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Invité Quasi-Modo

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Je vous livre ici une critique personnelle du concept juridique de propriété intellectuelle dont la simple évocation dans un texte de loi officiel me semble une plaisanterie qui a trop duré. Ayant personnellement déclaré la guerre à ce concept, j'ai conscience qu'emporté par ma plume passionnée, je vous fournis un texte plutôt long. C'est pourquoi je propose un découpage selon un ensemble de sous-titres dont les intitulés résument le principal argument du texte complet, situé dans le spoiler juste en dessous. Il vous suffira d'un clic sur le bouton afficher pour au besoin, développer ou réduire le développement de l'argument sur demande.

-> 1) L'impossibilité de réduire sans contestation possible un travail qualitatif à une rémunération quantitative ; Comment pourrions-nous mesurer, et donc monnayer de façon équitable et juste, en monnaie d'argent, la valeur ajoutée que constitue une découverte ou une oeuvre, quelle qu'elle soit?

Les notions de propriété intellectuelle ou artistique (comme le droit d'auteur ou les brevets de toutes sortes) sont des escroqueries conceptuelles basées sur une erreur de trop longue date, puisque les travaux d'ordre purement intellectuels et théoriques, n'ont de valeur, dans une société rationnelle et matérialiste, que dans la mesure où elles sont des moyens efficaces de déclencher, selon les trois modes possibles de toute communication humaine (convaincre, s'exprimer, informer), respectivement de la conviction, des émotions, ou des actions par la production d'une ou plusieurs réalisations concrètes. Pour prendre un exemple parmi d'autres, la constitution d'un brevet pour la découverte d'un médicament est, pour un esprit éclairé, une idée assez détestable, puisque que le prix de la boîte de médicaments serait par la suite surévaluée, à cause du prélèvement que constituent les droits du chercheur ou du laboratoire ayant mis en évidence la molécule-miracle. Les sommes prélevées selon ces droits se répercutent alors sur le tarif final des soins facturés aux patients, limitant donc l'accès à la santé pour les moins aisés. Qui pourrait seulement, sans contestation possible, fixer un tarif précis, ou attribuer une valeur numérique exacte à des objets abstraits comme la santé, la vie humaine ou le bien-être? Personne ne peut honnêtement se réclamer seul Maître et Possesseur d'un travail théorique et intellectuel, fût-il stocké sur un support externe (un parchemin, un livre, un fichier informatique, une peinture, une sculpture, etc...), et bien qu'il permette la production d'un objet répondant à un besoin spécifique. Pour un Dieu, dont la félicité et la connaissance totale de l'Univers serait bien établie, les progrès technologiques, scientifiques et artistiques seraient ou inutiles, ou de risibles tentatives pour décrire une réalité dont il serait le seul connaisseur. Si les droits à la propriété intellectuelle ou artistique se soldaient systématiquement par des avantages en monnaie d'argent, comment quantifierions-nous les progrès réellement effectués, puisque cela supposerait que les sciences, la philosophie ou l'Histoire de l'art soient terminées, ou que nous soyons un tel Dieu nous-mêmes, et que nous disposions d'un maître-étalon pour mesurer un ensemble de réalités non matérielles, donc par nécessité, incommensurables et qualitatives?

-> 2) L'accès collectif à la culture et au bien-être sont des enjeux de civilisation : Tout individu au capital culturel limité se verrait au final empêché la fréquentation et la fertilisation de son esprit par les grands penseurs, que ce soit par le biais des livres ou d'autres supports indispensables comme les peintures, les morceaux de musique, ou même le cinéma.

C'est un enjeu de taille pour toute civilisation, et l'intérêt de toute société sainement constituée, que de promouvoir l'accès pour le plus grand nombre, à la culture et au bien-être. Nous avons donc, en tant que citoyens électeurs d'une nation démocratique, le devoir de rendre le plus facile possible l'accès du peuple aux moyens qui permettent de bénéficier des avantages techniques liés à l'avancée des sociétés modernes. Il en va donc de même des romans, des livres de science ou de philosophie, recelant certains des mystères impénétrables de notre univers, et constituant un capital culturel indispensable à la culture générale, donc à l'éducation de tout esprit bien formé, ou au développement de l'esprit critique, de la sensibilité, de l'imagination, de la créativité. Si un travail intellectuel réside avant tout dans un travail abstrait et conceptuel, aucun écrivain, artiste, homme de lettre ou de science, ne pourrait garder son travail exclusivement pour lui et se l'approprier sans avoir une idée assez haute, indécente et égoïste de son confort personnel! Que dire de la musique et des partitions, qui ont pour réputation d'adoucir les moeurs? Ou de la peinture et les toiles, qui exaltent la sensibilité! Ou encore de la poésie, dont les recueils font voguer l'esprit le long des rives de l'imaginaire...

