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François Villon : deux approches


Mavole

Messages recommandés

Membre, 37ans Posté(e)
Mavole Membre 260 messages
Baby Forumeur‚ 37ans‚
Posté(e)

Bonjour!

Vous trouverez en librairie quelques ouvrages sur Maître François de Montcorbier, dit Villon. L'intégrale de son oeuvre est certes un monument de la poésie française, mais comment la comprendre? Et l'ancien français peut en rebuter plus d'un ; par exemple, les éditions Jean de Bonnot proposent une édition superbe du Lais et du Testament, mais comment décrypter ces vers étranges, remplis de sous-entendus et d'images incompréhensibles pour nous? Les vers de Villon possèdent presque toujours des sens cachés, des références, et une lecture superficielle n'en dévoile pas la profondeur.

Si vous souhaitez découvrir Villon au delà de la Ballade des pendus et de celle des Dames du temps jadis, vous rencontrerez une foule d'ouvrages. Mais le personnage historique et la légende se confondent : coquillard? assassin, poète des princes? quid de sa disparition?

Je ne prétend pas apporter ici les réponses précises, simplement vous parler de deux livres - parmi beaucoup d'autres, le sujet est riche - qui abordent le personnage.

Le plus récent est celui de Jean Teulé : Je, François Villon. Cet ouvrage est riche en anecdotes, le style est riche, et c'est un véritable plaisir de suivre Villon d'une manière si vivante. Les dialogues, souvent crus, offrent une certaine perspective pour comprendre le Maître, et contribuent fortement à mystifier Villon. L'ouvrage de Jean Teulé aborde le poète sous l'angle de sa légende, et favorise le souffle épique d'une vie d'aventures, du sublime au macabre. En quelques mots, c'est un ouvrage de passion à conseiller aux amoureux des vers, plus soucieux d'illuminer ses textes et d'exalter la légende du poète maudit que celui d'une biographie fidèle.

Le second est le François Villon de Jean Favier. Inutile de revenir sur la réputation de l'un des plus grands historiens du 20e siècle : le sérieux est garanti par le nom de l'auteur, et à ceux qui en doutent, il n'est qu'à considérer l'abondante bibliographie, les notes par centaines, les références, et la prudence adoptée sur les sujets encore mal connus. L'ouvrage de Favier replace l'homme dans son contexte, confronte les idées du poète à celles de son temps, et s'attache à décrire minutieusement ce Paris du milieu du XV siècle. C'est un ouvrage d'histoire avant tout : Villon est le prétexte aux explications, et non l'inverse. La biographie est plus prudente que celle donnée par Teulé : le Villon est moins d'aventures que de malchance, et son parcours est plus souvent guidé par l'appel du ventre que par celui de la destinée. Moins épique, plus difficile, mais infiniment plus précis : les poèmes sont déchiffrés à la lumière des études les plus récentes, les légataires du Testament sont identifiés, leur héritage expliqué.

Une anecdote illustre bien la différence entre les deux approches : selon Teulé, la Ballade des langues ennuyeuses fait référence à un hypothétique collier de langues arrachées aux victime d'un inquisiteur, l'évêque d'Orléans Thibaud d'Aussigny. Pour Favier, il s'agit plutôt d'une critique des bavards de son temps, aux styles fades et aux discours fort éloignés de la réalité.

Et pour aller plus loin, le Villon de Marcel Schwob (qu'on est loin, ici, de Monelle!) s'attache aux textes plus qu'au personnage : décryptage du jargon, des figures, hypothèses sur les références... Commencer Villon par cet ouvrage semble difficile, c'est pointu et une solide connaissance du contexte est requise. Mais ô combien passionant!

Voilà, en espérant vous donner le goût de (re-)découvrir la vie, selon votre goût, d'un poète maudit ou d'un génie des lettres.

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  • 3 semaines après...
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Invité Pandore_75
Invités, Posté(e)
Invité Pandore_75
Invité Pandore_75 Invités 0 message
Posté(e)

"Ce faisant, je m'entroubliay, Non pas par force de vin boire, Mon esprit comme lyé"

Précurseur des Poètes maudits peut être, mais génie des lettres sans aucun doûte.

L'oeuvre de Villon est passionnante, malgré l'ancien français par toujours évident.

Bien qu'il ait suivi les stéréotypes de la culture commune de son époque tels que la mort, l'injustice, la vieillesse, l'amour impossible etc... Il s'est tout de même démarqué à sa manière, ce qui a fait naître la "légende Villon"

Merci Mavole pour cet aparté médiéval.

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Membre+, Imperoratriz à temps partiel, Posté(e)
ManhattanStory Membre+ 14 228 messages
Imperoratriz à temps partiel,
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Topic trés intéressant et riche, mettant à l'honneur un de nos plus grands poètes.

En effet, il y a plusieurs manières d'interpréter certains de ses textes de par l'historicité différente, ce qui les rend encore plus précieux.

Jean teulé? il n'a pas commencé sur Canal +?

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Invité Pandore_75
Invités, Posté(e)
Invité Pandore_75
Invité Pandore_75 Invités 0 message
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Jean teulé, Nul part ailleurs, canal + et dans l'assiette Anglaise non ? (sans grande conviction...)

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Membre+, Imperoratriz à temps partiel, Posté(e)
ManhattanStory Membre+ 14 228 messages
Imperoratriz à temps partiel,
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C'est ça, merci :smile2:.

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Membre, 37ans Posté(e)
Mavole Membre 260 messages
Baby Forumeur‚ 37ans‚
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Le bouquin de Jean Teulé est assez déroutant, il use, abuse du macabre (et du grivois), et il prête au poète des pensées souvent anachroniques. Mais aussi peu sérieux soit-il, c'est une mise en bouche qui peut donner envie d'aller plus loin, et qui a le mérite d'être court et très accessible. Il ne laisse en tout cas pas indifférent, et c'est la raison pour laquelle je l'ai choisi plutôt qu'un autre. En revanche, la bibliographie qu'il indique à la fin de son bouquin est une belle plaisanterie. Primo, la grosse majorité des livres cités est quasiment introuvable à quiconque ne possède pas un jet privé ou n'habite pas à côté d'une très grande bibliothèque, car ils sont presque tous épuisés et non-réédités ; deuxio, on a vraiment l'impression qu'il les cite pour l'esbrouffe, car plusieurs lacunes (dates ou personnages, lieux...) de son ouvrage se rempliraient en feuilletant n'importe lequel des oeuvres citées.

Mais ne boudons pas le plaisir, c'est à lire comme une oeuvre de fiction, diablement entraînante.

"Par mon conseil prens tout en gré, Villon!"

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