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Principe de lecture et d'écriture

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Dompteur de mots

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Membre, Posté(e)
Dompteur de mots Membre 1 841 messages
Forumeur activiste‚
Posté(e)

De l'établissement d'un principe de lecture et d'écriture:

(où le héros s'immole sur une plaza communiste, saute en bungee au-dessus d'un trou noir, conquiert la princesse enfermée au sommet de la plus haute tour et donne une représentation du Clavier Bien Tempéré pour les notables réunis).

Antonin Artaud avait raison d’affirmer que toute l’écriture n’est que de la cochonnerie. On ne devrait jamais trop estimer l’écriture, trop estimer le poids des mots. Les mots ne sont rien, ou ne sont qu’à peine. Ils n’ont aucune réalité digne de ce nom, ils ne sont que des spectres qui rôdent entre les êtres et les hantent, et tentent de mélanger les fils de la toile qui relie les hommes. Les mots puent. On respecte beaucoup trop les livres. Chacun devrait se permettre au moins une fois dans sa vie la joie de brûler un livre, la joie de voir ses pages s’étioler et se noircir lentement, comme si le papier était soudainement envahit par un tel chaos de mots qu’il s’effondrait sous son propre poids, qu’il se submergeait sous sa propre vacuité. Il faut avoir vu au moins une fois dans sa vie un livre en cendres, ses mots en fumée comme des lambeaux de pensée dérisoires, éparpillés dans l’air, humiliés.

Là où je veux en venir, c’est que, essentiellement, l’écriture n’est qu’une occasion d’accéder à quelque chose, et non cette chose même. Par exemple, moi qui écris présentement, le ballet de mes doigts qui pianotent sur le clavier de l’ordinateur n’a de sens autre que celui de fournir au lecteur une occasion de sentir lui-même le sentiment qui m’anime. Mais ces mots ne sont pas le sentiment qui m’anime lui-même. Ils n’en sont qu’un déchet, un pet, une vomissure. Ces mots ne sont que de la matière à idolâtrie. Quiconque me lit de manière adéquate, de la manière dont je l’entends méprise mon écriture, car ce n’est que le sentiment qui habite cette écriture qu’il aime.

Quel est-il ce sentiment ? Oh mais je ne fais que vous donner matière à le nommer. Je vous ponds des guirlandes de mots puants. Mais qu’est-ce que le « nommer » d’un sentiment devant son « sentir » ? Qu’est-ce par exemple que de dire ce qu’est une œuvre d’art lorsque l’on peut la ressentir, en vivre l’expérience en sa propre chair ? Le dire n’est jamais que l’élan du corps dans le vide, l’élan du corps qui cherche une surface dans le vide pour s’y frapper, pour s’y éprouver. Dire « je t’aime », cela n’est jamais que le bruissement farfouilleur du corps qui cherche, qui tire ses antennes dans l’espace afin de détecter le réceptacle possible de son amour débordant. C’est pourquoi sous l’apparence, sous la comédie de l’amour, dire « je t’aime » ne se fait que sous un mode inquisiteur. C’est une demande, et il s’en faut toujours de peu pour que cela ne devienne une supplication. Dire « je t’aime » suppose toujours l’attente d’entendre la réciproque, que l’autre rende ce « je t’aime ». Autrement, c’est l’égarement, c’est le pathétique de l’amour non réciproque, analogue à celui de l’écrivain incompris, dont les lecteurs se contentent d’idolâtrer ses mots, ses livres, sa prestance d’écrivain et en oublie le vibrant appel à l’amour qu’il leur avait lancé. Ces lecteurs sont eux-mêmes analogues à ce mufle qui recevrait les déclarations d’amour de sa dulcinée sans jamais lui donner la réciproque, cela tout en continuant d’entretenir la relation qui les unit en la laissant dans l’expectative.