L'idée de posséder un travail intellectuel conditionnerait par principe au pouvoir d'achat, la possibilité pour le citoyen ordinaire de tenir ou de reproduire des discours de vérité ou simplement des discours cohérents et pertinents sur le monde. Cela participe sans conteste à creuser les inégalités et le sectarisme, universellement reconnues comme nuisibles dans toute démocratie. La propriété artistique rend plus inaccessibles encore à chacun les ressorts tortueux de la sensibilité humaine, en rendant le milieu aristique sectaire, petit-bourgeois, tout en dissuadant les citoyens les moins fortunés de s'y intéresser. Les brevets enfin, rendent plus difficiles l'obtention des moyens correspondant à des besoins parfois vitaux, et toujours spécifiques (pensez à l'exemple du médicament ou des lunettes), chaque invention étant d'autant plus méritoire qu'elle serait dotée d'une grande utilité sociale, ou que la publicité sur les chaînes de télévision publiques et les grands médias se sera abondamment chargée d'en surstimuler le sentiment du besoin.

-> 3) Les précurseurs ont une dette collective que le brevet ou la propriété intellectuelle veut renier : La culture, comme le football ou le langage, est un sport collectif, et s'approprier un travail intellectuel reviendrait à s'approprier une portion du langage, celui-ci n'ayant de valeur qu'en tant qu'il est précisément partagé.

Ne dit-on pas qu'il faut rendre à César ce qui est à César, de sorte à ne pas s'attribuer de mérites indus? Notre idéologie dominante étant profondément individualiste et mettant l'accent sur la compétition sans relâche, nous mettons sur un piédestal un certain nombre de figures héroïques qui font autorité, à l'image du self-made-man américain, mythe contemporain persistant s'il en est, comme nous affirmerions un mauvais préjugé dont nous aurions du mal à nous débarrasser. Si j'osais une comparaison avec le football, nos élites intellectuelles et aristiques sont comme des buteurs talentueux et orgueilleux, qui obtiennent une prime à chaque points marqué, mais toujours au détriment de l'équipier qui lui aura fait la passe décisive, et malgré l'assaut mené par l'équipe toute entière, qui lui aura fait remonter le ballon, et sans laquelle rien n'aurait été possible. Et ce sont bien les conditions culturelles et sociales, collectivement et historiquement déterminées qui, génération après génération, rendent matériellement possibles les innovations humaines, qu'elles soient théoriques ou même pratiques.

Newton, dans ses fulgurances lucides, affirmait par lui-même qu'il était comparable à un nain juché sur des épaules de géants, ce qui signifiait à ses yeux que sans l'apport indispensable des grands esprits l'ayant précédé dans l'Histoire des sciences, et dont il bénéficiait des savoirs patiemment accumulés, ou même sans l'Histoire humaine elle-même, il n'aurait pas pu soutenir une théorie si puissante que celle qui le rendit à jamais célèbre. Comment l'ordinateur aurait-il vu le jour sans la découverte préalable de l'électricité, l'invention du bouton-poussoir, ou les développements mathématiques de l'algèbre de Boole? Comment la voiture aurait-elle été possible sans les avancées que représentèrent la roue, la chambre à air, le moteur à explosion, la possibilité d'extraire des énergies fossiles? Dans la logique d'un dépôt de brevet ou de la propriété intellectuelle, nos penseurs ne devraient-ils pas payer des droits à ces précurseurs d'autrefois (ou sinon à leurs descendants, les droits de propriété intellectuelle ou artistique étant assez étrangement héréditaires) dont les découvertes dépendent totalement et inconditionnellement? Qu'en est-il des simples citoyens anonymes qui, en cours de l'Histoire de nos sociétés, auront permis que soient réunies les conditions culturelles, sociales et historiques nécéssaires à de telles avancées?

Les bénéficiaires de droits pour des travaux d'ordre intellectuel ne disent jamais qu'ils y sont en réalité pour si peu, et qu'ils auraient bien plutôt une dette collective, tandis que l'inspiration, comme au sens premier et physiologique du terme, ne peut venir qu'en respirant l'oxygène de l'extérieur pour le recracher ensuite, sous l'effet automatique de la mécanique corporelle, sous la forme de gaz carbonique. Ou alors, lorsqu'ils le concèdent, cela reste de la fausse modestie lors de propos, bâclés et émus à la tribune, parfois justement pendant la cérémonie de remise d'une récompense officielle, au nom de la collectivité qui les remercierait. Ce sont des discours classiques des cérémonies de remise de prix dont nul ne tire au final toutes les conséquences pratiques, qui seraient que leur nom ne soit pas seul lié indissociablement aux performances réalisées, et qu'ils ne soient pas présents sur l'estrade pour y être remerciés. Il resterait naturellement à établir l'abolition pure et simple des privilèges que procurent la propriété intellectuelle ou artistique, mais aussi l'annulation des récompenses individuelles s'y rapportant.

