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Jacques Bainville: "La guerre démocratique".


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"L'auteur des conséquences politiques de la paix, qui anticipait dès 1920 le second conflit mondial,a tenu son journal pendant les premiers mois de la Grande Guerre d'aout 1914 à juin 1915. Il en résulte des portraits tracés sur le vif, des fulgurances, et surtout une implacable analyse des évènements qui montrent que Bainville savait que la guerre ne se terminerait pas après un armistice. Il avait parfaitement saisi les mécanismes à l'œuvre qui mettaient à mal dans ses fondements l'équilibre européen."

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Aout 1914:

"L'illusion générale est que tout sera fini dans deux mois, trois au plus(...)

Croire à la brièveté de la guerre, c'est peut-être encore une façon de ne pas croire à la guerre, une autre forme d'incrédulité presque universellement répandue en France et qui, devant le fait accompli, s'attache à une dernière espérance. Les guerres modernes mettent trop de monde en action pour pouvoir durer, les Etats seront trop vite épuisés et ruinés, les intérêts souffriront trop, les peuples mettront fin à la folie des gouvernements... Ces raisons qu'on invoquait hier contre la possibilité d'un grand conflit européen, on les élève aujourd'hui en faveur d'une paix rapide... Cependant, pour l'observateur, il s'agit plutôt d'une guerre de sept ans que d'une guerre de trois mois. C'est la reprise de la lutte pour l'équilibre que l'Europe a vu renaître de siècle en siècle, la lutte contre l'empire de Charles Quint. Et puis, pour qui connaît la puissance militaire de l'Allemagne, comment croire qu'elle sera brisée en six semaines?"

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Membre, forumeuse acharnée, Posté(e)
querida13 Membre 45 081 messages
forumeuse acharnée,
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Bon elle en a duré quatre ce n'est pas Nostradamus non plus!

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L'intérêt ne réside pas tant dans la prédiction, qui est affaire de voyants et de prophètes, mais dans l'analyse, qui est affaire d'historien...

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5 aout 1914:

"Le propre de cette guerre, c'est qu'elle sera soutenue, du côté anglais et du côté français, par des gouvernements non seulement pacifiques, mais pacifistes, c'est à dire doctrinalement persuadés que la phase guerrière était close dans l'histoire de l'humanité. Du côté ennemi, c'est un Etat militaire dont toutes les forces sont tendues vers la préparation de la guerre. Comment les conséquences d'un conflit éclatant entre deux conceptions, deux mécanismes politiques aussi différents n'alarmeraient-elles pas ceux qui observent, ceux qui réfléchissent, ceux qui savent?"

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12 aout 1914:

Je suis poursuivi par ce mot d'un jeune officier qu'on me répétait ces jours-ci:

"La guerre moderne obéit à des lois telles que la préparation et l'organisation y rendent inutile le génie lui-même."

Le premier aout, à la gare Saint-Lazare, comme je causais avec des mobilisés, je leur disais que le commandement était plein de confiance. L'un d'eux, un mécanicien, je pense, un ouvrier de première classe, en tout cas, me répondit brutalement:

- Oh les chefs!... les chefs!... C'est avec les tripes des pauvres b... qu'on fait la guerre!

Ce mot du jeune officier intellectuel et celui de l'ouvrier parisien se rejoignent.

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Modérateur, ©, 107ans Posté(e)
January Modérateur 59 446 messages
107ans‚ ©,
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Aout 1914:

"L'illusion générale est que tout sera fini dans deux mois, trois au plus(...)

Croire à la brièveté de la guerre, c'est peut-être encore une façon de ne pas croire à la guerre, une autre forme d'incrédulité presque universellement répandue en France et qui, devant le fait accompli, s'attache à une dernière espérance. Les guerres modernes mettent trop de monde en action pour pouvoir durer, les Etats seront trop vite épuisés et ruinés, les intérêts souffriront trop, les peuples mettront fin à la folie des gouvernements... Ces raisons qu'on invoquait hier contre la possibilité d'un grand conflit européen, on les élève aujourd'hui en faveur d'une paix rapide... Cependant, pour l'observateur, il s'agit plutôt d'une guerre de sept ans que d'une guerre de trois mois. C'est la reprise de la lutte pour l'équilibre que l'Europe a vu renaître de siècle en siècle, la lutte contre l'empire de Charles Quint. Et puis, pour qui connaît la puissance militaire de l'Allemagne, comment croire qu'elle sera brisée en six semaines?"

