L'édifice du soupçon¿

Penser le soupçon, non pas comme une déconstruction ou comme un frein à la réflexion collective, mais plutôt comme une remise en cause personnelle de nos valeurs, de notre morale dans sa globalité, c'est redonner à ces penseurs l'aura qui devrait être la leur aujourd'hui. Loin de moi l'idée de faire passer la vertu personnelle au-delà de la raison d'état, mais on ne peut que constater - presque fatalement - que les plus aptes à réfléchir et à remettre en cause leur environnemment ne sont que trop rarement ceux qui sont nés avec une cuillère en argent dans la bouche¿

Rendre l'Homme pleinement conscient de son asservissement vis-à-vis de la morale dans l'optique de rechercher son indépendance et sa liberté propre, c'est faire comme Zarathoustra : aller à la rencontre des Hommes et briser toutes ces tables (« Lorsque je suis venu auprès des hommes, je les ai trouvés assis sur une vieille présomption »). Ainsi, la morale chrétienne (fondamentalement différente de celle de la Bible¿) assimile le pêché à la chair, à la sexualité, pour mieux refuser celle-ci. C'est alors le refus du corps, le refus d'une chose qui nous est imposée. On remarquera volontier que l'éloge de la raison est toujours passée par la blâme du receptacle mais, finalement, n'est-ce pas tronquer la vie

et lui ôter une partie de son essence même que d'en refuser ce qui fait son réceptacle? (à l'inverse l'outrance sexuelle et même l'outrance de toute discipline ne peut que servir à cacher, même à combler un certain vide existentiel). Les morales traditionnelles seraient alors hypocrites en se présentant comme des morales désintéressées recherchant une forme de Bien universel alors que derrière elles se cacheraient des hommes incapables de s'affirmer, d'assumer leur singularité et s'abritant par faiblesse derrière des maximes universelles.