-> 4) De l'impossibilité d'être un visionnaire populaire, méritant ou actuel : Il faut choisir entre les catégories mutuellement excluantes que représentent l'intellectuel méritant et actuel, ou l'intellectuel visionnaire et inactuel, tout mérite s'établissant à la lumière des valeurs ayant cours dans l'époque que nous traversons.

Par principe et presque par définition, l'intellectuel visionnaire est impopulaire et ne saurait être collectivement remercié, car il est mal à l'aise dans une époque incompatible avec ses valeurs personnelles, correspondant mal à son idéal de vie. Il entre frontalement en contradiction avec les valeurs dominantes ou les modes de vie majoritairement plébiscités. Nous pouvons donc supposer que, la plupart du temps, le public ne porte pas les visionnaires dans son coeur, et qu'il ne saurait en fait jamais récompenser les meilleurs d'entre eux en son nom de leur vivant. Bien que chacun aime à réinterpréter l'Histoire à postériori, en la relisant à rebours avec nos valeurs actuelles, n'oublions pas que l'Histoire demeure écrite par les vainqueurs qui en imposent, même malgré eux, une lecture officielle. Qui pourrait sérieusement s'imaginer recevoir un prix pour défendre des valeurs inactuelles et huées? Le fait que certains corpus idéologiques soient officiellement triomphants, et donc majoritairement approuvés au sein des milieux intellectuels académiques, rendrait-il improbable qu'un penseur, un artiste ou un aristocrate officiellement récompensé, donc aux intérêts plutôt conservateurs, défende bec et ongles des valeurs inactuelles et aux intérêts opposés à ceux de ses pairs dont il dépend? Toute rétribution de type méritoire serait donc presque, par définition, impossible à établir dans le vas du vrai visionnaire, celui-ci étant par nature impopulaire, et bien plus vraissemblablement condamné ou méprisé par les gens de son époque, et principalement par ses pairs.

Nous éprouvons tous qu'agir par devoir, ce n'est pas agir pour les honneurs ou pour la gloire, et donc que pour un visionnaire il s'agit bien plutôt de faire naître une nouvelle valeur, c'est à dire d'agir par devoir, au titre d'une exigence réciproque et spontanée à vocation collective et universelle. Que les héros légendaires de notre Histoire glorieuse aient fait leur devoir, comme Spartacus galvanisant les gladiateurs contre les soldats de Rome, Rosa Parks refusant de céder sa place dans un bus, ou Nelson Mandela plaidant pour la fin de l'apartheid, et nous en concluerions facilement que, mûs par la nécessité profonde de leur seule nature, ces héros n'en eurent au final aucun mérite. Pas plus que n'aurait de mérite le passant qui, passant par là par hasard, retiendrait par nécessité le bras d'un suicidaire au regard vide, prêt sauter du pont depuis lequel il scrute l'horizon. Qu'ils aient eu un véritable choix, et ils ne firent pas leur devoir ou ne défendaient aucune valeur particulière, mais agissaient en vertu de fins personnelles qui leur appartenaient en propre, et dont la valeur morale serait nulle, puisque sans finalité collective et universelle.

Il est donc logique, non seulement de conclure ensemble que les intellectuels dont la pensée aurait la plus grande portée resteront à jamais ignorés et méprisés par leurs contemporains, mais que reconnaître le mérite des intellectuels vivants serait assez douteux, puisque les meilleurs d'entre eux demeureraient en dehors de ce système de récompense, puisque tout à fait hors du cadre dont dépend toute notion de mérite. Qu'est-ce qu'un système de notation pour un examen auquel les meilleurs, s'ils sont trop bons, seraient systématiquement recalés? L'humilité nous recommande bien plutôt d'avouer notre incapacité à repérer les penseurs les plus en avance sur notre temps et sur nous-mêmes.

-> 5) La possibilité du plagiat ou du vol d'idées : De façon générale, le mimétisme comportemental vicéralement ancré dans nos gènes, témoigne que, si les grandes idées prennent racine de façon apparemment spontanée en nous, elles se propagent collectivement de façon parfois inconsciente, parce qu'elles paraissent les solutions les plus naturelles, ou parce que nous subissons des influences dont nous ignorerions l'origine, de sorte à ce qu'une même idée ou un même argument puissent se retrouver chez des individus distincts, bien qu'ils ne se côtoyent pas directement. La difficulté d'établir la paternité d'une oeuvre ou d'un travail intellectuel pose directement la question du plagiat, car entre deux dessins similaires effectués simultanément, il est difficile de savoir quel dessinateur aurait copié sur l'autre, ou même si il y a bien un copieur.

