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Membre+, Posté(e)
Doïna Membre+ 17 448 messages
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Bonjour,

Dans ce topic, je vous raconte la triste histoire d'un certain Pierre Picaud, modeste cordonnier en chambre (= à domicile) de son état à Nîmes, au temps de Napoléon Bonaparte.

En 1807, la chance lui sourit : il va pouvoir se marier avec l'élue de son coeur, Marguerite Vigoroux, une femme belle et riche. Hélas, sa bonne fortune lui vaut de se faire des ennemis, à son insu. En premier, son bonheur attise la jalousie d'un cabaretier veuf et père de deux enfants (un garçon et une fille), Mathieu Loupian, qui avait des vues justement sur la richesse de la Vigoroux. Le jour où Picaud vient lui commander le repas de noces, le jaloux prend la décision de l'accuser bassement d'espionnage à la solde de la couronne d'Angleterre. Ce qu'il fait avec la complicité de deux hommes -qu'on pourrait qualifier de piliers de bar de nos jours- : Solari et Chaubard. Un quatrième larron est mis dans le coup mais refuse d'y participer, connaissant trop bien Picaud dont il se doute qu'il se vengera.

L'accusation mensongère est confiée à un commissaire bon client des lieux. Celui-ci envoie un rapport au duc de Rovigo, notable important estimé de Napoléon, qui fait arrêter Picaud le jour-même de ses noces. Le malheureux pense à une erreur, promet de revenir bientôt à sa promise et à ses invités. Puis il est incarcéré dans le plus grand secret. Il passera sept ans dans la sinistre forteresse de Fenestrelle en Piémont (alors territoire français) sans savoir pourquoi.

Pendant cet emprisonnement, il se creuse un boyau jusqu'à la cellule voisine où est détenu le père Torri, prêtre italien, un prisonnier politique. Les deux hommes se lient d'amitié. Avant de décéder un an plus tard, Torri lègue par testament à son compagnon d'infortune un trésor caché à Milan, dans le pilier d'une église. La libération de Picaud intervient en 1814, après la chute du gouvernement impérial. Vieilli, méconnaissable, Picaud prend le nom de Joseph Lucher et s'en va prendre possession de son trésor.

À présent riche, il fomentera pendant dix ans la plus sombre des vengeances contre les coupables de son incarcération. Déguisé en ecclésiastique, il revient à Nîmes en se faisant passer pour un abbé italien, se faisant appeler Baldini. Il va trouver Allut pour lui tirer les vers du nez en l'échange d'un gros diamant. Il apprend ainsi toute la vérité. Aussi, que depuis Loupian s'est acheté un café à Paris grâce à la dot de Marguerite Vigoroux, qu'il a épousé voici deux ans. Marguerite Vigoroux, la femme que devait épouser Picaud !

Picaud commence par se faire embaucher dans le restaurant de Loupian. Chaubard, également venu s'installer à Paris, est bientôt retrouvé assassiné sur le pont des Arts, un poignard dans le coeur portant sur son manche l'inscription "numéro un". Puis Picaud, habilement, ruine Loupian. Il fait de plus en sorte qu'un prétendu prince Corlano séduise sa fille, l'engrosse et lui demande sa main. Le jour des noces, Corlano avise chacun des 150 invités par un billet qu'il n'est en fait qu'un ancien galérien. La famille Loupian est déshonorée, mais Picaud n'en a pas fini avec eux pour autant. Il s'arrange pour faire arrêter le fils Loupian pour un cambriolage, après que des complices le saoulent et remplissent ses poches de bijoux dérobés. Ce qui lui vaut vingt ans de travaux forcés. Pour couronner le tout, l'établissement de Loupian est incendié. Par la suite, Solari est à son tour retrouvé mort, empoisonné, avec l'inscription "numéro deux" sur son cercueil. Picaud assassine Loupian en dernier, au poignard. Mais au même moment, Allut resurgit, l'empoigne, le ligote et le séquestre : se doutant de ce qui était en train de se tramer, lui qui avait reconnu Picaud, cela faisait un certain temps qu'il surveillait le vengeur. Il tente de le faire parler pour lui extorquer son argent, mais Picaud reste intraîtable. Pour finir, Allut s'énerve et le tue.

Suite à ce crime, Allut s'enfuit en Angleterre. Ce n'est qu'en 1828, sur son lit de mort, qu'il confessera toute la vérité à un prêtre français.

De cette triste histoire, vous l'avez peut-être deviné, Alexandre Dumas s'est inspiré pour l'un de ses romans les plus célèbres : le Comte de Monte-Cristo.

Fenestrelle_B.jpg

Ci-dessus : dans la forteresse de Fenestrelle (Piémont/Italie)

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Invité Grenadine33
Invités, Posté(e)
Invité Grenadine33
Invité Grenadine33 Invités 0 message
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Je ne savais pas que c'était inspiré d'un fait réel. La vengeance est un sentiment qui tient longtemps dans le coeur de certains hommes apparemment.

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Constantinople Membre 18 329 messages
Maitre des forums‚
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Incroyable ! Comme quoi, l'affirmation selon laquelle tous les romans s'inspirent de faits divers est diablement vraie.

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  • 2 semaines après...
Membre+, Posté(e)
Doïna Membre+ 17 448 messages
Maitre des forums‚
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La vengeance est un sentiment qui tient longtemps dans le coeur de certains hommes apparemment.
Faut dire aussi que le coup qu'ils lui avaient fait, pour un sale coup c'en était un ! Sûr qu'il devait avoir la haine.
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  • 1 an après...
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