagnol : il s'agissait ni plus ni moins que d'accorder toute la

confiance à l'Etat centralisateur espagnol dont l'armée devait met-tre à

feu et à sang le village de Casas Viejas pour réprimer le soulèvement des

paysans sans terre de ce coin d'Andalousie. éa, c'est le A.R. Castelao

dont les enfants des "galescoles" n'entendront jamais parler, et pourtant,

c'est le véritable ! Alejandro Boveda

Alejandro Boveda est la deuxième grande figure du nationalisme galicien,

lui aussi est une sorte de légende. Le saint homme était, sur le plan

professionnel, inspecteur en chef de l'administration des impôts (celle

que les régionalistes d'aujourd'hui appellent "administration des impôts

de Madrid qui exploite la Galicie"). On lui connaît deux autres titres de

gloire : il fut fondateur de la Caisse d'épargne de Pontevedra (c'est fou,

cet intérêt constant des politiciens pour les questions d'argent...) et

membre de la Chorale polyphonique de Pontevedra (une chorale très sélect).

C'est peu, mais apparemment, les nationalistes galiciens n'ont pas trouvé

mieux. Il faut donc qu'ils s'en contentent.

Le 17 août, jour où il fut assassiné par les franquistes, est devenu

"Journée du martyre galicien". Et la prétention des régionalistes est

qu'il représente à lui seul, qu'il capitalise en quelque sorte, l'ensemble

des victimes que fit le franquisme en Galicie après 1936. C'est un hold up

sur l'histoire. C'est faire comme si toutes les victimes de la sauvagerie

franquiste avaient été des régionalistes, comme si n'avaient été réprimées

que les velléités d'autonomie ! Il s'agit-là d'une attitude clairement

révisionniste. S'il est indéniable que les franquistes fusillèrent des

régionalistes galiciens pour ce simple motif, il faut rappeler que leur

nombre dépasse à peine la soixantaine pour toute cette vaste région. La

répression fut beaucoup plus massive et sanglante à l'encontre du

mouvement ouvrier, tout particulièrement des anarchosyndicalistes. Ainsi,

dans la seule ville de A Coruña, 150 militants de la CNT furent assassinés

par la police et l'armée de Franco pour le simple fait d'être

anarchosyndicalistes. Vouloir réunir toutes les victimes du franquisme

sous le drapeau galicien, plus ou moins marqué de l'étoile rouge du

marxisme, est une escroquerie de plus.

Dernière précision sur ces points : en un temps ou les nouveaux

régionalistes, du moins ceux qui se réclament des idées libertaires,

tordent l'histoire pour tenter de faire accroire que "la CNT de 36"

soutenait le régionalisme, il est nécessaire également d'apporter un

document d'époque qui vient démentir vertement cette assertion. Nous le

trouvons dans le périodique "CNT" du 24 juillet 1933. Y est relaté un

meeting d'Alfonso Rodriguez Castelao ainsi que le sabotage organisé que

lui oppose la militance cénétiste qui l'interrompt aux cris de "Tu es

comme les autres politiciens, un farceur", "Jésuite", "Tu dis qu'il faut

acheter les tissus en Angleterre, mais tu manges dans un banquet organisé

par les industriels catalans du textile", "Tu as voté la confiance à

l'Etat et pour les jésuites"... Et le journal "CNT" de conclure "Le

masochiste Alfonso Rodriguez Castelao a dû écouter tout cela et plus

encore. Le pauvre ! Lui qui croyait que nous ignorions ses "faiblesses" et

ses trahisons. Il a été bien détrompé."

Reste maintenant à détromper ceux qui, en toute naïveté, prêtent foi aux

balivernes patrioticardes.

(D'après l'article "Amigos de la patria, enemigos del pueblo", de Juan

Armada, publié par "CNT", octobre 2008)

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