Ce n'est pas un hasard si des centaines d'inventions ou d'innovations semblent germer simultanément dans des esprits totalement ignorants l'un de l'autre, de façon tout à fait indépendante, chez certains érudits mieux formés que les autres (p.ex. l'invention de l'écriture, la théorie de l'évolution des espèces, etc..). Il devient même parfois délicat pour un historien d'associer un nom précis, ou même un groupe de noms bien déterminés à une découverte particulière. Ce n'est pas un hasard non plus, si un chercheur ou un inventeur doit toujours vérifier au possible, avant de commencer ses investigations, si il ignorerait l'existence d'un autre collègue n'ayant pas déjà résolu le problème qu'il soulève, en ayant répondu d'une façon à ses yeux satisfaisante.

Le plus souvent, il n'y a qu'un nombre déterminé et fini de façons possibles pour résoudre un problème donné avec les moyens matériels d'une époque. Parfois même, il suffit de se pencher sur un problème pour que la solution la plus efficace germe par elle-même, comme nous pourrions dessiner la forme d'une pièce de puzzle manquante en partant des pièces préalablement assemblées et mises en place par un prédecesseur. L'écriture, inventée simultanément par les chinois et les égyptiens sans qu'ils eurent pour autant de contacts, correspond naturellement au besoin de transmettre ses connaissances sur un support solide, de façon à cumuler collectivement les informations ou à mémoriser et partager les connaissances. Les spécialisations techniques des chercheurs, aujourd'hui extrêmement poussées du fait de la division du travail, s'obtiennent à l'issue d'années d'études universitaires, et sont si nécessaires à toute innovation originale, que la responsabilité et l'intelligence du chercheur est plus que jamais diluée dans le travail de son équipe, et l'appropriation d'un héritage culturel et historique, millénariste et international. Qu'un directeur de recherche puisse briller pour s'être approprié la découverte d'un subordonné ou de toute son équipe ferait réfléchir plus d'un chercheur.

-> 6) Les héros de l'Histoire n'existent pas (ou pas encore) : Toute prise en compte de notre mérite réel, sans défaut ni excès dans nos attitudes réciproques supposerait, pour en prendre la pleine mesure, que l'Histoire soit terminée, c'est à dire que les connaissances soient complètement achevées dans tous les domaines, et que les valeurs humaines se soient définitivement fixées sans évolution postérieure.

Toute conception linéaire du progrès est évidemment illusoire, puisque l'Histoire est toujours en marche dans un monde en changement constant, et que les valeurs de chaque période se retrouvent bouleversées de révolutions en révolutions. La vérité assez évidente qui en découle, c'est que les héros n'existent pas, ou pas encore : ceux qui passent pour tel sont seulement des hommes ordinaires, certainement érudits ou courageux, mais qui bénéficient à tort d'un assentiment général positif et illusoire, tel le clône d'un roi jadis glorieux et mort dont nous fêterions le retour, à l'image du Christ, tandis que la foule s'en serait à jamais éprise pour l'adorer. L'idée du héros est un profond malentendu qui a trop subsisté au cours de notre Histoire, et qui ruine toute possibilité d'élévation réelle pour l'humanité.

Si nous prenions le cas particulier des travaux d'Albert Einstein, que beaucoup continuent de considérer comme l'incarnation du physicien génial, nous verrions les liens indéniables de ses travaux en physique théorique avec l'invention de la bombe atomique au sujet de laquelle la Terre du Japon tremble encore. Si nous ne pouvons blâmer directement les artistes ou les intellectuels pour les dégâts causés, directement ou indirectement par leurs travaux, qu'irions-nous les récompenser pour des conséquences possibles dont nous ignorons la portée positive ou négative? Certaines inventions, certains systèmes de pensée ou certaines idées étant parfois détournées à des fins criminelles, d'autres conséquences de ces théories restant encore à éprouver tout comme certaines conceptions alternatives, comment prendrions-nous une telle décision sans une arbitraire intransigeance? Une situation problématique et symétrique à cet assentiment positif provoqué par Einstein aurait pu naître en réaction à sa récompense par le jury du prix Nobel pour ses théories de la relativité générale et restreinte.

