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Salle d'attente


Invité vieilledame

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Litérature. Rubriques écrits personnels. Essais.

Quand ma soeur aînée est entrée au lycée (*), elle a eu besoin de fournitures scolaires différentes de celles qu'on exigeait pour les classes primaire. Elle avait, entre autre, le privilège d'avoir un classeur garni d'intercalaires de couleurs dans lequel elle rangeait ses feuilles de cours. Je le trouvais magnifique! Il devint très vite pour moi, qui devais encore écrire dans des cahiers de petits format et remplir soigneusement et dans l'ordre chaque page l'une après l'autre, le symbole de l'accession à un univers passionnant. Elle changeait de salle de classe après chaque cours, de multiples professeurs enseignaient des choses mystérieuses et intelligentes qui portaient des noms fascinants qui, mis ensemble, sonnaient comme le plus beau des poèmes: l'accusatif, le génitif, l'ablatif, le nominatif et le datif; sinus, cosinus et tangente; Les Perses, les Mèdes et les Hittites...

Ces mots magiques me donnaient un avant goût d'air pur, à moi qui dépérissais, presque asphyxiée dans la salle d'atente de la vie (la seule, croyais-je à l'époque) qui s'appelait "école primaire". Moi, je devais encore rester toute l'année dans la même salle de classe, avoir devant moi du jour de la rentrée à celui de la distribution des prix (*) la même maîtresse qui nous enseignait des connaissances si simples qu'une seule personne pouvait les transmettre. J'apprenais, comme tous les ans depuis le CE1, Henri IV et Louis XIV, les fleuves et les montagnes de France. Nous n'avions pas de cours mais des leçons, la biologie et la physique s'appelaient encore leçons de choses.

Ce classeur était comme la promesse que le futur serait cent fois mieux que le présent. Il me tardait d'y arriver enfin, à ce futur dans lequel les journées vaudraient enfin la peine d'être vécues. Ce futur devait me dédommager de l'ennui qui collait à ces interminables journées qui duraient chacune comme un mois entier... Quand moi, j'aurai un classeur, la vie sera enfin intéressante!

J'ai fini par avoir moi aussi un classeur. Il avait été réclamé par monsieur Gruffaz, mon premier professeur de français. Sur les intercalaires j'avais noté: études de textes; analyse grammaticale et logique; orthographe; grammaire; composition française. J'avais juste changé de salle d'attente. Elle s'appelait dorénavant lycée. Mais l'ennui est resté.

De salle d'attente en salle d'attente, je suis devenue une "presque vieille dame" qui a enfin compris que la vie n'était que maintenant. Le "un jour ce sera enfin bien" n'est jamais arrivé. Et il n'arrivera jamais.

Notes explicatives pour les plus jeunes (*): Avant 1966, le lycée faisait directement suite à l'école primaire. On y entrait donc en sixième, sur carnet scolaire pour les meilleurs élèves, et après un examen pour ceux dont les résultats laissaient un doute. Les élèves aux résulats moyens étaient orientés au "Cours Complémentaire" où ils arrêtaient leur scolarité générale en troisième.

La distibution des prix était un jour de fête. Les élèves endimmanchés et accompagnés de leurs parents devaient entendre un discours du maire et recevaient ensuite des livres en récompense de leurs notes. Les "prix d'excellence" et "d'honneur" montaient sur l'estrade pour les recevoir d ela main même du maire ou de ses adjoints.

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Membre, 73ans Posté(e)
Morfou Membre 56 732 messages
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Je me souviens de mon premier prix, celui de l'excellence de lecture à 3ans et 8/9mois!

En mai ou juin 54 et mon père était présent; il était rentré en avril d'Indochine où il avait passé 7ans!

Parti en 47 il n'était rentré qu'une fois en permission à Noël 49 et je suis née en septembre 50, 9 mois plus tard!

Ce qui fait qu'en dehors des photos,(et d'entendre parler de lui) je n'avais jamais connu mon père!

Et je lui offrais un prix d'excellence....ce qui n'a sans doute pas arrangé nos rapports père/fille, il me prenait pour quelqu'un d'à part incompréhensible! mon entrée en CP à 4ans n'a pas arrangé les choses non plus! même si je n'y suis restée qu'un trimestre!

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