Cet été-là, Hugo avait 17 ans et « tout était facile ». En cette saison où même les choses les plus sérieuses s’habillent d’un voile de légèreté, loin du regard intrusif des parents et de celui, insistant, des amis, il crevait d’envie de faire l’amour. Alors, comme la majorité des jeunes garçons de son âge – et comme ses aînés avant lui –, il « l’a fait ». Sans doute un peu poussé par la sensualité solaire de l’Espagne. Surtout, aidé « par l’alcool », tient-il à préciser, comme si cela expliquait la suite de l’histoire.
Aujourd’hui, Hugo a 20 ans et plus rien ne semble facile. La première expérience sexuelle, qui a marqué son été 2015, n’a pas constitué l’élément déclencheur d’une longue série d’autres. Il a compté : « Pas plus de cinq fois. » Sous les premières chaleurs de mai, installé avec quatre copains de lycée autour d’une table de pique-nique en bord de Loire, près de Nantes (Loire-Atlantique), le jeune homme se livre avec une nonchalance d’adolescent, sans pudeur, comme si ses camarades ne pouvaient qu’abonder en son sens. Ce qu’ils font. Evoquant d’une même voix le fait « de ne plus vraiment être motivé pour ça ».
Troubles du désir sexuel
Si l’âge moyen du premier rapport reste immuable depuis des décennies, plafonnant à 17 ans, plusieurs études américaines mettent en lumière une baisse de l’activité sexuelle chez les millennials, les jeunes adultes nés entre les années 1980 et 2000. La dernière enquête d’envergure, menée auprès de 27 000 personnes par des chercheurs des universités de San Francisco, en Californie, et de Widener, en Pennsylvanie, de 1989 à 2014, révèle que cette génération d’Américains pratique environ 53 rapports sexuels par an, contre 65 pour celle des années 1990.
Un tel constat est-il transposable en France ? Le psychiatre et sexologue Philippe Brenot, directeur des enseignements de sexologie à l’université Paris-Descartes, préfère poser la question différemment : « La sexualité des jeunes adultes a-t-elle changé ? »
A l’instar de nombreux spécialistes, le psychiatre, auteur d’Une histoire du sexe (Les Arènes BD, 2017), décrit une société où il est « de plus en plus difficile de cultiver le désir sexuel », évoquant pêle-mêle l’évolution du modèle familial, la libération de la parole et l’émergence des nouvelles technologies. Les sexologues ont d’ailleurs donné un nom à cette nouvelle inquiétude libidinale : les « troubles du désir sexuel » (TDS).
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