En effet, si ses travaux ne sont utiles et louables que mis au service de notre humanité, serait-il de façon similaire possible, de le désigner en bouc-émissaire des explosions atomiques de Nagazaki et Hiroshima, en ajoutant qu'il serait de surcroît présumé non-innocent de ce crime contre l'humanité, et qu'il nous doive à chacun ou au peuple japonais, lui ainsi que toute sa descendance, des dommages et intérêts fixés de façon arbitraire, pour un préjudice complètement incalculable, et que sa condamnation ferait office d'exutoire malgré l'existence absolument certaine des autres individus qui fûrent impliqués, peut-être plus diretement, dans ce crime monstrueux? Peut-être, comble du comble, avons-nous récompensé du prix intellectuel le plus loué (le prix Nobel de physique), le principal théoricien responsable du futur meurtre de l'humanité! Dans les deux cas, l'accusation ou les louanges seraient à la fois nulles et non advenues : la culture nous relie collectivement, et nous demeurons inextricablement interdépendants à chacune des étapes franchies au cours des évolutions sociales et techniques, en allant des gadgets les plus futiles et extravagants, aux inventions les plus nécessairement vitales ou dangereuses. Si nous sommes bien tous humains, nul ne mérite pour autant de devenir l'égal d'un Dieu vivant, le mérite devant être établi en étudiant le jeu de cartes de chaque joueur, tandis que nous ne sommes jamais à l'abri d'une nécessité de redonne.

-> 7) Réponses aux objections : Que la rémunération au mérite des artistes ou des chercheurs agisse comme une stimulation, et quelle différence dans le fond, entre la remise d'un prix ou d'un trophée, et une friandise accordée à un animal sauvage par son dresseur pour s'être bien comporté durant un numéro de cirque? Et que penserions-nous de celui qui, en réaction à cette décision de mettre fin à son droit de propriété intellectuelle, s'indignerait pour réclamer qu'on lui accorde de l'intérêt et une reconnaissance officielle collective?

A un homme dont on respecterait et admirerait inconditionnellement la liberté ou l'audace intellectuelle, nul ne pourrait offrir de récompense du seul fait d'avoir clairement conceptualisé un certain nombre d'idées, même si elles ont résisté jusqu'ici à l'épreuve du réel. Aucun grand théoricien ne saurait non plus décemment et honnêtement accepter une telle récompense, car aucun réel talent n'éprouve le besoin indispensable d'être récompensé par le grand public en monnaie d'argent, en cérémonies futiles ou en médailles rutilantes. La beauté d'un sourire ou la chaleur d'une poignée de main, doublées de ce sentiment intime d'avoir aidé à rendre ce monde un peu meilleur, c'est à dire d' "avoir bien fait l'Homme" comme dirait Spinoza, seraient réellement suffisantes pour qu'un citoyen au réel sens du devoir "se tienne en joie".

Pouvons-nous, d'un points de vue éthique, privatiser notre culture dont on vendrait ensuite des parties, comme on vendrait les actions d'une entreprise ou une partie du dictionnaire, tandis que toute culture, comme toute langue vivante, n'a de valeur qu'en tant qu'elle est partagée, et qu'elle ne nous appartienne pas en propre, ni à nous, ni à personne? Maîtriserions-nous à titre exclusif une portion de langage que nous nous heurterions à des murs d'incompréhension lors de son utilisation, et qu'il serait même impropre de parler d'une portion du langage! Que l'artiste ou l'inventeur ait effectué l'effort de conceptualiser un regard singulier lors d'une production concrète, et qu'il ait besoin d'un salaire pour continuer son activité, ce sont des considérations dont la validité est douteuse : il n'y a ni pensées suffisamment originales, ni sentiments artistiques si intimes, qu'ils ne soient pas communicables à l'aide de mots ou de moyens empruntés à la culture dans laquelle nous baignons tous, élites y compris, depuis notre plus tendre enfance ; culture à laquelle nous devons tout et à laquelle en toute logique tout revient. C'est une imposture absolue que celle de désigner des incarnations vivantes de la culture, comme si il était des monuments représentatifs d'une civilisation tout entière. S'il est nécessaire à nos élites de faire partager leurs inventions et découvertes pour le meilleur comme pour le pire, rien ne leur interdit le sens du devoir et la conscience collective empreintes d'une humilité véritable : ils vécurent bien jusqu'à présent, sans aucune garantie de résultats et de revenus supplémentaires, d'une activité ou d'une spécialité qui permît la possibilité de leur recherche. Ajoutons qu'à ce salaire de chercheur ou d'artiste, rien n'empêche la possibilité d'une prime supplémentaire ou d'une rente fixée par les autorités de l'Etat.

