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21 mars 1963 : Fermeture d'Alcatraz.


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21 mars 1963 : Fermeture d'Alcatraz.

La prison fédérale américaine d'Alcatraz située dans la baie deSan Francisco, est vidée de ses derniers détenus sur ordre de Robert. F Kennedy. L'île-prison d'Alcatraz était devenue un centre de détention fédéral en 1933 spécialement conçu pour abriter les prisonniers les plus dangereux.

Franklin Delano Roosevelt mit fin à la prohibition au printemps de 1933. Les lois puritaines des années précédentes avaient favorisé le développement du jeu clandestin, la production illégale d'alcool et le grand banditisme, contre lequel on voit lutter Elliott Ness et son équipe d'Incorruptibles. La Grande Dépression avait lancé sur les routes des milliers de familles sans moyen d'existence : truands notoires et petits voleurs endurcis foisonnaient !

Le nom d'Alcatraz sonna lugubrement jusqu'aux années 1960. Bâtie sur une île noyée de brouillards, entourée de puissants courants capables de vaincre le meilleur nageur, c'était la prison d'où l'on ne s'échappe pas. Les détenus étaient les plus durs, les plus violents, les plus rebelles du système pénitentiaire américain. Al Capone, en 1934, fut de la première classe. De sa prison d'Atlanta, il avait continué de diriger ses affaires : ici, il n'en était pas question ! Moins de cinq ans après son arrivée, atteint de syphilis, il fut transféré dans une prison du continent et relâché peu après. Capone mourut d'une crise cardiaque en 1947. De la même façon, beaucoup d'autres prisonniers furent renvoyés de l'île pour des raisons de santé. Pendant les 39 ans que dura la prison, 22 seulement sur un total de 1545 détenus y terminèrent leur existence : huit furent assassinés, cinq se suicidèrent, quinze moururent de maladie.

Neuf périrent en essayant de s'évader... Du moins le croit-on, car cinq ne furent jamais retrouvés. Ted Cole et Ralph Roe, en décembre 1937, Frank Lee Morris et les frères Anglin, en juin 1962, ne firent plus jamais parler d'eux et furent officiellement portés disparus.

- "Si l'on ne pouvait pas nager, il fallait une embarcation !"

C'était le raisonnement de Frank Morris : une cinquantaine d'imperméables, acquis auprès des autres prisonniers, permirent à Morris, John et Clarence Anglin, ainsi qu'un nommé Allen West, de fabriquer des bouées et un radeau pneumatiques de 4 mètres sur 2. Après cinq mois de préparation, Morris et les Anglin gagnèrent les toits par les gaines de ventilation. West, coincé dans sa cellule par une vis récalcitrante, ne put les rejoindre à temps et fournit plus tard les détails du projet aux enquêteurs.

Dans les jours qui suivirent l'évasion, rien ne signala la présence à terre des trois malfrats. Au contraire, des marins virent flotter dans l'océan un cadavre dont les vêtements ressemblaient fort à ceux des prisonniers. Leurs familles elles-mêmes n'entendirent plus jamais parler des trois hommes... On en conclut que leur matériel de fortune n'avait pas résisté à la mer : selon toute vraisemblance, Morris et les frères Anglin s'étaient noyés. Dans son film "L'évadé d'Alcatraz", Clint Eastwood joue le rôle de Frank Morris : il laisse planer le doute _et l'espoir ! sur le succès de la tentative.

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La prison d'Alcatraz (06/02)

L'île fut explorée en 1774. Sans arbres, couverte d'une faible épaisseur d'humus, vêtue seulement d'une herbe chiche et de quelques buissons, elle ne présentait pas d'intérêt économique. L'explorateur, le lieutenant Juan Manuel de Ayala, la nomma Ile aux pélicans (Isla de las alcatraces). Plus personne ne s'en occupa, sauf ceux qui venaient récolter les oeufs des oiseaux. Lorsque les Américains occupèrent la Californie, lorsque, à la même époque, la présence d'or dans la Sierra Nevada se fit jour, San Francisco devint le premier port de la côte. La piraterie restait courante, la Guerre de Sécession était latente... On se préoccupa de défendre la ville : en retrait du Golden Gate, couvrant la ville et la côte nord de la baie, l'île occupait une position idéale.

Dès 1854, elle est équipée de 11 canons. Sept ou huit ans plus tard, elle en a 100 supplémentaires : les plus gros font 300 mm à la bouche et envoient leurs projectiles à près de cinq kilomètres. Toutes les précautions contre une possible agression sudiste sont prises : dès le début des hostilités, le commandant militaire de la région a fait enfermer dans l'île 10 000 fusils et leurs munitions pour empêcher leur saisie par une faction confédérée. Mais la Californie reste dans l'Union. Après la Guerre Civile, l'évolution des armes et des techniques de combat rend le fort moins efficace. Isolé, déjà occupé par la troupe, il évolue en prison militaire et le devient officiellement en 1907.