Lucide dès le départ.

Merci pour ce partage hdbecon thumbsup.gif

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Membre, 63ans Posté(e)
S.A.S Membre 3 368 messages
Baby Forumeur‚ 63ans‚
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cet homme était lucide ....

connaître la nature réelle de l' humain permet de comprendre par avance que ..... si quelques uns parle de paix ..... beaucoup d' autres préparent la guerre .

Il est dans la nature de l' homme d' être belliqueux et de toujours vouloir faire le coq dans la basse cour de ce pauvre monde ..... manque de chance ..... le monde est remplis de coq de combat .

Qui veut encore croire que les années à venir verront fleurir les belles fleurs de la paix ? ............. pas moi en tout cas .

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Je pense qu'à notre époque, au vu des troubles que nous vivons, il faut lire, ou relire Jacques Bainville. Retrouver le sens de l'histoire, comprendre qu'on ne fait pas de politique avec des idéaux, mais avec réalisme. Comprendre que chaque conséquence a une cause, chaque cause une conséquence. Comprendre que nos actions d'aujourd'hui engagent ceux qui viennent après nous, comme nous supportons celles de ceux qui nous précèdent. Jacques Bainville était lucide, parce qu'il ne s'encombrait pas d'idéaux, prenait la situation telle qu'elle était, et avait, comme Louis XIV, la qualité du bon sens. C'est ce que Dominique Decherf appelle fort justement "l'intelligence de l'histoire"...

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Membre, 63ans Posté(e)
S.A.S Membre 3 368 messages
Baby Forumeur‚ 63ans‚
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Bonne déduction ( hdbecon ) ...

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20 aout 1914:

"Le Pape est mort cette nuità une heure vingt.

-C'est une victime de la guerre, me dit Camille Bellaigue, qui est peut-être un des hommes auxquels Pie X aura le mieux aimé confier sa pensée, un des français, en tout cas, qui auront le plus approché ce pontife plébéien et réformateur(...)

On me raconte encore que, l'ambassadeur de l'empereur François-Joseph au Vatican ayant demandé à Pie X de bénir les armées de l'Autriche, le Pape aurait répondu: "Je ne bénis que la paix."

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26 septembre 1914:

Ma femme a voyagé toute la nuit avec dix soldats, des territoriaux, qui revenaient du front, éclopés(...)

L'impression dominante, chez eux, c'est que les soldats allemands sont joliment mieux habillés et équipés que les nôtres. Le fait est que les gaillards ont des bottes en cuir fauve étonnamment confortables et un uniforme de couleur "feldgrau"qui est exactement la couleur de la terre de France.Le pantalon rouge fait triste mine à côté de ces vêtements pratiques, souples et qui ne se voient pas, tandis que le pauvre pantalon rouge traditionnel sert de cible à l'ennemi.

Il y a tout un symbole dans ces pauvres pantalons qui reviennent si lamentables. Par eux aussi l'électeur français devenu un combattant paie la démocratie qui se croit progrès et qui n'est que routine, un chariot mérovingien dans une ornière. Voilà quarante ans que l'on parle de changer l'uniforme français et que l'on ne décide rien. Le régime parlementaire n'a pas préparé à la guerre à laquelle des ministres comme le général Brun disaient d'ailleurs tout haut qu'ils ne croyaient plus. Il est de plus en plus évident que le citoyen français a eu, pendant ces quarante dernières années, deux cartes à jouer. L'une était le bulletin de vote, l'autre, la feuille de mobilisation. L'heure étant venue de jouer la seconde, il a payé cher la partie...