Je ne dirai pas que les sentiments qui animent mon écriture sont les miens, pas plus que l’amour que j’éprouverais pour une demoiselle serait le mien. C’est à Dieu et à lui seul qu’appartiennent de pareilles choses. Mon esprit pourri n’est pas assez large pour recevoir de telles doses d’immensité, il n’est pas assez solide pour encaisser de tels impacts. Je suis vulgaire et faible. Je ne suis que la courroie, le mécanisme, la main, l’esclave. Je ne suis bon qu’à pondre des mots, des guirlandes de mots imbéciles. Mais ces mots ne portent-ils pas alors l’empreinte du Dieu ? Je ne sais pas, peut-être, ou probablement pas. Ne sont-ce pas là, sentiment et écriture, deux choses qui s’approchent infinitésimalement près sans jamais se toucher ? L’écriture n’est-elle pas fondamentalement asymptotique ? L’écrivain n’est-il pas semblable à ce pilote d’avion qui aurait le dessein absurde de frôler en rase-mottes la mer mêlée au soleil qui s’étend à l’horizon, tout en sachant que tout contact lui serait fatal ? Car l’écrivain qui finit par raser l’écume de son sujet s’y consume automatiquement. Écrire n’est jamais l’abandon dans le large, ce n’est jamais le laisser-aller vers le Dieu, c’est au contraire un acte de retenue, de mise en tension. Il s’agit de reléguer Dieu à l’antichambre et de le faire attendre aussi longtemps que nécessaire. Mais voilà : le danger est toujours pour le visiteur de passer outre l’antichambre, de ne pas y apercevoir cet humble mais grandiose personnage qui attend, et de n’avoir d’yeux que pour le faux maestro qui joue du piano de l’autre côté de la porte.

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Membre+, 51ans Posté(e)
Ocytocine Membre+ 17 768 messages
Baby Forumeur‚ 51ans‚
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C'est vrai. C'est pourquoi tant de gens s'écoutent parler ou se lisent écrire.

Mais la lecture est aussi un vecteur d'émotion comme l'art. Les émotions nous rendent humains, nous rendent vivants. En cela l'écriture mérite tout de même plus de respect.

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Membre, 76ans Posté(e)
Blaquière Membre 18 680 messages
Maitre des forums‚ 76ans‚
Posté(e)

C'est parce que le nouveau gouvernement n'est pas assez à gauche que tu déprimes ?

Modifié par Blaquière
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Membre, 76ans Posté(e)
Blaquière Membre 18 680 messages
Maitre des forums‚ 76ans‚
Posté(e)

"Entre nous" c'est le bonhomme qui est derrière les mots qui compte, pas les mots eux-mêmes. Inutile de les mépriser ni le langage ni la parole ou l'écriture en général qui en dépit de toutes les imperfections qu'on leur connait valent pour une projection de notre esprit.

Et ce principe d'en revenir toujours à Dieu, il me semble que c'est en premier pour se cacher soi.

Et en second pour écraser d'emblée les contradicteurs éventuels.

(Dieu ? OK ! Chuis pas à la hauteur...)

Il faudrait jouer franc jeu.

Et ne pas dire "Dieu, peut-être, peut-être pas", et faire tantôt comme si et tantôt comme si pas.

Mais Dieu j'y crois ou j'y crois pas. Il n'y a pas d'objectivité dans ce domaine.

Les dés sont pipés d'entrée de jeu par notre position.

Et l'amour ?

"Je t'aime" ne serait qu'attente de réciprocité ?

Meuh non !

Dire "je t'aime" c'est se livrer pieds et points liés !

C'est le plaisir de fondre, de se fondre.

De s'effondrer vers l'autre. Ne rien espérer d'autre que son propre affaissement...

(Un joli mot en l'occurrence !)

Modifié par Blaquière
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Invité Leveilleur
Invités, Posté(e)
Invité Leveilleur
Invité Leveilleur Invités 0 message
Posté(e)

De l'établissement d'un principe de lecture et d'écriture:

Antonin Artaud avait raison d’affirmer que toute l’écriture n’est que de la cochonnerie. On ne devrait jamais trop estimer l’écriture, trop estimer le poids des mots. Les mots ne sont rien, ou ne sont qu’à peine. Ils n’ont aucune réalité digne de ce nom, ils ne sont que des spectres qui rôdent entre les êtres et les hantent, et tentent de mélanger les fils de la toile qui relie les hommes. Les mots puent. On respecte beaucoup trop les livres. Chacun devrait se permettre au moins une fois dans sa vie la joie de brûler un livre, la joie de voir ses pages s’étioler et se noircir lentement, comme si le papier était soudainement envahit par un tel chaos de mots qu’il s’effondrait sous son propre poids, qu’il se submergeait sous sa propre vacuité. Il faut avoir vu au moins une fois dans sa vie un livre en cendres, ses mots en fumée comme des lambeaux de pensée dérisoires, éparpillés dans l’air, humiliés.

Venant de vous j'ai du mal à le croire...

