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Docteurdance

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Membre+, 51ans Posté(e)
chirona Membre+ 3 432 messages
Baby Forumeur‚ 51ans‚
Posté(e)

El desdichado

Je suis le ténébreux, - le veuf, - l'inconsolé,

Le prince d'Aquitaine à la tour abolie

Ma seule étoile est morte, - et mon luth constellé

Porte le soleil noir de la Mélancolie.

Dans la nuit du tombeau, toi qui m'as consolé,

Rends-moi le Pausilippe et la mer d'Italie,

La fleur qui plaisait tant à mon coeur désolé,

Et la treille où le pampre à la rose s'allie.

Suis-je Amour ou Phébus ? ... Lusignan ou Biron ?

Mon front est rouge encor du baiser de la reine ;

J'ai rêvé dans la grotte où nage la sirène...

Et j'ai deux fois vainqueur traversé l'Achéron ;

Modulant tout à tour sur la lyre d'Orphée

Les soupirs de la sainte et les cris de la fée.

Gérard de Nerval, Les Chimères (1854)

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Membre, Leo c'est mon dernier mot, Posté(e)
chris7777 Membre 4 502 messages
Leo c'est mon dernier mot,
Posté(e)

LXXXV - L'Horloge

Horloge! dieu sinistre, effrayant, impassible,

Dont le doigt nous menace et nous dit: "Souviens-toi!

Les vibrantes Douleurs dans ton coeur plein d'effroi

Se planteront bientôt comme dans une cible;

Le Plaisir vaporeux fuira vers l'horizon

Ainsi qu'une sylphide au fond de la coulisse;

Chaque instant te dévore un morceau du délice

A chaque homme accordé pour toute sa saison.

Trois mille six cents fois par heure, la Seconde

Chuchote: Souviens-toi! - Rapide, avec sa voix

D'insecte, Maintenant dit: Je suis Autrefois,

Et j'ai pompé ta vie avec ma trompe immonde!

Remember! Souviens-toi! prodigue! Esto memor!

(Mon gosier de métal parle toutes les langues.)

Les minutes, mortel folâtre, sont des gangues

Qu'il ne faut pas lâcher sans en extraire l'or!

Souviens-toi que le Temps est un joueur avide

Qui gagne sans tricher, à tout coup! c'est la loi.

Le jour décroît; la nuit augmente; souviens-toi!

Le gouffre a toujours soif; la clepsydre se vide.

Tantôt sonnera l'heure où le divin Hasard,

Où l'auguste Vertu, ton épouse encor vierge,

Où le Repentir même (oh! la dernière auberge!),

Où tout te dira Meurs, vieux lâche! il est trop tard!"

Charles Baudelaire

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Membre+, 51ans Posté(e)
chirona Membre+ 3 432 messages
Baby Forumeur‚ 51ans‚
Posté(e)

:snif: Une des nombreuses merveilles des Fleurs du mal :blush: :coeur::coeur:

A une passante

La rue assourdissante autour de moi hurlait.

Longue, mince, en grand deuil, douleur majestueuse,

Une femme passa, d'une main fastueuse

Soulevant, balançant le feston et l'ourlet ;

Agile et noble, avec sa jambe de statue.

Moi, je buvais, crispé comme un extravagant,

Dans son oeil, ciel livide où germe l'ouragan,

La douceur qui fascine et le plaisir qui tue.

Un éclair... puis la nuit ! - Fugitive beauté

Dont le regard m'a fait soudainement renaître,

Ne te verrai-je plus que dans l'éternité ?

Ailleurs, bien loin d'ici ! trop tard ! jamais peut-être !

Car j'ignore où tu fuis, tu ne sais où je vais,

é toi que j'eusse aimée, ô toi qui le savais !