-> Conclusion :

Il serait donc temps d'abolir ces espèces de privilèges que continuent de constituer les droits liés à la propriété intellectuelle, scientifique ou artistique, qui rémunèrent de façon indue, arbitraire (et de toute manière incalculables)des individus dont les travaux sont bien plus collectifs que personnels, qualitatifs que quantitatifs, érigés naïvement en idoles que nous serions tous tenus d'admirer sans savoir pour autant si leurs découvertes travaillent à notre bonheur collectif ou contre celui-ci. Tout cela est contraire à la nature de l'activité intellectuelle qui requiert l'auto-critique et la remise en question, et même dans certains cas, la marginalité impopulaire d'un talent non reconnu.

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Membre, Forumeur confit, Posté(e)
Enchantant Membre 15 624 messages
Forumeur confit,
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Je reconnais bien là le discours ampoulé et Marxisant d’un pseudo intellectuel, qui prétend que la propriété, c’est le vol.

Dans les sociétés dictatoriales, ou la possession et la propriété est interdite, chaque individu perd toute motivation personnelle,aboutissant au chaos social et économique de la société tout entière.

Seuls les organisateurs et les familles de ce chaos sont les bénéficiaires du désastre, soit 5% de la population que l'on désigne comme la nomenklatura.

Définition de la dictature qui en résulte : « Un homme de fer, les autres en tôle.»dev.gif

Plus rien ne fonctionne à peu prêt correctement, tout le monde s’en fou au prétexte bien compris suivant :

« A quoi servirait donc, que je m’investisse personnellement dans un effort qui n’aurait pour reconnaissance que mon nom inscrit sur un tableau d’honneur ? » (Les stakhanovistes)

Et voilà, la boucle est vite bouclée.tongue.gif

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Invité Quasi-Modo
Invités, Posté(e)
Invité Quasi-Modo
Invité Quasi-Modo Invités 0 message
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Sans entrer dans un débat d'insultes, je rappelle à toutes fins utiles, et notamment pour que la discussion qui suivra ne dévie pas sur des thématiques incohérentes, que la notion de propriété est distincte de la notion de propriété intellectuelle. En d'autres termes je défends volontiers la propriété privée, mais pas la propriété intellectuelle.

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Invité Quasi-Modo
Invités, Posté(e)
Invité Quasi-Modo
Invité Quasi-Modo Invités 0 message
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J'ajouterai qu'il est indispensable pour analyser la société et comprendre réellement les enjeux qui s'y déroulent, de prendre en compte la lecture marxiste qui l'analyse avec la grille de lecture du rapport de force entre les classes. Si il m'arrive d'évoquer Marx pour constater, à l'image des sociologues professionnels, la pertinence de sa grille de lecture, c'est d'ailleurs pour réaffirmer avec vous la nécessité de la dépasser en modifiant les instances ou le fonctionnement du pouvoir.

Il est sinon tout à fait envisageable de concevoir une prime d'intéressement ou une rente fixe pour les travaux de chercheurs, d'interprètes ou d'artistes ayant manifesté sans conteste (Est-ce possible?) leur utilité publique. Il serait effectivement contre-productif de considérer que les chercheurs ou les artistes doivent être systématiquement laissés à la rue : comme je l'expliquai, ils durent bien jusqu'à présent, et sans la garantie de succès et d'un revenu supplémentaire, vivre d'une activité qui permît leurs productions.

Tout cela pour dire qu'il vaut mieux réfléchir au lieu de brandir sans raisons l'épouvantail marxiste. Cela démontre uniquement que votre intérêt personnel soit lié à la conservation de certains avantages et que vous vous y accrochez bec et ongles.

EDIT : Millexcuses pour ces fautes de frappe désormais rectifiées.

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Membre, If you don't want, you Kant..., Posté(e)
deja-utilise Membre 5 738 messages
If you don't want, you Kant...,
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Bonjour, bel exposé Quasi-modo,

je rappelle à toutes fins utiles, et notamment pour que la discussion qui suivra ne dévie pas sur des thématiques incohérentes, que la notion de propriété est distincte de la notion de propriété intellectuelle. En d'autres termes je défends volontiers la propriété privée, mais pas la propriété intellectuelle.

Et sans vouloir faire de plagiat, car je n'ai pas eu le temps de te répondre ce matin, je ne suis pas sûr de te comprendre entièrement. ;)

Il me semble que l'idée protégée, de propriété intellectuelle, ne s'applique qu'à des cas bien précis, et entre autre, les découvertes scientifiques ne rentrent pas dans ce cadre pour plusieurs raisons, la première est due au fonctionnement même de la science, c'est qu'il faut pouvoir reproduire les résultats indépendamment pour valider la découverte, ensuite j'ai ouïe dire que dans le domaine biologique, les substances/organes naturelles ne pouvaient pas être brevetées, enfin hormis les mathématiciens, la quasi-totalité des chercheurs travaillent en équipe, voire même de façon pluridisciplinaire.