Quiconque me lit de manière adéquate, de la manière dont je l’entends méprise mon écriture, car ce n’est que le sentiment qui habite cette écriture qu’il aime.

Ou méprise surtout les idées, non ? Car après tout on peut accorder à votre écriture une certaine forme de qualité, ou du moins on y sent bien l'effort qui la fait apparaître dans ses formes, cela me rappelle une de mes ex-femmes lorsqu'elle se préparait devant sa glace pendant des heures avant de sortir.

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Membre, If you don't want, you Kant..., Posté(e)
deja-utilise Membre 5 705 messages
If you don't want, you Kant...,
Posté(e)

Très beau texte Dentelle de mots, et je suis ravi de la tournure de tes dires, qui se rapprochent des miens, mais beaucoup, beaucoup moins lyriques:

Des intentionnalités, c'est ça, " qu'est ce que l'autre voulait dire ", ses intentions sur le discours, mais aussi ses desseins certes. Je reconnais bien volontiers que nos échanges, verbaux ou pas, nous permettent bien d'autres choses que d'envoyer des informations "rationnelles" d'un "esprit" dans un autre, il y a bien sûr l'état émotionnel, le ressenti, le sentiments, l'humeur, des faits passés, etc...

...tout comme dans un dialogue c'est ce que l'autre veut signifier qui est important, la véritable information pertinente, et toujours pas le protocole ou le vecteur de transmission/d'expression, ils sont de deuxième importance!

J'en reviens aussi à l'importance de ce que veut signifier notre interlocuteur, tu as dû aussi bien que moi, te rendre compte que parfois, la personne se fourvoie dans ses explications, dans son vocabulaire ou sa démonstration, mais que l'on rectifiait de nous même volontairement/consciemment ou pas, c'est plus facile avec un enregistrement ou si on est plusieurs, et que donc par ces "lapsus" on se rend compte que nous ne prenons pas au pied de la lettre ce qui est dit, mais que nous décryptons ce que l'autre veux dire! Il en va exactement de même avec les dictons, expressions et proverbes, c'est ce qu'ils signifient qui importe, pas ce qu'ils disent grammaticalement/"lexicalement". Les phrases ne sont qu'un moyen parmi d'autres de faire passer une chose d'une tête dans une autre, mais également pour réfléchir, ces constructions verbales ne font que renvoyaient à des images, des expériences, d'ailleurs j'en profite pour dire que l'écriture n'est compréhensible qu'à partir du moment que l'on lit intérieurement les mots, pas juste en les regardant, ce qui montre qu'il y a bien des associations entre les sons et les idées qui s'y rattachent et pas uniquement avec le vocabulaire, quelqu'il soit. Il a donc des automatisme en nous, qui nous permet de transformer le langage en autre chose de plus tangible, un décodeur qui ne s'arrête pas à chaque mot, mais crée aussi des relations de probabilités/d'évocations entre ces mots, nous leur donnons du sens, et celui-ci n'est pas limité aux vocabulaire ni à la syntaxe ou à la grammaire, nous transcendons ceux-ci, c'est pourquoi j'ai voulu relativiser l'importance du langage sur notre cognition, le langage n'est qu'un outil, certes faillible, mais qu'un intermédiaire, un moyen, pas le but lui même, ça serait un peu comme confondre un protocole de communication avec le message lui même, et même si celui-ci est brouillé, on peut grâce à l'intelligence du récepteur se permettre d'avoir un réseau de communication non fiable, un protocole faillible/perfectible/lacunaire.

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Membre, [Sans sous-titre - Version Originale Intraduisible], Posté(e)
Anna Kronisme Membre 2 134 messages
[Sans sous-titre - Version Originale Intraduisible],
Posté(e)

J'ai aimé te lire, Dentelle de mots.

Et cette dimension d'aimer les mots est abordée, dans ton développement, d'une façon trop égocentrique. Dans l'affirmation que le lecteur est un mangeur de vomissure, un renifleur de pet, un trieur de déchets, il y a comme un refus de se positionner, soi, en tant que lecteur.

Lorsque nous lisons, nous ne sommes que très peu centrés sur l'auteur lui-même, en réalité.

Nous cherchons à nous découvrir, nous reconnaître et parfois même à nous comprendre. C'est lorsque nous n'y parvenons pas ou au contraire lorsque nous y parvenons totalement que l'élan d'aller vers l'auteur va naître. Nous allons vouloir savoir qui il est afin de nous identifier à lui ou au contraire le rejeter pleinement.