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Invité Tar Baby
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Invité Tar Baby
Invité Tar Baby Invités 0 message
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Je ne participe pas, mais je lis avec intérêt, les passages que tu postes. smile.gif

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Modérateur, ©, 107ans Posté(e)
January Modérateur 59 446 messages
107ans‚ ©,
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Ah, ce pantalon garance... Même les russes et les britanniques avaient déjà adopté des uniformes moins voyants. Quant à la protection, n'en parlons pas, il faudra attendre 1916 avant que le casque Adrian soit largement distribué. Quelle inadaptation, et quelle bêtise aussi ! Le code d'honneur voulait qu'on affronte l'ennemi de face sans chercher à se dissimuler, et il fallait que l'uniforme soit beau, pour que le soldat se sente à son avantage...

Pour ceux qui veulent en savoir un peu plus : http://www.musee-armee.fr/fileadmin/user_upload/Documents/Support-Visite-Fiches-Objets/Fiches-1914-1918/MA_fiche-objet-uniformes-14-18.pdf

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Je ne participe pas, mais je lis avec intérêt, les passages que tu postes. smile.gif

Je t'en remercie. J'ai conscience que Jacques Bainville est d'un abord assez difficile, parce qu'il est très critique envers la démocratie. Converti au royalisme par Maurras, dont il dira : "hormis le jour, je lui doit tout", il est de l'Action Française. Ce qui le classe automatiquement aujourd'hui parmi les honnis de l'histoire. Pourtant, son sens de l'histoire faisait de lui à l'époque une référence admise comme autorité jusque dans les milieux officiels. Sa préscience historique est impressionnante, du simple fait qu'elle ne s'appuie que sur l'expérience du passé et le bon sens...

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Ah, ce pantalon garance... Même les russes et les britanniques avaient déjà adopté des uniformes moins voyants. Quant à la protection, n'en parlons pas, il faudra attendre 1916 avant que le casque Adrian soit largement distribué. Quelle inadaptation, et quelle bêtise aussi ! Le code d'honneur voulait qu'on affronte l'ennemi de face sans chercher à se dissimuler, et il fallait que l'uniforme soit beau, pour que le soldat se sente à son avantage...

Pour ceux qui veulent en savoir un peu plus : http://www.musee-arm...ormes-14-18.pdf

Jacques Bainville rend la République responsable de cette bêtise qui coûte la vie à tant et tant d'hommes, à cause de sa politique idéaliste et pacifiste devant un danger pourtant inévitable. Il est d'autant plus amer qu'il n'a cessé de dénoncer cette politique et de prévenir de la catastrophe prochaine dans l'Action Française...

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Membre, 103ans Posté(e)
papyfedelaresistance Membre 860 messages
Baby Forumeur‚ 103ans‚
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Mouais, dans la situation qui nous occupe le lien de cause à effet est connu.

50 ans d'immigration dans un laxisme total !

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Membre, 63ans Posté(e)
S.A.S Membre 3 368 messages
Baby Forumeur‚ 63ans‚
Posté(e)

L'imbécilité criminel de beaucoup d' officiers , envoyant leurs hommes à une mort certaine en les lançant en rang serré et à découvert devant des positions de mitrailleuses parfaitement bien positionnés .... est un sujet tabou .

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28 septembre 1914:

Pour celui qui découvre les ensembles de l'Histoire, une grande voix dominant le champ de bataille répond à ce cri des jeunes soldats qui meurent par cette clameur d'apocalypse: "Ce sont les erreurs de vos pères que vous payez!"

Je pense de moins en moins que la postérité puisse admirer l'histoire du peuple français, qui, après avoir travaillé deux cents ans à détruire l'Allemagne, l'a reformée de ses propres mains, et qui a vécu quarante ans à côté d'une formidable puissance militaire sans se protéger contre l'agression. Il y a six mois, l'Allemagne ayant porté son armée de première ligne à 900 000 hommes et prélevé sur sa population une contribution de guerre d'un milliard de marks, il y avait une immense majorité de français qui croyaient que c'était pour rien, pour le plaisir, que l'Allemagne s'armait jusqu'aux dents. Quand on disait aux habitants de la vallée de l'Aisne et de la vallée de l'Oise que l'envahisseur guettait leurs villes, ils riaient comme d'une bonne plaisanterie. L' "Angleterre de Léon Daudet leur faisait l'effet d'un livre très exagéré, écrit par un illuminé... C'est ainsi que Lille Maubeuge, La Fère, Reims, etc.., n'ont pas eu les fortifications qui eussent arrêté l'ennemi. C'est ainsi que l'insuffisance de notre grosse artillerie nous retient en ce moment devant les tranchées allemandes dans l'Aisne.

