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L'ennui annonce-t-il la fin du couple?


Yavin

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L'ennui annonce-t-il la fin du couple?


Dimanche 07 Décembre - 14:49

Promis, jamais nous ne serons comme ces couples qui dînent au restaurant et n'ont plus rien à se dire. Et puis un jour, l'impensable se produit: nous aussi, nous nous ennuyons. Accalmie passagère ou prémices d'un naufrage?



Elle picore ses petits pois, le nez dans son assiette. Lui fixe intensément le fond de son verre. Il consulte discrètement sa montre. Le temps ne passe plus. Ils devraient savourer le moment, le lieu, le repas partagé. Mais ils s'ennuient. Combien de fois les avons-nous observés, ces couples qui dînent ainsi, soudés par cette pesanteur anxiogène? Comment est-ce possible? Comment peut-on éprouver à deux ce que l'on imaginait réservé aux esseulés?

Un sentiment très humain
«L'ennui est un sentiment non pathologique que tout le monde peut éprouver, explique le psychiatre Bernard Granger. Il correspond à la perception - pénible - de la pesanteur du temps: chaque seconde semble durer une éternité.» Cette sensation n'a rien à voir avec la réalité. Elle ne ressemble pas non plus au désoeuvrement de l'enfant inoccupé ou à la morosité d'un dimanche de pluie. Le véritable ennui relève de la métaphysique: il questionne notre rapport au monde. C'est un «enlisement dans l'intervalle», explique le philosophe Vladimir Jankélévitch: nous sommes bloqués, condamnés à l'attente, alourdis par notre vacuité et notre inutilité. Nous perdons le goût de l'existence et de l'altérité sans pouvoir lutter.

Puisqu'il faut bien que ce mécanisme d'enlaidissement du monde se fixe sur un objet, l'ennui se cristallise souvent sur le couple. Il semble sonner le glas de l'amour; nous avons fait le tour de l'autre, nous n'avons plus rien à lui dire: «Si je m'ennuie, c'est que je ne t'aime plus, que je te connais trop, que tu ne m'intéresses plus.» Grossière erreur, car nous ne le connaissons jamais vraiment. Tout comme nous ne nous connaissons jamais nous-mêmes. Notre vocation humaine à l'insatisfaction est normale, structurelle, et n'est due ni à notre incompétence, ni à l'incomplétude de l'autre. «Pas la peine d'incriminer le couple dans cette affaire éminemment personnelle qu'est l'ennui», s'agace Véronique Nahoum-Grappe, chercheuse en sciences sociales: «Actuellement, l'image de la non-vie, c'est le couple monogame durable. Une incarnation de la routine, de l'avilissement, de l'engraissement, de l'embourgeoisement, de la passivité. Et c'est cette mythologie-là qui nous plombe. Pourquoi devoir tout le temps obéir aux injonctions de multiplicité? Dans la société contemporaine des individualismes solitaires, nous devenons prisonniers de mots d'ordre culturels: il faut réussir. Si je pense qu'aller au boulot, répéter les mêmes gestes, faire l'amour avec le même être tous les soirs, c'est rater sa vie et qu'il faut casser tout ça, alors je vais me dire que je m'ennuie. Aujourd'hui, tout le monde divorce en disant: Je m'ennuyais.»


Hanna Waar
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Source: Le Matin
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