Alors, oui, les mots sont dérisoires puisqu'ils ne nous représenteront jamais dans notre entièreté... aussi bien pour celui qui les écrits que celui qui les lit mais, pour autant, dès lors qu'ils sont posés, ils permettent la libération d'une inconnue composante de notre être.

Cette inconnue devenue connue et "nommée" pourra laisser place à l'exploration d'une nouvelle inconnue.

Les mots, que nous les écrivions ou les lisions, sont un moyen d'évolution à ne pas écraser du pied.

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Invité Leopardi
Invités, Posté(e)
Invité Leopardi
Invité Leopardi Invités 0 message
Posté(e)

Ce qui me frappe le plus dans ton post DDM et dans la réponse d'AnnaK, c'est que les mots n'y sont qu'une manière d'exprimer soi-même, une totalité qu'on voudrait les voir épuiser mais qu'ils sont incapables de servir correctement... C'est très très égocentrique !

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Membre, [Sans sous-titre - Version Originale Intraduisible], Posté(e)
Anna Kronisme Membre 2 134 messages
[Sans sous-titre - Version Originale Intraduisible],
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"Très très égocentrique" se rapproche-t-il du "trop égocentrique" que j'abordais ci-dessus ?

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VIP, Gonade Absolutrice, Posté(e)
yop! VIP 20 446 messages
Gonade Absolutrice,
Posté(e)

Les mots : ils sont le moyen d'aller au-delà d'eux-mêmes.

Nous ne vivons pas uniquement dans un monde de mots. Nous le savons. Ils ne transmettent pas tout, pas forcément bien, on ne peut pas tout nommer. Ils sont là par défaut, des béquilles, mais sans eux...

Je pense que tu (Dentelle de mots) accordes justement trop d'importance aux mots, c'est pour ça que tu as l'air si déprimé par leur faiblesse, que tu as peur de tout ce qu'ils ne permettent pas, des approximations, la peur qu'ils supplantent ou déforment ce qui est.

Les mots peuvent aussi servir à faire de la bouillie. Ça fait partie des effets secondaires. Mais sont-ce eux les fautifs ?

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Membre, [Sans sous-titre - Version Originale Intraduisible], Posté(e)
Anna Kronisme Membre 2 134 messages
[Sans sous-titre - Version Originale Intraduisible],
Posté(e)

C'est presque amusant que Blaquière et toi trouviez un air déprimé à Dentelle de mots. Je l'ai trouvé, au contraire, très passionné et en ébullition dans cet écrit... comme pris dans une impatience de vivre au delà de ce qui peut se communiquer. A qui la faute ? Héhé !

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VIP, Gonade Absolutrice, Posté(e)
yop! VIP 20 446 messages
Gonade Absolutrice,
Posté(e)

Peut-être. Ce sont les deux faces d'un même état.

Pour prendre une métaphore mathématique, l'écriture tend à définir les choses. Comme cette courbe qui ne touche jamais vraiment le bord du graphique.

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Membre, Posté(e)
Dompteur de mots Membre 1 841 messages
Forumeur activiste‚
Posté(e)

Pour prendre une métaphore mathématique, l'écriture tend à définir les choses. Comme cette courbe qui ne touche jamais vraiment le bord du graphique.

Tu veux dire que l'écriture est asymptotique ? Tiens tiens... J'ai déjà lu ça à quequ'part ! ;)

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Membre, 76ans Posté(e)
Blaquière Membre 18 680 messages
Maitre des forums‚ 76ans‚
Posté(e)

"Je ne dirai pas que les sentiments qui animent mon écriture sont les miens, pas plus que l’amour que j’éprouverais pour une demoiselle serait le mien. C’est à Dieu et à lui seul qu’appartiennent de pareilles choses. Mon esprit pourri n’est pas assez large pour recevoir de telles doses d’immensité, il n’est pas assez solide pour encaisser de tels impacts. Je suis vulgaire et faible. Je ne suis que la courroie, le mécanisme, la main, l’esclave. Je ne suis bon qu’à pondre des mots, des guirlandes de mots imbéciles."

-- Comediante !

Ceci dit, je pense aussi que rien de ce qui me définit n'est vraiment mien, n'est vraiment moi.

Dans le détail.

Mais mon "être" n'est pas à chercher dans une transcendance (Dieu) il n'est que cette accumulation, somme, totalité fortuite, qui découle d'une unité accidentelle mais nécessaire et inévitable de temps et de lieu. (Mon temps et mon lieu.)