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2 octobre 1914:

M. Papillon, propriétaire vigneron à Chargé et voisin de la Roche, nous prête tous les matins la Dépêche de Tours, journal républicain radical dont il est le fidèle abonné. Comme son journal, c'est un bon républicain radical que monsieur Papillon. Et dans sa petite maison ma foi proprette, il s'est longtemps réjoui des progrès de la démocratie, dans le pays tourangeau en particulier et dans le pays de France en général. Monsieur Papillon a d'ailleurs un fils, des neveux, plusieurs cousins aux armées. Monsieur Papillon n'est pas un mauvais français. Mais, s'il connaît bien la vigne, la commune de Chargé et l'arrondissement d'Amboise, Monsieur Papillon n'est pas instruit des choses de la guerre ni de la politique européenne. Pour être bon français, on n'en a pas moins "ses idées", n'est-ce pas, monsieur Papillon? Et ces idées consistent à croire que la guerre est une chose d'un autre âge, qu'en notre siècle de progrès et de lumière l'homme a cessé d'être un loup pour l'homme et que, si le proverbe: "Qui terre a, guerre a", est vrai pour les propriétaires vignerons, il cesse de l'être pour les Etats, surtout au vingtième siècle...

M. Papillon a eu un triste réveil. Il n'a pas vu la naissance des Etats-Unis d'Europe. Mais son fils, ses neveux ont été blessés avec des éclats de shrapnells. Et monsieur Papillon regrette que nous n'ayons pas plus d'officiers, pas plus d'artillerie lourde. Monsieur Papillon ne pense pas que, si la France a dû subir l'invasion, si des milliers et des milliers de ses fils tombent en ce moment devant les tranchées que les allemands ont creusées sur notre propre sol, la faute en est non pas à lui seul ni à lui-même, grands dieux, mais aux institutions qui ont remis à monsieur Papillon et à dix millions de monsieur Papillon divers, constituant le corps électoral français, une tâche qu'il ne pouvait pas remplir : celle du souverain.

Le peuple souverain, c'est monsieur Papillon multiplié à un très grand nombre d'exemplaires et qui crée des représentants à son image, c'est-à-dire des hommes dont l'esprit est naturellement limité aux préoccupations du métier, du village ou de la petite ville. Comment leur en vouloir d'être tels qu'ils doivent être, prévoyants pour leur négoce, pour leur vie privée, imprévoyants pour ce qu'ils ne connaissent pas?

L'état de l'Europe, les risques de conflit européen, les nécessités et le caractère de la guerre moderne, l'organisation militaire de l'ennemi, où et quand voulez-vous que monsieur Papillon ait étudié cela? Il est déjà très beau qu'un sentiment, un instinct tenace aient porté monsieur Papillon à ne pas consentir au désarmement complet de son pays.

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14 novembre 1914:

"A la guerre, le véritable vaincu, c'est celui qui est tué." Un homme, dont l'intelligence d'une extrême souplesse pouvait se placer à tous les points de vue, avait un jour nourri cette pensée, l'avait mise dans la bouche d'un de ses personnages, enclose dans un de ses mythes. Cet homme-là était Ernest Renan. Son petit-fils, Ernest Psichari, s'est fait tuer sur ses canons, le 22 aout, à Charleroi, et est mort de la belle mort du soldat en proclamant sa confiance dans la victoire(...)

Ernest Psichari a rejoint Charles Péguy dans l'immortalité: leurs esprits étaient déjà si profondément fraternels!

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