Il faut bien sûr faire le distinguo entre un procédé matériel novateur que l'on brevète, et une "idée" que l'on voudrait protégée, et qui ne peut pas être brevetée, comme une oeuvre d'art ou une composition artistique. Ne serait-ce pas spolier l'artiste si l'on pouvait reproduire sans vergogne son travail, sans son consentement? Pourquoi on ne peut pas faire un aspirateur sans sac inspiré du système Dyson, mais que l'on pourrait copier une musique, un tableau, une sculpture de droit? Pourquoi on ne peut pas breveter une recette de cuisine par exemple, mais qu'il est interdit légalement de reprendre les paroles d'un chanteur ou la mélodie d'un compositeur?

Pour garantir la possibilité de toucher des royalties sur ses créations, sinon ce serait un frein à l'innovation, car celle-ci coûte chère en temps humain ou en investissement financier, il faut donc pouvoir renter dans ses frais, il faut que ce soit économiquement viable pour l'inventeur, sinon plus personne ne risquerait sa chance où il y a tout à perdre, sauf pour la beauté du geste, les passionnés.

À moins que je n'ai pas bien saisi où se situent tes réticences!?

N'y a t-il pas un parallèle à faire avec la vie privée, par exemple si je fais un poème à ma dulcinée, je considère que c'est ma propriété, et que ça fait parti de ma vie privée, ne faut-il pas une compensation pour que cela devienne public, que d'autres profitent de mon "travail"?

Pourquoi cette scission entre biens matériels et biens immatériels? Si c'est bien une création, et non une imitation d'un phénomène naturel ou du vol.

Si l'outil qui me sert à travailler est à moi, que la matière de départ est à personne ou que je me la suis procuré légalement, la plus-value que j'y apporte est bien immatérielle, et pourtant c'est cela que je vais vendre si je suis artisan ou artiste, autrement-dit de la main d'oeuvre accompagnée ou pas d'idées. Certains publicitaires vendent quasiment des idées toutes faites à leurs clients, quand d'autres vendent de l'information!

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Invité Quasi-Modo
Invités, Posté(e)
Invité Quasi-Modo
Invité Quasi-Modo Invités 0 message
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Il me semble que l'idée protégée, de propriété intellectuelle, ne s'applique qu'à des cas bien précis, et entre autre, les découvertes scientifiques ne rentrent pas dans ce cadre pour plusieurs raisons, la première est due au fonctionnement même de la science, c'est qu'il faut pouvoir reproduire les résultats indépendamment pour valider la découverte, ensuite j'ai ouïe dire que dans le domaine biologique, les substances/organes naturelles ne pouvaient pas être brevetées, enfin hormis les mathématiciens, la quasi-totalité des chercheurs travaillent en équipe, voire même de façon pluridisciplinaire.

Si il est vrai que le cas des innovations scientifiques est particulier, parler du brevet d'invention serait le plus pertinent. Le brevet consiste bien il me semble à s'approprier une façon particulière et nouvelle de résoudre un problème technique. Je ne parlais pas exclusivement des sciences, mais l'exemple du médicament est assez parlant, car la rémunération du chercheur rejaillit ensuite sur le prix des soins, alors qu'il est la plupart du temps embauché dans un laboratoire de recherche et qu'il est dors-et-déjà rémunéré à ce titre. Les découvertes scientifiques sont protégées par l'ordre chronologique des publications qui dépendent quant à elles du droit d'auteur.

Les problèmes techniques sont aujourd'hui tôt ou tard résolus par un chercheur, ingénieur ou inventeur quel qu'il soit. Selon l'impératif moderne technique selon lequel "Tout ce qui peut être fait avec la technique finit tôt ou tard par être fait.", alors tu comprendras que j'ai des réticences à considérer qu'une façon utile de résoudre un problème technique puisse être attribuée à un seul nom, sans aucune garantie par ailleurs qu'il soit le véritable inventeur d'origine.

Il faut bien sûr faire le distinguo entre un procédé matériel novateur que l'on brevète, et une "idée" que l'on voudrait protégée, et qui ne peut pas être brevetée, comme une oeuvre d'art ou une composition artistique. Ne serait-ce pas spolier l'artiste si l'on pouvait reproduire sans vergogne son travail, sans son consentement? Pourquoi on ne peut pas faire un aspirateur sans sac inspiré du système Dyson, mais que l'on pourrait copier une musique, un tableau, une sculpture de droit? Pourquoi on ne peut pas breveter une recette de cuisine par exemple, mais qu'il est interdit légalement de reprendre les paroles d'un chanteur ou la mélodie d'un compositeur?