Le Génie avait eu besoin de terre pour les travaux de fortification : il alla la chercher dans l'île voisine d'Angel Island. Elle contenait des graines : une végétation nouvelle se développa. Les femmes des officiers voulaient des jardins : les prisonniers de corvée repiquèrent les fleurs dans leurs plates-bandes. Plus personne n'arrose depuis longtemps, mais la brume épaisse de l'été et les tempêtes de l'hiver amènent assez d'humidité pour que, toujours visibles, ces jardins disparus charment les visiteurs.

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L'île, sur la houle de la baie (06/02)

La tradition orale prétend qu'avant l'arrivée des Européens, les indiens auraient utilisé l'île comme lieu de bannissement temporaire. Si ce fut le cas, cette coutume cessa pendant la période espagnole, et l'île ne vit de nouveaux indigènes qu'à la fin du XIXme siècle. Les premiers étaient des prisonniers de guerre, Modocs de la bataille des Lava Beds ou compagnons de Geronimo. En 1895, dix-neuf Hopis furent emprisonnés pour avoir refusé la parcellisation des terres tribales et l'envoi de leurs enfants dans des internats. Pour leur montrer l'innocuité de cette magie blanche, on fit visiter à plusieurs d'entre eux des écoles de San Francisco, puis on les laissa rentrer chez eux après qu'ils eussent juré de ne plus interférer dans l'action de l'administration. Mais la résistance continua : des indiens furent incarcérés à Alcatraz jusqu'aux premières années du XXme siècle. La prison passa des mains des militaires à celle des civils : le pénitencier fédéral, mis en service en 1934, fut désaffecté en mars 1963.

Là où les dictatures ne l'empêchaient pas, les années 1960 furent celles d'une libération morale : hippies, minijupe, concerts pops et liberté sexuelle faisaient pendant à la guerre au Viêt-Nam. John Kennedy, assassiné en 1963, Martin Luther King Jr en 1968, affirmèrent le devoir de l'humanité d'aller vers des sociétés plus justes. On voyait les indiens sous un autre jour : les westerns ne les présentaient plus comme un élément du décor, romantique, suranné et plutôt nuisible, mais leur accordait soudain le statut d'êtres humains.

La Flèche brisée, en 1950, Les Cheyennes, en 1964, Un homme nommé Cheval, en 1969, Little Big Man, en 1970, contribuèrent à leur rendre leur dignité dans l'esprit du public. Les chefs au pouvoir, anéantis par la lame de fond d'une civilisation à laquelle ils n'appartenaient pas, respectaient les voies juridiques : la nouvelle génération voulut sortir d'un siècle d'abattement moral : mieux intégrée dans la société américaine, elle réagit par des moyens plus démonstratifs.

Après la Seconde Guerre Mondiale, dans les réserves, où vivent près de 80% des indiens, le chômage est supérieur à 60%. Le Bureau des Affaires Indiennes (BIA) engage une politique d'intégration, une sorte d'exode rural administré, destiné à fermer les réserves les moins productives et faire migrer leurs occupants vers les villes. Les réserves plus riches continueront d'exister mais sont concernées aussi : la pollution due à l'exploitation des mines convient mal à une population résidente.

On fait miroiter un emploi, une maison convenable : on trouve des volontaires pour quitter leur tribu et rejoindre une métropole. Mais la plupart ne trouvent que petits boulots, places d'ouvriers, de figurants... et des loyers élevés. Certains retournent à la morne vie des réserves : au moins, leur parentèle est là. D'autres restent et essayent de survivre. Réserve ou pas, beaucoup deviennent la proie de l'alcool ou de la drogue.

Après la fermeture de la prison, aucune branche de l'administration fédérale ne veut d'Alcatraz. Des journaux le disent. Des Sioux lakotas de Californie se mettent en tête de revendiquer des parcelles du terrain inutilisé : le traité de 1868, signé après la victoire de Red Cloud, souvent bafoué mais toujours en vigueur, mentionne que terrains et bâtiments fédéraux inoccupés pourraient être utilisés par les Lakotas pour leur usage personnel. Consulté, un avocat, confirme.

Le 9 mars 1964, Richard McKenzie, Al "Chalk" Cottier, Garfield Spotted Elk, Walter Means et Martin Firethunder Martinez prennent pied sur l'île. Belva, l'épouse de Cottier, s'est occupé des recherches légales. Les cinq hommes jalonnent leurs parcelles et placardent une déclaration :

Conformément à la loi des Etats-Unis, nous, comme indiens Sioux, nous installons sur des terrains fédéraux inutilisés. Parce que nous sommes des êtres humains civilisés, et comprenons que cette action nous procure des terrains à coût nul, nous déclarons vouloir payer le prix le plus élevé établi par le gouvernement pour de la terre californienne _ 47 cents l'arpent. Nous proclamons notre intention de permettre au gouvernement des Etats-Unis de continuer à exploiter le phare, dans la mesure où il n'interfèrera pas avec notre colonie

Les 47 cents sont le prix que paye le gouvernement pour racheter la terre des réserves aux indiens.

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