Baudelaire

Les Fleurs du mal, Tableaux parisiens, 1857

Modifié par chirona
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Membre, Leo c'est mon dernier mot, Posté(e)
chris7777 Membre 4 502 messages
Leo c'est mon dernier mot,
Posté(e)

Rappelle-toi Barbara

Il pleuvait sans cesse sur Brest ce jour-là

Et tu marchais souriante

é panouie ravie ruisselante

Sous la pluie

Rappelle-toi Barbara

Il pleuvait sans cesse sur Brest

Et je t'ai croisée rue de Siam

Tu souriais

Et moi je souriais de même

Rappelle-toi Barbara

Toi que je ne connaissais pas

Toi qui ne me connaissais pas

Rappelle-toi

Rappelle-toi quand même ce jour-là

N'oublie pas

Un homme sous un porche s'abritait

Et il a crié ton nom

Barbara

Et tu as couru vers lui sous la pluie

Ruisselante ravie épanouie

Et tu t'es jetée dans ses bras

Rappelle-toi cela Barbara

Et ne m'en veux pas si je te tutoie

Je dis tu à tous ceux que j'aime

Même si je ne les ai vus qu'une seule fois

Je dis tu à tous ceux qui s'aiment

Même si je ne les connais pas

Rappelle-toi Barbara

N'oublie pas

Cette pluie sage et heureuse

Sur ton visage heureux

Sur cette ville heureuse

Cette pluie sur la mer

Sur l'arsenal

Sur le bateau d'Ouessant

Oh Barbara

Quelle connerie la guerre

Qu'es-tu devenue maintenant

Sous cette pluie de fer

De feu d'acier de sang

Et celui qui te serrait dans ses bras

Amoureusement

Est-il mort disparu ou bien encore vivant

Oh Barbara

Il pleut sans cesse sur Brest

Comme il pleuvait avant

Mais ce n'est plus pareil et tout est abimé

C'est une pluie de deuil terrible et désolée

Ce n'est même plus l'orage

De fer d'acier de sang

Tout simplement des nuages

Qui crèvent comme des chiens

Des chiens qui disparaissent

Au fil de l'eau sur Brest

Et vont pourrir au loin

Au loin très loin de Brest

Dont il ne reste rien.

Jacques Prévert, Paroles

Modifié par chris7777
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Membre, 35ans Posté(e)
Imparfaite Membre 872 messages
Baby Forumeur‚ 35ans‚
Posté(e)

Je vis, je meurs: je me brule et me noie,

J'ai chaud extrême en endurant froidure;

La vie m'est et trop molle et trop dure,

J'ai grands ennuis entremélés de joie.

Tout en un coup je ris et je larmoie,

Et en plaisir maint grief tourment j'endure;

Mon bien s'en va, et à jamais il dure,

Tout en un coup je sèche et je verdoie.

Ainsi Amour inconstamment me mène

Et, quand je pense avoir plus de douleur,

Sans y penser je me trouve hors de peine.

Puis, quand je crois ma joie être certaine,

Et être en haut de mon désiré heur,

Il me remet en mon premier malheur.

Louise Labé

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Membre+, 51ans Posté(e)
chirona Membre+ 3 432 messages
Baby Forumeur‚ 51ans‚
Posté(e)

Las, où est maintenant...

Las, où est maintenant ce mépris de Fortune ?

Où est ce c¿ur vainqueur de toute adversité,

Cet honnête désir de l'immortalité,

Et cette honnête flamme au peuple non commune ?

Où sont ces doux plaisirs qu'au soir sous la nuit brune

Les Muses me donnaient, alors qu'en liberté

Dessus le vert tapis d'un rivage écarté

Je les menais danser aux rayons de la Lune ?

Maintenant la Fortune est maîtresse de moi,

Et mon c¿ur, qui soulait être maître de soi,

Est serf de mille maux et regrets qui m'ennuient.

De la postérité je n'ai plus de souci,

Cette divine ardeur, je ne l'ai plus aussi,

Et les Muses de moi, comme étranges, s'enfuient.