Pour garantir la possibilité de toucher des royalties sur ses créations, sinon ce serait un frein à l'innovation, car celle-ci coûte chère en temps humain ou en investissement financier, il faut donc pouvoir renter dans ses frais, il faut que ce soit économiquement viable pour l'inventeur, sinon plus personne ne risquerait sa chance où il y a tout à perdre, sauf pour la beauté du geste, les passionnés.

Comme je te l'expliquai, il y aurait d'autres façons de procéder, comme la possibilité de vendre ses productions personnelles. Spolier l'artiste je ne crois pas, mais le public est très certainement spolié à son tour par l'appropriation de certains droits concernant des travaux d'ordre intellectuel, ce qui rajoute un intermédiaire de façon incongrue. Un tableau ou une sculpture n'a de valeur artistique que s'il est universel. Mais s'il est universel, alors le tableau n'appartient plus à son peintre mais à la culture collective.

Que ce soit un frein à l'innovation, cela m'étonnerait beaucoup dans la mesure où l'autorisation de vendre ses réalisations ou ses productions, à l'image de l'artisan, resterait possible à chacun.

À moins que je n'ai pas bien saisi où se situent tes réticences!?

N'y a t-il pas un parallèle à faire avec la vie privée, par exemple si je fais un poème à ma dulcinée, je considère que c'est ma propriété, et que ça fait parti de ma vie privée, ne faut-il pas une compensation pour que cela devienne public, que d'autres profitent de mon "travail"?

La vente de ma production est distincte du droit de propriété intellectuelle la concernant. Ce sont deux notions distinctes.

Pour reprendre l'exemple des sciences, si ce n'était pas X qui avait trouvé l'invention Z, alors ça aurait été Y. D'ailleurs, rien ne garantit dans cette logique que X soit bien l'inventeur du procédé Z et qu'il ne l'ait pas subtilisé à Y! Ce serait d'autant plus absurde que l'invention serait de notoriété publique!

Pourquoi cette scission entre biens matériels et biens immatériels? Si c'est bien une création, et non une imitation d'un phénomène naturel ou du vol.

Si l'outil qui me sert à travailler est à moi, que la matière de départ est à personne ou que je me la suis procuré légalement, la plus-value que j'y apporte est bien immatérielle, et pourtant c'est cela que je vais vendre si je suis artisan ou artiste, autrement-dit de la main d'oeuvre accompagnée ou pas d'idées. Certains publicitaires vendent quasiment des idées toutes faites à leurs clients, quand d'autres vendent de l'information!

Parce que les biens matériels, protégés par la propriété privée, fournissent une base quantitative, tandis que les biens immatériels, protégés par la propriété intellectuelle sont des apports qualitatifs. La possibilité d'une prime d'intéressement dès la résolution du problème, ou d'une rente fixe pour chaque chercheur serait amplement suffisante.

Ajoutons que l'hérédité du droit lié à la propriété intellectuelle me paraît choquante. Quel mérite auraient les enfants d'un écrivain ou d'un artiste célèbres, parfois reconnus à titre posthume?

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  • 2 semaines après...
Membre, If you don't want, you Kant..., Posté(e)
deja-utilise Membre 5 738 messages
If you don't want, you Kant...,
Posté(e)

Aux lires de tes précisions, je crois mieux cerner où se situe le débat que tu as initié, du moins dans le sens que tu voyais la problématique.

Si j'ai bien compris cette fois, je crois que le fond du problème peut finalement se rapporter à cet autre problème tout aussi délicat à traiter, en effet, le noeud du problème vient si j'analyse correctement, de la distinction entre invention et découverte en dernière instance, puisque si c'est une découverte individuelle ou collective, elle ne peut appartenir à personne en propre, car extérieur aux individus qui ne font que constater, en opposition avec la notion d'invention qui est le fruit d'une personne ou d'une équipe, et même si cela repose sur des découvertes antérieures, le produit ainsi crée n'est pas de naturel, mais bien le résultat d'une création, d'une innovation qui ne se rencontre pas à l'état de nature, ni même par analogie/approximation.

L'exemple le plus crucial qui me vient à l'esprit, étant celui de la mathématique, invention ou découverte? Les deux camps existent, chacun avec ses arguments.

Je pense que la propriété intellectuelle peut "se traiter" à la lumière de ce dilemme plus ancien, dit autrement, on est loin de pouvoir trancher, car on pourra toujours trouver des arguments affaiblissant les premières justifications, et ainsi de suite, un peu comme l'éternel combat entre le voleur et le concepteur d'antivol, ou le hacker et le développeur d'antivirus, enfin c'est ainsi que m'apparaissent les choses!

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