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Membre, Posté(e)
Dompteur de mots Membre 1 841 messages
Forumeur activiste‚
Posté(e)
Ce qui me frappe le plus dans ton post DDM et dans la réponse d'AnnaK, c'est que les mots n'y sont qu'une manière d'exprimer soi-même, une totalité qu'on voudrait les voir épuiser mais qu'ils sont incapables de servir correctement... C'est très très égocentrique !

Mais non justement ! Tout le problème de ce texte, du point de vue de l’auteur, consiste justement à se demander de quelle manière les mots peuvent le mieux servir le lecteur. C’est un acte de générosité ultime : « je suis faible et vulgaire » dit l’auteur – en l’occurrence moi, et mes mots ne sont que des pets. Tout ce qui est m’est personnel, anecdotique, tout ce qui sert la fanfaronnerie de mon Moi, tout le temps et l’attention que j’aspire à sucer hors de vos âmes par la danse hypnotique des mots – je veux que tout cela explose, je veux que la toile des mots explose, que la dialectique et que la logique ne soient que le support obligé d’un point d’appui mutuel, mais qu’il s’effrite dès le premier abord afin de révéler leur envers, et en faire émaner le suc le plus profondément celé du langage. Car ce qui tue toute entreprise de communication, c’est la complaisance des protagonistes à surfer sur la vague des mots, au lieu d’y plonger, autant de la part de l’auteur que du lecteur.

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Membre, Posté(e)
Dompteur de mots Membre 1 841 messages
Forumeur activiste‚
Posté(e)

Ou méprise surtout les idées, non ? Car après tout on peut accorder à votre écriture une certaine forme de qualité, ou du moins on y sent bien l'effort qui la fait apparaître dans ses formes, cela me rappelle une de mes ex-femmes lorsqu'elle se préparait devant sa glace pendant des heures avant de sortir.

Pourtant, j'écris très rapidement. Ce qui m'est interminable, c'est le temps que je prends à mettre mes idées en place. J'essaie de m'interdire de réfléchir sur un mode purement dialectique, où il ne s'agirait que de mettre des informations en relation. J'aime que ce que j'écris ait à moi-même l'épaisseur d'un certain mystère. J'aime être surpris par ce que j'écris. Cela me demande de longs moments de rumination, de longs moments de méditation. Par exemple, entre chacune des phrases que j'écris présentement, je puis laisser perdre mon regard et mon esprit dans la contemplation de l'hydranger à tige ou du lilas japonais au travers de la fenêtre, pendant plusieurs minutes. Jusqu'à ce que j'aie pratiquement oublié le sujet en cause en fait. Et quoi ? Jusqu'à ce que je me sois perdu sans doute, et que je me sois par le fait même mieux retrouvé. Mais lorsque ça y est, la phrase est éclose, prête à être cueillie, et disposée au sein du bouquet. Je n'ai alors pas à me questionner sur le rythme à donner au phrasé, sur le style de la syntaxe ou sur le choix de l'adjectif.

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Invité Leveilleur
Invités, Posté(e)
Invité Leveilleur
Invité Leveilleur Invités 0 message
Posté(e)

Croyez que je respecte et apprécie ce que vous faites.

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Membre, [Sans sous-titre - Version Originale Intraduisible], Posté(e)
Anna Kronisme Membre 2 134 messages
[Sans sous-titre - Version Originale Intraduisible],
Posté(e)

Pourtant, j'écris très rapidement. Ce qui m'est interminable, c'est le temps que je prends à mettre mes idées en place. J'essaie de m'interdire de réfléchir sur un mode purement dialectique, où il ne s'agirait que de mettre des informations en relation. J'aime que ce que j'écris ait à moi-même l'épaisseur d'un certain mystère. J'aime être surpris par ce que j'écris. Cela me demande de longs moments de rumination, de longs moments de méditation. Par exemple, entre chacune des phrases que j'écris présentement, je puis laisser perdre mon regard et mon esprit dans la contemplation de l'hydranger à tige ou du lilas japonais au travers de la fenêtre, pendant plusieurs minutes. Jusqu'à ce que j'aie pratiquement oublié le sujet en cause en fait. Et quoi ? Jusqu'à ce que je me sois perdu sans doute, et que je me sois par le fait même mieux retrouvé. Mais lorsque ça y est, la phrase est éclose, prête à être cueillie, et disposée au sein du bouquet. Je n'ai alors pas à me questionner sur le rythme à donner au phrasé, sur le style de la syntaxe ou sur le choix de l'adjectif.