Joachim du Bellay, Les Regrets (1558)

Modifié par chirona
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Invité Lucy Van Pelt
Invités, Posté(e)
Invité Lucy Van Pelt
Invité Lucy Van Pelt Invités 0 message
Posté(e)

L'oiseau bleu de Charles Bukowski

there's a bluebird in my heart that

wants to get out

but I'm too tough for him,

I say, stay in there, I'm not going

to let anybody see

you.

there's a bluebird in my heart that

wants to get out

but I pour whiskey on him and inhale

cigarette smoke

and the whores and the bartenders

and the grocery clerks

never know that

he's

in there.

there's a bluebird in my heart that

wants to get out

but I'm too tough for him,

I say,

stay down, do you want to mess

me up?

you want to screw up the

works?

you want to blow my book sales in

Europe?

there's a bluebird in my heart that

wants to get out

but I'm too clever, I only let him out

at night sometimes

when everybody's asleep.

I say, I know that you're there,

so don't be

sad.

then I put him back,

but he's singing a little

in there, I haven't quite let him

die

and we sleep together like

that

with our

secret pact

and it's nice enough to

make a man

weep, but I don't

weep, do

you?

C. Bukowski

Il y a dans mon c¿ur un oiseau bleu qui

veut s'échapper

mais je suis trop coriace pour lui

Je dis, reste là-dedans, je ne suis pas sur le point

de laisser n'importe qui te

voir

Il y a dans mon c¿ur un oiseau bleu qui

veut s'échapper

mais je déverse du whisky sur lui et j'inhale

de la fumée de cigarette

et les putes et les tenanciers de bars

et les garçons d'épicerie

ne savent jamais qu'

il est

là-dedans

Il y a dans mon c¿ur un oiseau bleu qui

veut s'échapper

mais je suis trop coriace pour lui

Je dis,

est-ce que tu veux me

traumatiser ?

tu veux bousiller mes

¿uvres ?

tu veux souffler les ventes de mon livre en

Europe ?

Il y a dans mon c¿ur un oiseau bleu qui

veut s'échapper

mais je suis trop malin, je le laisse juste sortir

la nuit quelquefois

quand chacun est endormi.

Je dis, je sais que tu es là,

alors ne sois pas

triste.

et puis je le remets à sa place,

mais il chante un petit peu

là-dedans, je ne l'ai pas tout-à-fait laissé

mourir

et nous dormons ensemble comme

ça

avec notre

pacte secret

et c'est assez gentil pour

faire qu'un homme

pleure, mais je ne

pleure pas,

et

vous ?

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Membre+, 51ans Posté(e)
chirona Membre+ 3 432 messages
Baby Forumeur‚ 51ans‚
Posté(e)

Mignonne, allons voir si la rose

A Cassandre

Mignonne, allons voir si la rose

Qui ce matin avoit desclose

Sa robe de pourpre au Soleil,

A point perdu ceste vesprée

Les plis de sa robe pourprée,

Et son teint au vostre pareil.

Las ! voyez comme en peu d'espace,

Mignonne, elle a dessus la place

Las ! las ses beautez laissé cheoir !

é vrayment marastre Nature,

Puis qu'une telle fleur ne dure

Que du matin jusques au soir !

Donc, si vous me croyez, mignonne,

Tandis que vostre âge fleuronne

En sa plus verte nouveauté,

Cueillez, cueillez vostre jeunesse :

Comme à ceste fleur la vieillesse

Fera ternir vostre beauté.

Pierre de Ronsard

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Membre, 96ans Posté(e)
Sibylle Membre 55 messages
Baby Forumeur‚ 96ans‚
Posté(e)

J'ai tant rêvé de toi que tu perds ta réalité.

Est-il encore temps d'atteindre ce corps vivant

Et de baiser sur cette bouche la naissance

De la voix qui m'est chère?

J'ai tant rêvé de toi que mes bras habitués

En étreignant ton ombre

A se croiser sur ma poitrine ne se plieraient pas

Au contour de ton corps, peut-être.

Et que, devant l'apparence réelle de ce qui me hante

Et me gouverne depuis des jours et des années,

Je deviendrais une ombre sans doute.

O balances sentimentales.

J'ai tant rêvé de toi qu'il n'est plus temps

Sans doute que je m'éveille.

Je dors debout, le corps exposé

A toutes les apparences de la vie

Et de l'amour et toi, la seule

qui compte aujourd'hui pour moi,

Je pourrais moins toucher ton front

Et tes lèvres que les premières lèvres

et le premier front venu.

J'ai tant rêvé de toi, tant marché, parlé,

Couché avec ton fantôme

Qu'il ne me reste plus peut-être,

Et pourtant, qu'a être fantôme

Parmi les fantômes et plus ombre

Cent fois que l'ombre qui se promène

Et se promènera allègrement

Sur le cadran solaire de ta vie.

Desnos.

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Membre+, 51ans Posté(e)
chirona Membre+ 3 432 messages
Baby Forumeur‚ 51ans‚
Posté(e)

Un classique incontournable et indémodable :blush: :

"Le cancre"

Il dit non avec la tête

Mais il dit oui avec le coeur

Il dit oui à ce qu'il aime

Il dit non au professeur

Il est debout

On le questionne

Et tous les problèmes sont posés

Soudain le fou rire le prend

Et il efface tout

Les chiffres et les mots

Les dates et les noms

Les phrases et les pièges

Et malgré les menaces du maître

Sous les huées des enfants prodiges

Avec des craies de toutes les couleurs

Sur le tableau noir du malheur

Il dessine le visage du bonheur.

Jacques Prévert

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Invité Ysaline
Invités, Posté(e)
Invité Ysaline
Invité Ysaline Invités 0 message
Posté(e)

POISON PERDU

Des nuits du blond et de la brune

Pas un souvenir n'est resté ;

Pas une dentelle d'été,

Pas une cravate commune.

Et sur le balcon, où le thé

Se prend aux heures de la lune.

Il n'est resté de trace aucune,

Aucun souvenir n'est resté,

Au bord d'un rideau bleu piquée,

Luit une épingle à tête d'or

Comme un gros insecte qui dort.

Pointe d'un fin poison trempée,

Je te prends, sois-moi préparée

Aux heures des désirs de mort.

Arthur Rimbaud

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Membre+, 51ans Posté(e)
chirona Membre+ 3 432 messages
Baby Forumeur‚ 51ans‚
Posté(e)

Mon rêve familier

Je fais souvent ce rêve étrange et pénétrant

D'une femme inconnue, et que j'aime, et qui m'aime,

Et qui n'est, chaque fois, ni tout à fait la même

Ni tout à fait une autre, et m'aime et me comprend.

Car elle me comprend, et mon coeur transparent

Pour elle seule, hélas! cesse d'être un problème

Pour elle seule, et les moiteurs de mon front blême,

Elle seule les sait rafraîchir, en pleurant.

Est-elle brune, blonde ou rousse? Je l'ignore.

Son nom? Je me souviens qu'il est doux et sonore,

Comme ceux des aimés que la vie exila.

Son regard est pareil au regard des statues,

Et, pour sa voix, lointaine, et calme, et grave, elle a

L'inflexion des voix chères qui se sont tues.

Paul Verlaine, Poèmes saturniens

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Membre, 96ans Posté(e)
Sibylle Membre 55 messages
Baby Forumeur‚ 96ans‚
Posté(e)

Tiens, du Toulet... éa manque...

Nocturne

é mer, toi que je sens frémir

A travers la nuit creuse,

Comme le sein d'une amoureuse

Qui ne peut pas dormir ;

Le vent lourd frappe la falaise...

Quoi ! si le chant moqueur

D'une sirène est dans mon c¿ur -

é c¿ur, divin malaise.

Quoi, plus de larmes, ni d'avoir

Personne qui vous plaigne...