Héhé ! Je me retrouve dans ce mystère. Dès lors que l'écrit est commis, je serais capable de le relire avec intérêt si quelqu'un me le présentait sans me dire qu'il est de moi. Je me souviens même avoir "liké", à l'époque où je fréquentais le fameux réseau social tout bleu, un ami qui avait plagié un de mes aphorismes... qui datait déjà de quelques semaines, tout de même (jsuis pas sénile).

Moui, je cesse de m’épancher... car j'entends déjà quelques uns nous hurler à l'égocentrisme...

Pas si fort !

Pour en revenir au sujet, je reste dans cette idée qu'il s'agit bel et bien de la libération d'une inconnue et que lorsque la voici posée, elle devient claire et propre mais, la quête d'une suivante la renvoie à l'anonymat pour ne pas dire aux oubliettes.

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VIP, Gonade Absolutrice, Posté(e)
yop! VIP 20 446 messages
Gonade Absolutrice,
Posté(e)

Mais non justement ! Tout le problème de ce texte, du point de vue de l’auteur, consiste justement à se demander de quelle manière les mots peuvent le mieux servir le lecteur. C’est un acte de générosité ultime : « je suis faible et vulgaire » dit l’auteur – en l’occurrence moi, et mes mots ne sont que des pets. Tout ce qui est m’est personnel, anecdotique, tout ce qui sert la fanfaronnerie de mon Moi, tout le temps et l’attention que j’aspire à sucer hors de vos âmes par la danse hypnotique des mots – je veux que tout cela explose, je veux que la toile des mots explose, que la dialectique et que la logique ne soient que le support obligé d’un point d’appui mutuel, mais qu’il s’effrite dès le premier abord afin de révéler leur envers, et en faire émaner le suc le plus profondément celé du langage. Car ce qui tue toute entreprise de communication, c’est la complaisance des protagonistes à surfer sur la vague des mots, au lieu d’y plonger, autant de la part de l’auteur que du lecteur.

Tu fais peut-être une erreur en imaginant pouvoir prendre en charge ton lecteur à ce point-là, non ? Je veux dire, par ta seule abnégation. C'est aussi à lui de savoir se servir de tes mots, dans tes mots, de voir au-delà, etc... Certaines personnes lisent très bien, mieux qu'on écrit. D'autres resteront hermétiques à tout effort et s'arrêteront sur le texte à un degré primaire, s'attacheront trop au mot.

Je ne vois pas le mot comme un pet, plutôt comme un carburant -qui devient déchet une fois consumé- mais un carburant partagé. Ce sont "nos" mots, finalement.

Tu veux dire que l'écriture est asymptotique ? Tiens tiens... J'ai déjà lu ça à quequ'part ! ;)

Hum... je ne comprends pas ce clin d'oeil. Il faut clarifier :

- je n'ai que peu écrit sur d'autres forums

- oui, je sais, je me répète mais parce que comme Anna Kronisme, j'oublie vite ce que j'ai écrit

- je ne vois pas à quel auteur tu fais référence

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Membre, 48ans Posté(e)
Frelser Membre 5 478 messages
Forumeur balbutiant‚ 48ans‚
Posté(e)

On oublie souvent que nous ne faisons qu'utiliser des termes à jamais approximatifs lors de nos communications et que l'interprétation et les brouillages conduisent inexorablement à des déformations et des pertes de données (manque de concentration, saut logique etc.).

Les études sur les techniques de communications vont bon train ces dernières décennies, mais cela ne fait que confirmer la complexité de cette pratique impulsive qui nous anime, conduisant à la recherche et au partage incessant.

Même à parler la même langue, chacun a une appréhension toute personnelle des mots, même parfois entre spécialistes d'une branche scientifique très pointue. Par exemple, les frontières entre les couleurs, ou les sons ne sont jamais qu'approximatives et les termes varient d'une langue à une autre. Certaines ethnies rassemblant ainsi le jaune, l'orange et le rouge dans un seul et même terme... Les eskimos pour qui la neige est vitale ont des dixaines de mots pour les désigner selon leur éclat, leur dureteté. Là où pour un français une neige reste une neige ?

Le umami (うまみ, umami), est ainsi une saveur autre que ceux que nous connaissons ici, signifiant délicieux chez les japonais...

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