Tout bas, comme d'un flanc qui saigne,

Il s'est mis à pleuvoir.

Comme à ce roi laconien

Comme à ce roi laconien

Près de sa dernière heure

D'une source à l'ombre, et qui pleure,

Fauste, il me souvient;

De la nymphe limpide et noire

qui frémissait tout bas

-Avec mon coeur- quand tu courbas

Tes hanches, pour y boire.

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Membre, 31ans Posté(e)
Eigerie Membre 178 messages
Baby Forumeur‚ 31ans‚
Posté(e)

Premier avertissement

En quoi donc nous importe-t-il

Que tout retourne en poussière,

Sur quels abîmes j'ai chanté,

Dans quels miroirs j'ai pu vivre ?

Je ne suis ni le rêve ni la consolation

Et moins encore la grâce,

Mais peut-être plus souvent

Qu'il ne faut, tu te rappelleras

Ces lignes dont le murmure s'apaise

Et ce regard qui cache au fond de soi

La couronne aux épines rouillées

Dans le tremblement de son silence.

L'amour

C'est parfois un serpent magicien,

Lové près de ton c¿ur.

C'est parfois un pigeon qui roucoule,

Sur la fenêtre blanche.

C'est parfois sous le givre qui brille

La vision d'une fleur.

Mais il mène, en secret, à coup sûr,

Loin de la joie tranquille.

Il sait pleurer si doucement

Dans la prière du violon,

Il fait peur quand on le devine

Sur une lèvre encore inconnue.

Anna Akhmatova

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Membre, Posté(e)
Louise M Membre 152 messages
Baby Forumeur‚
Posté(e)
Tiens, du Toulet... éa manque...

Nocturne

é mer, toi que je sens frémir

A travers la nuit creuse,

Comme le sein d'une amoureuse

Qui ne peut pas dormir ;

Le vent lourd frappe la falaise...

Quoi ! si le chant moqueur

D'une sirène est dans mon c¿ur -

é c¿ur, divin malaise.

Quoi, plus de larmes, ni d'avoir

Personne qui vous plaigne...

Tout bas, comme d'un flanc qui saigne,

Il s'est mis à pleuvoir.

Comme à ce roi laconien

Comme à ce roi laconien

Près de sa dernière heure

D'une source à l'ombre, et qui pleure,

Fauste, il me souvient;

De la nymphe limpide et noire

qui frémissait tout bas

-Avec mon coeur- quand tu courbas

Tes hanches, pour y boire.

Très chouette,Toulet

Une bonne idée d'y avoir pensé :blush:

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Membre+, 51ans Posté(e)
chirona Membre+ 3 432 messages
Baby Forumeur‚ 51ans‚
Posté(e)

Un peu de prose pour changer.

Le pain

La surface du pain est merveilleuse d'abord à cause de cette impression quasi panoramique qu'elle donne : comme si l'on avait à sa disposition sous la main les Alpes, le Taurus ou la Cordillère des Andes. Ainsi donc une masse amorphe en train d'éructer fut glissée pour nous dans le four stellaire, où durcissant elle s'est façonnée en vallées, crêtes, ondulations, crevasses¿ Et tous ces plans dès lors si nettement articulés, ces dalles minces où la lumière avec application couche ses feux, - sans un regard pour la mollesse ignoble sous-jacente. Ce lâche et froid sous-sol que l'on nomme la mie a son tissu pareil à celui des éponges : feuilles ou fleurs y sont comme des s¿urs siamoises soudées par tous les coudes à la fois. Lorsque le pain rassit ces fleurs fanent et se rétrécissent : elles se détachent alors les unes des autres, et la masse en devient friable¿ Mais brisons-la : car le pain doit être dans notre bouche moins objet de respect que de consommation.

Francis Ponge, Le Parti-pris des choses, 1942

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Membre, 31ans Posté(e)
Eigerie Membre 178 messages
Baby Forumeur‚ 31ans‚
Posté(e)

"Je me disais donc que le monde est dévoré par l'ennui. Naturellement, il faut un peu réfléchir pour se rendre compte, ça ne se saisit pas tout de suite. C'est une espèce de poussière. Vous allez et venez sans la voir, vous la respirez, vous la mangez, vous la buvez, et elle est si fine, si ténue qu'elle ne craque même pas sous la dent. Mais que vous vous arrêtiez une seconde, la voilà qui recouvre votre visage, vos mains. Vous devez vous agiter sans cesse pour secouer cette pluie de cendres. Alors, le monde s'agite beaucoup."

Georges Bernanos.

"Donnez le même esprit aux hommes, vous otez tout sel de la société. L'ennui naquit un jour de l'uniformité. L'ennui naquit un jour de l'uniformité."

Antoine Houdar de la Motte.

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Membre+, 51ans Posté(e)
chirona Membre+ 3 432 messages
Baby Forumeur‚ 51ans‚
Posté(e)

Le Pont Mirabeau

Sous le pont Mirabeau coule la Seine

Et nos amours

Faut-il qu'il m'en souvienne

La joie venait toujours après la peine

Vienne la nuit sonne l'heure

Les jours s'en vont je demeure

Les mains dans les mains restons face à face

Tandis que sous

Le pont de nos bras passe

Des éternels regards l'onde si lasse

Vienne la nuit sonne l'heure

Les jours s'en vont je demeure

L'amour s'en va comme cette eau courante

L'amour s'en va

Comme la vie est lente

Et comme l'Espérance est violente

Vienne la nuit sonne l'heure

Les jours s'en vont je demeure

Passent les jours et passent les semaines

Ni temps passé

Ni les amours reviennent

Sous le pont Mirabeau coule la Seine

Vienne la nuit sonne l'heure

Les jours s'en vont je demeure

Guillaume Apollinaire, Alcools, 1913

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Membre, 46ans Posté(e)
delphine63 Membre 644 messages
Baby Forumeur‚ 46ans‚
Posté(e)

Alchimie de la douleur

L'un t'éclaire avec son ardeur,

L'autre en toi met son deuil, Nature !

Ce qui dit à l'un : Sépulture !

Dit à l'autre : Vie et splendeur !

Hermès inconnu qui m'assistes

Et qui toujours m'intimidas,

Tu me rends l'égal de Midas,

Le plus triste des alchimistes ;

Par toi je change l'or en fer

Et le paradis en enfer ;

Dans le suaire des nuages

Je découvre un cadavre cher,

Et sur les célestes rivages

Je bâtis de grands sarcophages.

Auteur:Charles BAUDELAIRE

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  • 1 mois après...
Membre, nyctalope, 39ans Posté(e)
Criterium Membre 2 852 messages
39ans‚ nyctalope,
Posté(e)

Un poème anonyme, dont je me souviendrai toute ma vie. Une Nuit, mue par une force incontrôlable, qui, lancinante, ordonnait à mon esprit d'aller vérifier ma boîte au lettre, sans raison, je sortis en dépit du bon sens, et courus en nuisette jusqu'à ladite boîte... qui était vide. Mais, sur un pavé rieur, je trouvais un poème griffonné d'une main rapide et nerveuse, des mots les plus beaux que j'aie rarement lus.

L'Amour est comme une tasse de thé.

Soit c'est pas la tienne, soit c'est la mienne.

Les arômes en volutes de vin herbé,

Virevoltant dans l'épais nectar, quelle scène!

é Toi belle inconnue le poème est dédié,

Je t'observe tous les soirs de l'autre bout de la Seine.

é 8h35 l'autre matin tu t'es réveillée,

Balisto au petit déjeuner, ô ma reine,

é 9h pile tu as pris une douche bien méritée,

Et moi qui te regardait faire des tiennes.

é bientôt, signé STALKER.

J'ai appelé la police.

:o°

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